Question de Mme BEAUFILS Marie-France (Indre-et-Loire - CRC-SPG) publiée le 19/02/2009
Mme Marie-France Beaufils attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur la situation du centre hospitalier régional et universitaire (CHRU) de Tours qui connait des difficultés budgétaires croissantes. Elle constate que ces difficultés financières sont dues à une progression insuffisante des crédits reconductibles. A cela s'ajoute la tarification à l'activité (T2A) qui aggrave le déficit. L'application de cette tarification donne un résultat édifiant pour le CHRU de Tours : en 2006 le déficit était de 3 millions d'euros, il est passé à 5 millions d'euros en 2007 et atteindrait 9,5 millions d'euros en 2008. Elle lui rappelle que les moyens financiers alloués ne suffisent plus pour atteindre l'équilibre budgétaire. Cela risque de remettre en cause l'emploi et le bon fonctionnement des services. Elle lui demande d'allouer dans l'urgence une dotation destinée à solder le déficit antérieur cumulé et ,dans un deuxième temps, de procéder au versement de moyens financiers suffisants pour permettre au CHRU de Tours de développer son activité afin de répondre encore mieux aux besoins de la population.
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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 18/03/2009
Réponse apportée en séance publique le 17/03/2009
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 451, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la ministre, j'ai souhaité vous interpeller ce matin sur la situation financière de l'hôpital de Tours, qui semble rejoindre celle de l'hôpital public en France.
Vous connaissez l'attachement de la population française à l'hôpital public. Plus de neuf Français sur dix, soit 93 % d'entre eux, jugent que le personnel y est compétent, mais 89 % estiment que l'hôpital manque de moyens financiers et humains.
Alors que l'hôpital public traverse d'énormes difficultés, une étude publiée par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES, précise que les « cliniques privées à but lucratif » ont eu un taux de rentabilité financière de 16 % en 2005. Le résultat net du groupe Générale de Santé, leader du marché français des cliniques à but lucratif, a augmenté de plus 91,2 % entre 2007 et 2008, et 420 millions d'euros ont été versés à ses actionnaires. Un tel résultat pourrait laisser supposer que le secteur privé est efficace financièrement. Or ces résultats recouvrent de nombreux gaspillages.
Le fait de gagner des millions d'euros sur le dos de notre sécurité sociale et des malades, alors même que ceux-ci sont de plus en plus nombreux à ne pouvoir se soigner correctement, ne témoigne pas, me semble-t-il, d'une bonne gestion. Au contraire !
Vous avez introduit, en 2004, la tarification à l'activité, la fameuse T2A, qui devait, d'après ses concepteurs, apporter de l'efficience au système. Puis vous avez décidé, en 2012, d'appliquer le principe de la convergence tarifaire entre le public et le privé. Or les hôpitaux publics soignent tous les patients, quels que soient leurs revenus, leur âge, leur pathologie, et quelle que soit l'heure à laquelle ils se présentent dans leurs services. Les coûts ne sont donc pas comparables.
Le rapport de la Cour des comptes de 2007 sur la sécurité sociale constate que « les dépenses des établissements sous dotation globale sont inférieures de 187 millions d'euros à l'objectif, alors que celles des cliniques privées dépassent l'objectif de 168 millions d'euros ».
Le CHU de Tours rencontre de graves difficultés : l'application de la T2A y est révélatrice de l'aggravation de sa situation financière, qui ne fait que s'amplifier au fil des ans. En 2006, le déficit était de 3 millions d'euros ; il est passé à 5 millions d'euros en 2007, et il atteindrait la somme de 9,5 millions d'euros cette année.
Je vous demande, madame la ministre, pour répondre aux vux votés par le dernier conseil d'administration du CHU, d'apporter une aide substantielle à notre hôpital, pour qu'il puisse continuer à jouer le rôle qui est le sien, non pas seulement pour Tours et son agglomération, ou pour le seul département d'Indre-et-Loire, mais aussi pour les départements voisins.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Madame la sénatrice, puisque vous avez commencé votre intervention par une remarque d'ordre général sur l'hôpital public, je tiens à vous rappeler un certain nombre de chiffres.
Les dépenses hospitalières de la France sont les plus élevées au monde. Depuis des années, nous consacrons à l'hôpital public des ressources en constante augmentation, car il a besoin de moyens.
Dans les circonstances extrêmement difficiles de la crise économique mondiale, les dépenses hospitalières de l'hôpital public augmenteront cette année de 3,1 %. De plus, nous avons mis en place un plan d'investissement de 10 milliards d'euros, qui doit durer jusqu'à la fin de 2011. Je rappelle également que 54 % des établissements publics français sont en excédent budgétaire et que 7 % des établissements concentrent 90 % des déficits. C'est dans ce cadre qu'il nous faut situer le présent débat !
Vous appelez plus précisément mon attention, madame la sénatrice, sur la situation financière du centre hospitalier universitaire de Tours. Ce centre hospitalier est en effet confronté à un déficit qui s'est aggravé en 2008.
Plusieurs mesures vont contribuer à améliorer la situation financière de cet établissement important pour l'offre de soins dans la région Centre.
Au niveau national, et contrairement à ce que vous avez dit, la réforme du financement des établissements de santé a un impact favorable sur le CHU de Tours. Cet établissement reçoit en effet une dotation bien plus importante du fait de la mise en place de la T2A que s'il était resté soumis au régime de la dotation globale. Grâce à la tarification à l'activité, il est donc gagnant !
Je signale, en outre, que les modulations que j'ai apportées au calcul de la T2A, modulations liées à la gravité de l'état des patients et à leur situation de précarité, et qui sont entrées en vigueur le 1er mars 2009, lors de l'actuelle campagne tarifaire, sont très favorables au CHU de Tours. Il en est de même de la réforme du financement des missions d'enseignement, de recherche, de recours et d'innovation, les MERRI : compte tenu de ses performances, les moyens alloués à ce titre au CHU de Tours sont renforcés.
Les difficultés de l'établissement ne sont donc aucunement dues au modèle de financement par la tarification à l'activité, bien au contraire.
L'établissement est actuellement dans un processus de reconstruction de ses bâtiments, qui s'achèvera en 2011, et bénéficie de crédits importants à ce titre. Cette politique ambitieuse et nécessaire a pour effet un accroissement très sensible de ses charges d'amortissement et de ses frais.
Compte tenu de cette évolution, un plan de retour à l'équilibre a été voté par le conseil d'administration et a fait l'objet d'engagements contractuels avec l'agence régionale de l'hospitalisation. Dans ce cadre, le CHU s'est engagé dans un processus de réorganisation de ses services, en particulier des blocs opératoires, de la réanimation médicale et de la chirurgie orthopédique. Il en est de même pour les activités de pédiatrie.
Le centre hospitalier régional universitaire doit être en mesure de développer son activité, notamment en cancérologie, compte tenu de l'extension des capacités d'accueil du service d'oncologie médicale.
L'ensemble de ces mesures va contribuer à améliorer la qualité des prises en charge dans le cadre d'une organisation plus efficiente.
Ces efforts font l'objet d'un accompagnement financier. Au-delà des aides accordées pour le financement des investissements, une aide reconductible de 2 millions d'euros destinée au financement des charges d'amortissements a été accordée en 2008.
L'établissement a également bénéficié d'aides exceptionnelles : 5 millions d'euros lui ont été attribués sur les trois exercices 2005-2007 et 5 millions d'euros, à nouveau, sur le seul exercice 2008.
Vous l'aurez constaté, le CHU de Tours est entré dans un processus de redressement et de rationalisation qui doit lui permettre de consolider sa situation.
Vous pouvez être rassurée, madame la sénatrice, le Gouvernement et la ministre de la santé que je suis portent une grande attention à cet établissement et l'accompagnent dans ses efforts.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, que j'ai écoutée attentivement. Toutefois, je ne partage pas votre point de vue, en particulier sur la répartition actuelle des coûts financiers de santé entre l'hôpital public et le secteur privé.
Je crois qu'on n'intègre pas suffisamment le fait que l'hôpital public se trouve dans l'obligation de prendre en charge des traitements lourds et financièrement très coûteux. Dans le même temps, reviennent au secteur privé les actes les plus lucratifs, ceux dont les traitements, beaucoup plus courts, ont des coûts financiers nettement plus légers que ceux que supporte la plupart du temps l'hôpital public.
Outre que le CHU doit, comme vous l'avez dit, financer son plan de restructuration la reconstruction de l'ensemble des bâtiments est, en effet, lourde pour son budget il doit aussi supporter ces activités dont la charge financière est beaucoup plus importante.
Malgré sa situation de pointe dans un certain nombre de domaines, dont celui de la cancérologie que vous avez évoqué, il n'arrive malheureusement pas, aujourd'hui encore, à répondre à l'ensemble des besoins de la population.
Je citerai, à titre d'exemple, la situation douloureuse vécue dernièrement par une famille dont l'enfant atteint de leucémie a dû être transféré vers un centre hospitalier situé dans une autre région, faute d'avoir à Tours les moyens en personnel pour faire face aux besoins.
Cet aspect financier pèse lourd. Si le conseil d'administration de l'hôpital a dernièrement émis un vu que des moyens financiers supplémentaires soient accordés, ce n'est pas pour le plaisir ! Simplement, il se trouve aujourd'hui acculé à des difficultés auxquelles, je le reconnais bien volontiers, vous avez porté remède l'an dernier en accordant des moyens supplémentaires. Mais, aujourd'hui, malgré les efforts de redressement qu'il a engagés, l'hôpital n'est pas en mesure de rétablir la situation.
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