Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-R) publiée le 30/06/2006
Question posée en séance publique le 29/06/2006
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne l'amiante.
Au moment où les médias se font l'écho des conflits politiciens et des scandales économiques, l'opinion publique rappelle le Gouvernement à ses devoirs et lui demande de se remobiliser sur l'intérêt général.
Hier, la méconnaissance ou la complaisance de certains acteurs économiques, politiques, scientifiques, ont provoqué le drame de l'amiante. Certains ont su prendre leurs responsabilités, mais des victimes peinent encore à faire valoir leurs droits. En effet, des entreprises refusent de leur délivrer le certificat d'exposition inscrit dans la loi. Qu'allez-vous faire, monsieur le Premier ministre ?
Je tiens également à vous alerter sur les contaminations à venir, car les risques demeurent : les fibres céramiques réfractaires ne sont toujours pas interdites ; les diagnostics coûteux ont un effet d'aubaine, mais ils ne sont pas encadrés ; la norme NF X 46-020 homologuée en 2002 n'a pas été rendue obligatoire par un arrêté ; le dossier technique amiante, le DTA, ne comporte ni plans ni mémoire du bâti.
De nombreux lieux publics, parmi lesquels un nombre significatif d'hôpitaux, restent contaminés et mal repérés : 56 % des chefs d'établissement n'ont pas rempli la grille d'évaluation sur l'état de dégradation, 20 % n'ont pas renseigné la surface concernée, 8 % n'ont pas répondu à l'enquête du mois de mars 2005.
Sur les chantiers de désamiantage travaillent 100 000 salariés : ils sont mal recensés, parfois non formés, voire non suivis. La pénibilité fait que le port des protections individuelles ne devrait pas excéder deux heures trente.
Par ailleurs, 76 % des chantiers seraient en infraction selon la direction des relations du travail, la DRT, l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, I'INRS, et la Caisse nationale d'assurance maladie.
Le transport des déchets voit « disparaître » des tonnages considérables avant traitement : 2 000 euros la tonne ; 300 euros la tonne si elle est enfouie, ce qui est contraire aux normes européennes.
Enfin, les particuliers et même les petites et moyennes entreprises sont mal informés du risque de destruction des toitures en fibrociment ou des interventions dans des restes de flocage ou calorifugeage.
Les collectivités engagent des dépenses. Elles veulent que les résultats soient probants et les risques totalement éradiqués.
Monsieur le Premier ministre, quelles mesures concrètes allez-vous prendre pour éviter toutes les contaminations à venir ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
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Réponse du Ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes publiée le 30/06/2006
Réponse apportée en séance publique le 29/06/2006
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Madame le sénateur, sur l'amiante, le Sénat a apporté une contribution tout à fait exceptionnelle, par le biais de sa mission commune d'information présidée par Jean-Marie Vanlerenberghe - à laquelle vous avez participé - et grâce au rapport de Gérard Dériot.
J'ai récemment eu l'occasion d'être entendu par la commission des affaires sociales sur ce sujet. L'amiante est un drame sanitaire, que nous connaissons tous. Personnellement, mes origines, entre Condé-sur-Noireau et Flers-de-l'Orne, font que je le connais d'assez près.
Sur cette question, le Gouvernement ne s'est pas montré moins vigilant, bien au contraire.
Madame le sénateur, je vous répondrai très précisément en rappelant que, le 5 juin dernier, au cours de la conférence de l'Organisation internationale du travail, l'OIT, la France a, par ma voix et sous l'autorité du Premier ministre, demandé l'interdiction mondiale de l'amiante.
Cette interdiction n'était pas prévue dans les projets de résolution de la conférence annuelle de l'OIT, résolution qui a été adoptée le 14 juin dernier.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En effet, sur les 178 pays membres de l'OIT, seuls 40, parmi lesquels figurent les 25 États de l'Union européenne, ont interdit l'utilisation de l'amiante sur leur territoire.
Quelles mesures concrètes le Gouvernement a-t-il pris ?
Tout d'abord, le Conseil d'État nous a demandé de créer une agence indépendante, l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale et du travail, l'AFSSET, ce que nous avons fait. En deux ans, 15 millions d'euros lui ont déjà été consacrés.
Par ailleurs, les moyens de contrôle et d'expertise ont également été renforcés grâce à la mise en place dans quinze régions, ce qui est une première étape, de cellules pluridisciplinaires destinées à aider l'inspection du travail à mener sa mission.
Nous sommes ainsi passés de 74 contrôles effectués en 2004 à 780 en 2005 et nous mènerons, au cours du second semestre, des opérations « coup de poing » dans l'ensemble des pays de l'Union européenne.
Nous allons même encore plus loin. Ainsi, dans quelques jours, paraîtra au Journal officiel un décret fixant, en matière d'amiante non friable, des conditions strictes d'homologation et de protection des travailleurs, notamment ceux du bâtiment. Nous n'oublions pas en effet qu'il y a tous les ans des décès - 800 par mésothéliome, 2 200 par cancer pulmonaire - dus à l'amiante.
Une circulaire interministérielle visant à repérer tous les bâtiments sensibles a également été signée le 14 juin dernier avec Xavier Bertrand et Jean-Louis Borloo. La liste exhaustive de ces sites sera connue au mois de juillet prochain.
Aujourd'hui, en matière d'amiante, je peux vous garantir que les problèmes qui se posent sont plutôt de l'ordre de la réparation. À la suite des rapports respectifs rendus par l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, le Sénat et l'Assemblée nationale, le Gouvernement est extrêmement vigilants s'agissant de ce sujet majeur, notamment sur l'utilisation des fibres céramiques, de formaldéhyde et des glycols.
Madame le sénateur, j'annoncerai dans quelques mois les décisions que nous allons prendre. Nous ne baisserons pas la garde, car la santé au travail est un droit pour chacun ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Bravo !
M. Didier Boulaud. Voilà un ministre qui répond aux questions ! S'ils pouvaient tous être comme lui !
M. Bernard Piras. C'est le seul qui réponde aux questions !
M. Didier Boulaud. Parce qu'il a été élu lui-même!
M. le président. Si vous voulez faire des compliments au ministre, envoyez-lui un mot !
M. Bernard Saugey. Il le mérite !
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