Question de M. LONGUET Gérard (Meuse - UMP) publiée le 05/02/2009

M. Gérard Longuet attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les conséquences pour les serristes chauffés au gaz de la décision du Gouvernement de ne pas leur répercuter la baisse des prix du gaz constatée sur les marchés depuis le pic de l'été dernier, alors même que ce prix indexé sur celui du pétrole brut s'élève aujourd'hui au tiers de ce qu'il était en août 2008.
Il lui rappelle que les serristes, comme les autres producteurs agricoles ou industriels, sont confrontés à la concurrence d'autres producteurs qui bénéficient quant à eux, au moins temporairement, de la baisse des prix du fuel ou s'ils sont étrangers de la baisse du prix du gaz hors de France.
Le maintien d'un prix très élevé tout au long d'un hiver assez rigoureux qui accroît très notablement les dépenses de chauffage des serres et risque, en effet, de provoquer des cessations d'activité d'autant plus préoccupantes dans une période de crise violente de l'emploi que les emplois de remplacement dans les zones rurales sont rares, pour ne pas dire inexistants, dans l'immédiat du moins.
Il lui demande quelles mesures elle entend prendre pour faire baisser les tarifs régulés des serristes chauffés au gaz.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services publiée le 18/02/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2009

La parole est à M. Gérard Longuet, auteur de la question n° 419, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. Gérard Longuet. Ma question s'adressait initialement à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui a la responsabilité de la politique de l'énergie dans votre gouvernement, monsieur le secrétaire d'État, mais je me réjouis que vous puissiez me répondre, car votre connaissance de la vie des entreprises et des questions de l'énergie me rassure sur l'attention que vous porterez à la démarche d'une filière nationale.

La production agricole sous serre, dont le secteur compte près de 10 000 actifs et 7 000 salariés, est présente sur l'ensemble du territoire aussi bien dans des régions de tradition – vous le savez bien, monsieur le président – que dans des régions moins bien servies par la nature, par le soleil notamment, mais qui ont développé des activités de production de qualité à l'image des pays du nord de l'Europe et de notre principal concurrent, les Pays-Bas.

Ces activités sous serre nécessitent évidemment un soutien en matière de combustible et près de 80 % des serristes français ont choisi le gaz naturel. Ils y ont d'ailleurs été fortement incités et aidés depuis près de vingt-cinq ans par les pouvoirs publics, considérant que le gaz naturel est l'une des formes les moins agressives, les plus raisonnables et les plus maîtrisées de combustible pour ce type d'activité.

En France, pour le gaz naturel, il n'y a pas de libre confrontation de l'offre et de la demande, il y a une régulation des tarifs. C'est un choix des gouvernements successifs, qui n'a pas été remis en cause par le vôtre, monsieur le secrétaire d'État.

Le Gouvernement a été amené à fixer les règles d'évolution de cette régulation des tarifs en tenant compte du prix du baril de pétrole, qui est l'indicateur dominant en matière d'énergies fossiles, auxquelles le gaz naturel est nécessairement lié.

C'est la raison pour laquelle, en 2008, année d'explosion du prix du baril – au moins au premier semestre – le Gouvernement a été amené à augmenter d'une façon significative le prix du gaz, dont ont besoin les serristes, avec une hausse de 20 % entre le 1er janvier 2008 et le 15 août 2008.

Or, le 15 août 2008 a eu lieu la dernière augmentation du prix du gaz, qui est en décalage par rapport à l'évolution du prix du baril. Depuis cette date, le prix du baril n'a cessé – heureusement pour l'économie mondiale – de décroître fortement. Après avoir, au mois de juillet 2008, atteint des sommets à plus de 140 dollars le baril, il est redescendu à environ 40 dollars.

Or, depuis huit mois, le Gouvernement n'a pris aucune décision en matière de régulation du tarif du gaz naturel, de telle sorte que ce qui valait à la hausse ne vaut pas, semble-t-il, à la baisse.

La régulation n'a pas été affectée par la diminution spectaculaire du prix du baril et le prix du gaz naturel est toujours déterminé aujourd'hui, en février 2009, en fonction de considérations qui valaient en août 2008, au moment où le baril était à 140 dollars. Or, il n'est plus qu'à 40 dollars.

La filière est aujourd'hui gravement menacée par des coûts de production reposant principalement sur le prix du combustible, en l'occurrence le gaz naturel, qui sont tout à fait préjudiciables pour l'équilibre économique de cette branche et menacent gravement la poursuite de cette activité, dont je rappelais à l'instant qu'elle emploie des salariés sur l'ensemble du territoire français, dans le Midi notamment, monsieur le président, mais également en Lorraine, y compris dans le département de la Meuse.

Je souhaiterais donc savoir, monsieur le secrétaire d'État, si le Gouvernement va tirer les leçons d'une régulation qui fonctionne à la hausse et qui manifestement ne fonctionne pas à la baisse.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Monsieur le sénateur, votre question démontre d'abord votre parfaite connaissance du secteur de l'énergie et des défis auxquels sont confrontés les producteurs sous serre, qui subissent de plein fouet les variations du coût de l'énergie.

Je vais m'attacher à répondre à votre question très claire. Si, toutes choses égales par ailleurs, le prix du baril n'évolue pas, nous devrions, dans les prochaines semaines, avoir à donner une bonne nouvelle aux producteurs qui vous ont mobilisé.

S'agissant du gaz naturel, qui est importé à plus de 98 %, comme vous l'avez dit, les hausses effectuées en France ces dernières années n'ont fait que refléter l'évolution des coûts d'approvisionnement des fournisseurs sur les marchés internationaux. Ainsi, Gaz de France-Suez se fournit dans le cadre de contrats à long terme géographiquement diversifiés, notamment auprès des grands pays producteurs : la Norvège, les Pays-Bas, la Russie, l'Algérie. Ces contrats prévoient que les coûts d'achat du gaz sont indexés, vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, sur les cours des produits pétroliers. Le principe d'indexation, mis en place de longue date, permet de garantir la compétitivité du gaz vendu, dans la mesure où celui-ci est substituable aux produits pétroliers avec lesquels il entre en concurrence.

L'évolution des coûts d'approvisionnement de Gaz de France-Suez se répercute dans ses tarifs réglementés de vente, conformément aux dispositions de l'article 7 de la loi du 3 janvier 2003, selon une formule de lissage convenue avec les pouvoirs publics, indépendante des contraintes éventuelles de rentabilité retenues par les acteurs des marchés financiers.

Le principe du lissage se veut protecteur du consommateur final, atténuant la variabilité des prix et induisant, de ce fait, un effet retard.

Ainsi, le calcul des coûts d'approvisionnement est réalisé, préalablement à chaque date d'évolution tarifaire, à partir de la moyenne des cours des produits pétroliers de référence et du taux de change entre l'euro et le dollar sur une période de six mois se terminant un mois avant la date du mouvement tarifaire, selon la formule de lissage dite « 6-1-3 ».

À titre d'exemple, un mouvement au 1er janvier répercute le cours moyen des produits pétroliers de référence des mois de juin à novembre de l'année précédente. Les trois mouvements tarifaires de 2008 ont répercuté un baril de pétrole d'une valeur moyenne de 56 euros au 1er janvier 2008, 61 euros au 1er avril 2008 – le mouvement a été décalé fin avril – et 67 euros au 1er juillet 2008, le mouvement ayant également été décalé au 15 août 2008.

Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le prix du pétrole ayant atteint des records aux mois de juin, juillet et août 2008, toute évolution tarifaire à court terme conduirait à une nouvelle augmentation des tarifs. C'est pour cette raison qu'elle n'a pas été décidée.

En ce qui concerne les exploitants du secteur de la production légumière et horticole sous serre, je souhaite rappeler que, à l'occasion du mouvement d'avril 2008, la hausse moyenne effectuée n'a pas été totalement répercutée sur le tarif Telnuit dont ils bénéficient. II s'agissait alors d'une mesure de soutien à la profession des serristes.

Toutefois, dans son avis consultatif sur ce mouvement tarifaire, la Commission de régulation de l'énergie a indiqué que cette décision risquait de créer des distorsions de concurrence.

Par ailleurs, pour respecter la hausse moyenne décidée par le Gouvernement, Gaz de France-Suez a dû appliquer une hausse sensiblement plus forte sur les autres tarifs, en particulier ceux des immeubles d'habitation chauffés collectivement au gaz naturel, parmi lesquels figurent de nombreux logements sociaux. Dans ces conditions, il n'est pas envisagé d'accorder un traitement tarifaire préférentiel au bénéfice des serristes.

En revanche, le tarif Telnuit évoluera comme l'ensemble des tarifs réglementés du gaz naturel à l'occasion du prochain mouvement tarifaire à la baisse prévu au printemps, si toutefois les prix pétroliers se maintiennent durablement à leur niveau actuel. Une baisse des tarifs interviendra donc dans les semaines qui viennent.

Dans l'immédiat, d'autres pistes, non tarifaires, d'aide à la profession des serristes pourraient être explorées. J'observe notamment que Gaz de France-Suez a pris plusieurs initiatives à l'égard de la clientèle concernée depuis plusieurs années, en particulier sur le plan de l'amélioration de leur performance énergétique.

En outre, Gaz de France-Suez a développé un service de lissage trimestriel des paiements, répondant ainsi au besoin spécifique de trésorerie de la profession. La convention de partenariat signée en octobre 2008 avec la Fédération nationale des producteurs de légumes a reconduit ces mesures pour 2009.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, des mesures seront prises dans les prochaines semaines dans une perspective plus favorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Monsieur le secrétaire d'État, je note que les pouvoirs publics attachent une attention particulière à cette profession. Le grand rendez-vous de l'agriculture qu'est le salon international de l'agriculture, qui ouvrira ses portes le 21 février prochain, sera, je l'espère, l'occasion pour les serristes d'avoir une explication franche et loyale avec le ministre de l'agriculture et de la pêche, chargé de la profession, et le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui en est sans doute plus éloigné, mais qui, dans ce cas particulier, tient la clé de leurs revenus et de leur capacité à survivre.

Compte tenu des mouvements erratiques violents constatés sur le marché des matières premières, notamment sur celui de l'énergie, il serait sans doute raisonnable d'imaginer un système plus réactif – sinon à la hausse ! – du moins à la baisse, car les serristes ont vraiment le sentiment de payer les conséquences d'une rigidité au détriment de leur activité et de leur capacité à maintenir l'emploi.

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