Question de M. LECERF Jean-René (Nord - UMP) publiée le 19/10/2006
M. Jean-René Lecerf souhaiterait attirer l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement à propos de certaines difficultés d'application du plan de cohésion sociale dans le cadre de la résorption de l'habitat indigne. Le recours à la dérogation qui permet aux caisses d'allocations familiales de maintenir l'allocation logement en la versant directement au locataire et non plus au propriétaire en tiers payant, lorsque la non-décence d'un logement est constatée, peut soulever certains problèmes. En effet, cette mesure a pour objet de contraindre le propriétaire à effectuer des travaux de mise en conformité. Cependant, elle induit parfois chez le locataire la tentation d'affecter l'aide au logement à d'autres dépenses. Par conséquent, il le remercie de bien vouloir lui préciser si des aménagements au dispositif actuel pouvaient être envisagés qui pourraient notamment permettre aux caisses d'allocations familiales de recourir à une mesure conservatoire consistant, dans un premier temps, à surseoir au versement de l'allocation logement à titre de sanction pour le propriétaire et d'acte préventif pour le locataire et, dans un second temps, à verser l'allocation logement au fur et à mesure de la réalisation des travaux par le propriétaire.
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Réponse du Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement publiée le 21/12/2006
Les articles L. 542-2 et L. 831-3 du code de la sécurité sociale subordonnent le droit aux allocations de logement à la décence du logement. En cas de non-décence, la loi prévoit que le versement de l'aide est maintenu dès lors que le locataire peut justifier qu'il a engagé une démarche amiable ou contentieuse auprès de son bailleur, afin d'obtenir une mise aux normes du logement. Dans les cas où l'aide est versée entre les mains du bailleur, le versement en tiers-payant est alors suspendu et l'allocation de logement est remise directement au locataire. La proposition de l'Association départementale des caisses d'allocations familiales (ADÉCAF) du Nord qui consiste à surseoir au versement de l'allocation de logement, « à titre de sanction pour le propriétaire » et « d'acte préventif pour le locataire », afin de la verser ensuite au fur et à mesure de la réalisation des travaux de mise en conformité par le propriétaire, ne peut se concevoir que dans l'hypothèse où le locataire serait préalablement exonéré du paiement de l'échéance mensuelle du loyer. Sinon, le locataire risquerait de ne pouvoir assumer son obligation de règlement du loyer au propriétaire et s'exposerait même à l'éventualité d'une procédure d'expulsion pour défaut de paiement du loyer. La législation applicable en matière de décence est, en effet, différente de celle qui existe en matière d'insalubrité. Lorsque le logement est insalubre, le paiement du loyer n'est plus exigible ; lorsque le logement est considéré comme indécent, l'autorisation de non-paiement du loyer ne peut être décidée que par le juge. A cet égard, je tiens à souligner l'avancée importante permise par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (ENL), qui a précisément renforcé le dispositif juridique de protection du locataire en cas de contentieux portant sur la décence du logement. L'article 86 de la loi ENL étend les compétences des commissions départementales de conciliation aux litiges concernant la décence. Ces commissions, créées auprès du préfet depuis la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, offrent déjà aux bailleurs et aux locataires la possibilité de se rencontrer en vue de rechercher à l'amiable une solution à leurs différends en matière de loyers, d'état des lieux, de dépôt de garantie, de charges locatives et de réparations. Pour les litiges portant sur la décence, la saisine de la commission pourra se révéler ensuite un préalable utile au locataire lorsque le juge sera saisi. Surtout, cet article 86 prévoit expressément que le juge pourra dorénavant suspendre le versement des loyers et la durée du bail dès qu'il constatera l'indécence du logement et ce jusqu'à l'exécution des travaux nécessaires par le propriétaire. En conséquence, dès lors que le bail sera interrompu par le juge et que le locataire ne sera provisoirement plus tenu d'honorer son loyer, le versement de l'allocation de logement sera lui aussi automatiquement suspendu aussi longtemps que les travaux imposés au propriétaire ne seront pas accomplis. Mais si le loyer reste exigible, en totalité ou en partie seulement selon la décision du juge, le versement de l'aide entre les mains du locataire devra être maintenu, afin de ne pas le pénaliser. Le niveau de l'allocation de logement, dans ce dernier cas, s'ajustera évidemment au montant du loyer exigible fixé par le juge pendant la période d'accomplissement des travaux.
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