Question de M. VIRAPOULLÉ Jean-Paul (La Réunion - UMP) publiée le 27/04/2006
M. Jean-Paul Virapoullé appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les négociations du « cycle de DOHA » au sein de l'OMC. En effet, ces négociations ont pour objectif, à chaque fois, de libéraliser le commerce international en faisant chuter le niveau de protection douanière ainsi que les quotas des pays membres. Or, à ce jour, non seulement, il apparaît que l'arsenal douanier des pays dits « émergents », déjà dopés par un bas coût salarial, n'a pas disparu, mais il n'existe pas d'indicateurs fiables quant aux pratiques protectionnistes dites « déguisées » : sous-évaluations monétaires, dumping, contrefaçons, transferts obligatoires de technologie, marchés protégés, travail illégal des enfants ou de prisonniers, non respect de l'environnement
L'Europe, quant à elle, en respectant ces obligations, supporte un surcoût important qui pèse sur ses exportations.
Il l'interroge donc sur l'opportunité de la création d'un indicateur du respect des règles du commerce international, qui, sur le modèle des agences de notation, éclairerait les pouvoirs publics durant les négociations internationales. Cet indicateur pourrait être mis en place par une agence publique chargée d'analyser le commerce international.
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Réponse du Ministère délégué aux anciens combattants publiée le 31/05/2006
Réponse apportée en séance publique le 30/05/2006
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, auteur de la question n° 1035, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-Paul Virapoullé. Monsieur le ministre, il y a un an, les Français disaient « non » à la Constitution européenne. Ce vote a provoqué deux réactions. Certains ont voulu culpabiliser les Français ; d'autres, comme moi, qui ont voté « oui », ont plutôt cherché à comprendre pourquoi 54 % d'entre eux avaient rejeté une Constitution qui mettait en place une économie sociale de marché et qui était un embryon de pouvoir politique pour l'Europe.
Un sondage publié récemment montre que 74 % des Français sont inquiets des conditions dans lesquelles s'effectuent le démantèlement de nos tarifs douaniers et de nos quotas de production, les échanges libéraux entre l'Europe et le reste du monde. Je fais partie de ces Français !
En mettant en place le cycle de Doha, on a progressivement déréglementé nos barrières douanières et mis en compétition frontale des pays dits émergents avec des économies possédant des règles, un modèle social et un certain niveau de vie. Aujourd'hui, nous constatons que ces pays dits émergents sont devenus des puissances « submergentes ».
Qui peut aujourd'hui nier que la monnaie, qui est l'un des moyens essentiels des échanges, n'est pas soumise partout aux mêmes règles ?
Qui peut aujourd'hui nier que la Chine est le premier atelier du monde de la contrefaçon, qui porte atteinte à nos PME, alors que ce n'est pas le cas en Europe ?
Qui peut nier que l'existence d'un code du travail dans les pays dits développés et son refus dans d'autres pays placent notre classe sociale la plus laborieuse dans des conditions difficiles ?
Mon but est non pas de remettre en cause la mondialisation, mais de faire un examen de la situation et, à l'instar du médecin, vérifier la tension du malade, prendre sa température, etc.
Dans le domaine des échanges, cette mondialisation, qui a consisté à placer entre les mains de technocrates le pouvoir politique qui appartient aux élus, aboutit à un divorce entre le pouvoir démocratique et le pouvoir technocratique. Je demande donc que soient mis en place des indicateurs afin de mesurer le respect des règles fixées par l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.
Tout le monde ne respecte pas ces règles et ne fait pas preuve de la même loyauté. Dès lors, des couches de misère apparaissent, des divorces entre des gouvernements démocratiques et leur peuple se font jour, et nous nous retrouvons dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.
Je suis favorable à la libéralisation de l'économie, mais pas dans n'importe quelle condition ni sans en mesurer les conséquences ou sans respecter les règles fixées par l'OMC. Tel est l'objet de ma question.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Mme Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, qui n'a pas pu être présente ce matin pour répondre directement à votre question. Je vais donc vous communiquer sa réponse.
La libéralisation du commerce international et l'émergence de pays en développement de plus en plus compétitifs ont renforcé le besoin d'un cadre de concurrence loyale.
Le Gouvernement comprend donc votre souhait de pouvoir disposer d'un indicateur synthétique permettant de noter les comportements des uns et des autres. Votre proposition rejoint notre volonté de tout faire pour garantir le respect des règles de l'OMC par nos partenaires.
Il convient tout d'abord de rappeler que les membres de l'OMC disposent d'outils efficaces pour examiner le respect de ces règles par tous. Chaque membre de l'OMC est soumis à une « revue » par ses pairs. Il faut renforcer ce processus de surveillance multilatérale, en particulier concernant les grands pays émergents. En cas de non-respect des règles de l'OMC, les États membres qui s'estiment lésés peuvent avoir recours à l'organe de règlement des différends.
Toutefois, la situation est plus complexe pour les domaines qui ne relèvent pas des règles de l'OMC, notamment pour certaines normes sociales et environnementales ainsi que pour les taux de change. Comme vous le savez, les discussions sur les normes sociales ont été exclues de l'agenda de négociation du cycle de Doha.
Par ailleurs, les négociations à l'OMC sur le lien entre l'environnement et le commerce sont très limitées, en raison tant des réticences des pays en développement que des organisations non gouvernementales.
J'indique cependant que les pays développés ont le pouvoir, dans le cadre des préférences commerciales unilatérales qu'ils accordent aux pays en développement, de privilégier les pays respectant un certain nombre de critères objectifs annoncés à l'avance.
Enfin, le Gouvernement mène régulièrement des enquêtes, par l'intermédiaire des missions économiques à l'étranger, sur les difficultés que les entreprises françaises rencontrent dans l'accès à des marchés tiers.
Il suit attentivement ce dossier et agit dans les enceintes compétentes, en collaboration avec la Commission européenne. Il participe aussi à la lutte contre la contrefaçon, car c'est un fléau qu'il faut combattre.
Au-delà de ces considérations, ce débat doit se poursuivre. Le Gouvernement, en particulier ma collègue Christine Lagarde, reste à l'écoute des travaux du groupe de travail parlementaire sur la mondialisation, que vous animez.
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