Question de M. MARTIN Pierre (Somme - UMP) publiée le 31/01/2008
M. Pierre Martin attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'instauration du service minimum dans les écoles maternelles et élémentaires qui a été expérimentée le 24 janvier dernier et qui semble répondre à l'attente d'une très forte majorité des parents (83%). En effet, si la liberté des enseignants doit être respectée, la liberté de travailler des familles aussi. Trop souvent ces parents d'élèves sont mis devant le fait accompli et doivent répondre dans l'urgence à un problème de garde qui vient grever leur budget et/ou leur organisation professionnelle. Toutefois beaucoup de maires s'interrogent sur l'incidence et les retombées éventuelles en ce qui les concerne de la mise en place de ce service d'accueil. Sans remettre en cause le droit de grève, une première question se pose : il existait autrefois une contrainte qui obligeait les directeurs d'école à accueillir les élèves les jours de grève parce qu'ils sont responsables de ce qui se passe dans leurs locaux durant le temps scolaire, Qu'en est-il de cette mesure ? Par ailleurs, aujourd'hui, la mise en place du service minimal d'accueil (SMA) n'a pas la même résonance que l'on soit en ville ou à la campagne. Si au niveau de l'accueil, le problème semble moins difficile à gérer dans les villes où il existe des équipements, du personnel et des animateurs recrutés pour faire fonctionner les centres de loisir sans hébergement, il n'en va pas de même dans les zones rurales, où les élèves accueillis puis dirigés dans leur classe passeront deux fois trois heures dans la journée sous la surveillance de personnels non qualifiés dont on ne connaît rien des aptitudes pédagogiques requises lorsqu'il s'agit d'occuper, au pire d'assurer simplement la garde de jeunes et très jeunes élèves. Au-delà de cette préoccupation, les maires s'interrogent sur bien d'autres points. Verront-ils leur responsabilité engagée en cas d'incident, d'accident voire d'une défaillance du personnel qu'ils ont mis à disposition? Sont-ils tenus d'assurer la cantine alors que les fonctionnaires attachés à ce service font grève eux aussi ? Enfin, lorsque la compétence scolaire a été transférée à la communauté de communes, comment pourra-t-on gérer un conflit entre cette dernière favorable à l'accueil des élèves et un maire réticent à l'usage des locaux scolaires de sa commune ? Voici autant de questions auxquelles il souhaite que puisse être apportée une réponse.
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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 06/02/2008
Réponse apportée en séance publique le 05/02/2008
M. le président. La parole est à M. Pierre Martin, auteur de la question n° 146, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Pierre Martin. Ma question concerne la mise en place du service minimum d'accueil, le SMA, à l'école primaire en cas de grève des enseignants.
Le SMA me paraît une bonne mesure, plébiscitée par l'opinion puisqu'elle suscite l'adhésion de 83 % des parents. Elle devait se concrétiser le 24 janvier dernier, journée au cours de laquelle il y a eu un peu plus de 34 % de grévistes.
À cette occasion, il était question non pas, bien évidemment, de remettre en cause le droit de grève, mais de mieux prendre en compte le droit au travail des parents. En cas de grève, en effet, les enfants reviennent à la maison et la liberté de travail des parents est mise en cause.
Concernant les jours de grève, monsieur le ministre, je sais que l'accueil est obligatoire au lycée et au collège, mais je n'en ai pas eu la confirmation pour l'école primaire. Je souhaiterais que vous puissiez nous le préciser, car il me semblait que l'accueil des enfants devait également y être prévu.
Par ailleurs, les journées de grève ont des conséquences indirectes sur les transports scolaires. À quoi servent-ils si les enfants restent chez eux ? Il faut savoir que, dans le département de la Somme, une journée de transport coûte 100 000 euros. Vous imaginez ce que cela représente à l'échelon de la France !
Concernant l'accueil dans les écoles primaires, il va de soi que les parents doivent être informés en cas de grève. Il arrive que l'information ne circule pas et que les parents ne sachent même pas si les enfants doivent ou non se rendre à l'école. Dans ce cas-là, ils appliquent en quelque sorte le principe de précaution et gardent les enfants. Comment gérer cette information ?
Les mairies ne sont pas informées de la participation des maîtres à une journée de grève. Comment, dans ces conditions, peuvent-elles organiser le SMA ?
Je voudrais en outre souligner que les possibilités d'accueil sont très différentes d'un endroit à l'autre. C'est la raison pour laquelle seules 10 % des communes ont expérimenté le système ; elles s'interrogeaient et elles s'inquiétaient.
Les situations sont très diverses : dans un groupe scolaire, tous les maîtres peuvent faire grève, une partie seulement, ou bien aucun...
Il y a surtout une disparité entre les milieux rural et urbain. Dans les villes, il existe des organisations qui accueillent les enfants le soir, pendant les vacances. Celles-ci disposent donc de locaux pour les CLSH, les centres de loisirs sans hébergement, c'est-à-dire pour les activités périscolaires. Il y a aussi des garderies, dont les communes rurales sont parfois dépourvues. Alors, comment faire ?
Faute de locaux pour accueillir les enfants, on ne peut se reporter que sur les locaux existants, c'est-à-dire les classes. Or ce n'est pas sans semer une certaine zizanie, puisque certains maîtres sont très opposés à la venue de quelqu'un d'autre dans leur classe, où tout est soigneusement rangé. Là aussi, c'est un véritable problème.
Concernant les regroupements pédagogiques intercommunaux, les RPI, et les regroupements pédagogiques concentrés, les RPC, il va de soi qu'il faut prévoir le repas de midi. Comment faire pour que les enfants soient accueillis au mieux si les fonctionnaires de la cantine font grève ?
Enfin, je voudrais aborder la question du transfert de compétences aux communautés de communes. Ce transfert peut être total, ou concerner uniquement le fonctionnement. Dans le cas d'un transfert partiel, il peut se produire un conflit entre la communauté de communes et la commune au sujet de l'utilisation des locaux de l'école dans le cadre du SMA.
Vous le voyez, monsieur le ministre, la mise en oeuvre du service minimum d'accueil pose un tas de problèmes ; j'espère que vous leur apportez une réponse.
Le dernier point que je souhaitais aborder, c'est la responsabilité des maires. Nombre d'entre eux se sont posé la question. En effet, il suffit qu'un but soit mal arrimé et, en cas d'accident, c'est le maire qui est responsable. On peut imaginer que, ces jours-là, se produisent des incidents ou des accidents : quelle sera alors la responsabilité du maire ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur Martin, vous êtes parfaitement habilité à nous interroger sur les écoles, puisque vous fûtes vous-même un brillant directeur d'école.
C'est l'occasion de rappeler l'intention du Gouvernement sur le service minimum d'accueil, mais aussi de répondre aux problèmes réels que vous avez posés, qui pourraient faire l'objet de contentieux si l'on n'y prenait pas garde.
D'abord, rappelons ce qu'est le service minimum d'accueil : c'est une nouvelle liberté que l'on donne aux familles, un nouveau droit, au fond, pour que, pendant l'exercice du droit de grève, que nous ne discutons pas, les usagers du service public ne soient pas pénalisés.
Le test qui a été effectué le 24 janvier dernier a surtout bénéficié aux familles les plus modestes : les familles monoparentales ou celles qui ne peuvent pas payer une nounou pour garder leurs enfants. Le service minimum d'accueil a donc bien un caractère de justice sociale.
Le dispositif a été expérimenté par 2 067 communes, ce qui représente près de 9 millions d'habitants, soit 30 % des villes de plus de 100 000 habitants. Dans votre département de la Somme, monsieur le sénateur, 49 communes l'ont mis en place.
Vous posez la question de l'obligation faite aux directeurs d'école d'accueillir les enfants en cas de grève. Cette obligation résultait d'une circulaire du 26 mars 1981. Je pourrais dire qu'il s'agit d'une « disposition martyre », puisque, en juin 1981, quelques mois après sa parution - vous vous souvenez sans doute qu'il s'est passé quelque chose à cette période (Sourires) -, la nouvelle majorité socialiste l'a abrogée.
Vous me demandez comment le maire pourrait être certain de la qualité des personnels qu'il emploie pour l'accueil des enfants. Je vous réponds : de la même manière qu'il s'assure de la qualité des animateurs de centre de loisirs ou des surveillants d'études que certaines communes embauchent pour s'occuper des enfants.
Le financement apporté par l'État, qui s'élève à 15 euros de l'heure pour un groupe de 10 à 15 élèves, permet à la commune de faire appel à du personnel compétent, puisqu'il sera bien rémunéré, soit à du personnel municipal, si elle le souhaite, soit à des agents spécialement recrutés à cette fin sous sa propre responsabilité.
Vous soulevez la question classique, mais pas toujours évidente, de la responsabilité des maires durant les heures d'accueil des enfants. Cette question se pose et se résout dans les mêmes termes que pour les locaux que les enfants fréquentent avant ou après la classe lorsque la commune organise un accueil hors temps scolaire. Il n'y a donc pas de différence, sauf que, en l'occurrence, la durée d'accueil est plus longue et qu'elle concerne plus de monde.
Enfin, vous souhaitez savoir, ce qui montre là aussi le spécialiste, qui de la communauté de communes ou de la commune responsable des locaux, surtout lorsqu'il y a des regroupements pédagogiques intercommunaux, est responsable en cas de divergence sur l'opportunité d'appliquer le service minimum d'accueil. Je vous répondrai que, lorsque les maires sont décidés à appliquer le SMA, ils sont autorisés à organiser cet accueil dans tout autre bâtiment de leur commune, donc dans des bâtiments qui ne dépendent pas de la communauté de communes ou d'un regroupement intercommunal quelconque.
Je crois avoir répondu aux quelques points litigieux que vous avez soulevés. Je le répète, le service minimum d'accueil a reçu une réponse très favorable de l'opinion : 72 % des électeurs souhaitent que leur maire le mette en place. Il est important de le rappeler, surtout en cette période ... (Sourires.)
Je pense que ce dispositif entrera dans les moeurs et aura vocation à se généraliser, mais il nous faudra rester vigilants et prendre les précautions que vous avez rappelées.
M. le président. La parole est à M. Pierre Martin.
M. Pierre Martin. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos réponses aux différents points que j'ai abordés. Je reste néanmoins sceptique en ce qui concerne la qualification des personnels.
Lorsqu'une commune organise des CLSH, c'est pendant les vacances. Le personnel est donc généralement composé d'étudiants, qui ne sont donc pas disponibles les jours de grève.
Si pour garder des enfants trois heures le matin et trois heures l'après-midi, le personnel n'a pas une certaine qualification, que deviendra cette garderie ? Car il ne s'agit pas de laisser tout simplement les enfants jouer dehors pendant cette journée !
C'est pourquoi, vous avez raison, il y a lieu de se pencher sur le sujet. De votre côté comme du nôtre, la réflexion conduira certainement à trouver les bonnes solutions afin que cet accueil permette la liberté de travail des parents.
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