Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOC) publiée le 25/01/2008
Question posée en séance publique le 24/01/2008
M. Jean-Marc Todeschini. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre qui, hélas ! est absent du Sénat, ce qui mérite d'être relevé, monsieur le président, à un moment où l'on prétend redonner toute sa place au Parlement ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Eh oui!
M. Yannick Bodin. Bravo !
M. Jean-Marc Todeschini. Mais Davos, c'est mieux !
L'industrie française va mal. En un an, notre pays a perdu plus de 42 000 emplois industriels et accumule un déficit du commerce extérieur de près de 40 milliards d'euros.
Je souligne que 11 % de ces 42 000 emplois perdus l'ont été en Lorraine, monsieur le président, votre région, une région qui ne représente pourtant que 3,7 % de la population française.
Les décisions des entreprises Michelin à Toul, Total Petrochemicals France à Carling, Ineos à Sarralbe en sont les exemples les plus emblématiques.
Au moment où je m'adresse au Premier ministre, au Grand-Duché de Luxembourg où il se rendra demain et qui est frontalier avec mon département, la Moselle, des centaines de salariés de la sidérurgie, accompagnés de parlementaires, de conseillers régionaux et généraux et de maires, manifestent devant le siège d'Arcelor-Mittal.
Ma question concerne le nouveau coup dur porté à l'industrie lorraine par la décision du géant mondial de l'acier de supprimer près de 600 emplois directs à Gandrange, donc d'envisager à moyen terme la fermeture de ce site.
M. Yannick Bodin. C'est scandaleux !
M. Jean-Marc Todeschini. Or l'actionnaire majoritaire, le milliardaire indien Mittal, percevra pour cette seule année des dividendes records s'élevant à plus de 637 millions d'euros.
En Lorraine, syndicats et élus sont unanimes : le site de Gandrange est viable et la sidérurgie a encore de l'avenir.
Garant des politiques de sauvegarde de l'emploi, le Gouvernement a aujourd'hui la responsabilité d'accompagner leur travail et d'assurer la cohérence avec les propos du Président de la République.
Lors de sa conférence de presse du 8 janvier dernier, le Président de la République a déclaré que, « face à la montée en puissance de fonds spéculatifs extrêmement agressifs et de fonds souverains qui n'obéissent pas seulement à des logiques économiques, il n'est pas question que la France reste sans réagir ». (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)
Il a également indiqué que « la France doit protéger ses entreprises, leur donner les moyens de se défendre et de se développer. [...] Une France sans industrie, sans usine, sans ouvrier serait une France appauvrie [...] Tout ne peut pas être abandonné à un capitalisme financier livré à lui-même ».
M. Alain Gournac. La question !
M. Jean-Marc Todeschini. Ce n'est pas un marxiste qui le dit, c'est le Président de la République ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Bel. Il fallait le dire !
M. Jean-Marc Todeschini. Nous refusons de nous contenter de ces belles paroles : il nous faut des actes !
M. Alain Gournac. La question !
M. Jean-Marc Todeschini. M. Novelli a affirmé que le Gouvernement exigerait du groupe Arcelor-Mittal un plan de revitalisation.
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Todeschini !
M. David Assouline. Mme la ministre a pris six minutes pour répondre !
M. Jean-Marc Todeschini. Cette réponse est inacceptable. Le Gouvernement baisse les bras, et donne le sentiment de condamner l'usine de Gandrange et d'abandonner toute l'économie d'un territoire !
M. le président. Posez votre question !
M. Jean-Marc Todeschini. Le site de Gandrange peut être sauvé, et, pour cela, nous avons besoin de temps afin de permettre aux organisations syndicales de présenter un contre-projet industriel et social. (La question ! sur les travées de l'UMP.)
Le Gouvernement accédera-t-il à la demande unanime des salariés et des élus d'exiger de M. Mittal le gel des décisions de suppressions d'emplois envisagées à Gandrange ?
M. Alain Gournac. Ah là, là, là, là !
M. Jean-Marc Todeschini. Ma seconde question porte sur la lettre que mon collègue Jean-Pierre Masseret, président du conseil régional de Lorraine, a adressée au Président de la République.
Le Gouvernement accompagnera-t-il le plan lorrain à l'emploi durable et le Grenelle de l'industrie que M. Masseret souhaite mettre rapidement en place afin de rétablir la Lorraine dans son rôle de grande région industrielle ?
M. le président. Veuillez terminer ! Vous dépassez votre temps de parole !
M. Jean-Marc Todeschini. Cet accompagnement pourrait se traduire en partie par des dispositifs de type « zone franche ».
La solidarité nationale doit aujourd'hui s'exercer au bénéfice de la Lorraine. Le Gouvernement prend-il cet engagement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'emploi publiée le 25/01/2008
Réponse apportée en séance publique le 24/01/2008
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur le sénateur, ...
M. Yannick Bodin. Je me réjouis...
Mme Christine Lagarde, ministre. ... je répondrai très précisément à votre question, mais je voudrais, en préambule, vous indiquer que la différence entre vous et moi est que vous vous concentrez sur les pertes d'emplois alors que je me concentre à la fois sur les créations et sur les pertes d'emplois. Il faut en effet tenir compte de ces deux aspects de notre économie ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Annie David. Quelles créations d'emplois ?
M. Yannick Bodin. Allez le dire en Lorraine !
M. David Assouline. Elle a tout faux, ça commence mal !
Mme Christine Lagarde, ministre. C'est la raison pour laquelle j'ai mentionné tout à l'heure que notre économie a créé 312 000 emplois en 2007, et que plus de 321 000 nouvelles entreprises ont été créées en 2007.
Mme Évelyne Didier. En Lorraine ?
Mme Christine Lagarde, ministre. J'en viens maintenant à votre question, monsieur Jean-Marc Todeschini, en particulier à la situation d'Arcelor-Mittal et au site de Gandrange.
Nous n'avons pas attendu et nous ne faisons pas dans l'incantatoire ! Pas plus tard qu'en début de semaine prochaine, le Président de la République recevra personnellement M. Lakshmi Mittal, figure emblématique de ce groupe,...
M. Bernard Frimat. Hou là, là !
M. Jean-Pierre Michel. On s'attend au pire !
Mme Christine Lagarde, ministre. ... qui a, rappelons-le, racheté pour un franc symbolique en 1999 un site dont personne ne voulait, dans lequel il a investi et où il a maintenu, de 1999 à 2008, soit en un peu moins de dix ans, de très nombreux emplois.
En ce qui concerne notre relation avec le groupe Mittal, vous savez que le sujet des emplois a été débattu longuement, en particulier au moment de la reprise d'Arcelor. Nous avons demandé au groupe Arcelor-Mittal de s'engager à créer plus de 2 000 emplois. Il s'agissait d'un plan sur 2007-2008, et 45 % des engagements ont été tenus à ce jour.
L'intégralité des engagements pris quant aux créations d'emplois sera tenue par le groupe. Nous surveillons très attentivement ce dernier et sommes en dialogue permanent avec lui.
Je vous ferai enfin observer au passage que le groupe s'est engagé à reclasser l'intégralité du personnel.
M. David Assouline. On connaît ça !
Mme Christine Lagarde, ministre. Un engagement est un engagement, et la France veillera à ce qu'il soit tenu ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.)
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