Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 23/03/2006
M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre délégué aux collectivités territoriales sur le fait qu'il est précisé à l'article L. 2122-22 (4°) du code général des collectivités territoriales (CGCT) que « le maire peut (...), par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (4°) de prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être passés sans formalités préalables en raison de leur montant, lorsque les crédits sont inscrits au budget ». En outre, l'article L. 2131-2 du CGCT précise que sont soumises à l'obligation de transmission au représentant de l'Etat « (1°) les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 ». Une transmission qui, conformément aux dispositions de l'article L. 2131-1 du CGCT, permet à ces délibérations et décisions d'acquérir leur caractère exécutoire. Par ailleurs, depuis l'adoption en décembre 2001 de la loi « MURCEF », l'article L. 2131-2 4° du CGCT prévoit que sont soumises à cette obligation de transmission « (4°) les conventions relatives aux marchés à l'exception des marchés passés sans formalités préalables en raison de leur montant ». Dès lors, la question s'est posée de savoir si, compte tenu du fait que les « marchés passés sans formalités préalables en raison de leur montant » ne sont pas transmissibles, les décisions du maire prises par délégation du conseil municipal, concernant ces marchés, sont elles-mêmes exemptes de transmission. Réitérée à plusieurs reprises, il a été répondu à cette question que « les décisions prises par l'exécutif d'une collectivité locale pour la passation d'un marché dispensé de formalités préalables en raison de son montant ne sont pas soumises à l'obligation de transmission au préfet au titre du contrôle de légalité » (Réponse ministérielle, 22 décembre 2003, JOAN, p. 9838, n° 19237). Toutefois, dans une réponse récente, il est indiqué que « si la préfecture ne peut pas exiger la transmission des marchés publics passés par les collectivités selon la procédure adaptée, il n'en demeure pas moins que, aux termes des articles L. 2131-2, L. 3131-1 et L. 4141-2 du code général des collectivités locales, les délibérations de l'assemblée délibérante ou les décisions prises par délégation de celles-ci afférentes à des marchés inférieurs au seuil de 230 000 euros (HT) (marchés passés sans formalités préalables en raison de leur montant) demeurent soumises à l'obligation de transmission au titre du contrôle de légalité » (Réponse ministérielle, 8 novembre 2005, JOAN, p. 10372, n° 64592). Dans ce cadre, le Conseil d'Etat a déjà été amené à considérer que, dès lors qu'il contient une décision du maire prise par délégation du conseil municipal en vertu de l'article L. 2122-22 du CGCT, un contrat, non transmissible en lui-même, est soumis à l'obligation de transmission en tant qu'il contient la décision de le signer, matérialisée par sa signature (CE, 30 janvier 1987, commissaire de la République d'Ille-et-Vilaine contre commune de Rheu, n° 70777, publié au Recueil Lebon - contrat de location immobilière). Dans une affaire soumise au Conseil d'Etat concernant la ville de Dunkerque, le commissaire du Gouvernement conclut que « lorsque, comme en l'espèce, le maire prend lui-même la décision de signer, en vertu d'une habilitation réglementaire permanente octroyée par le conseil municipal, il n'est pas possible de distinguer deux actes successifs dans sa décision, et d'exiger de lui qu'il transmette d'abord au représentant de l'Etat une décision qui précéderait la signature effective. Sa décision est une, elle est matérialisée par la signature, et elle est entièrement transmise au préfet par l'effet de la transmission du marché lui-même » (CE, 29 avril 2002, ville de Dunkerque, n° 235708, conclusions du commissaire du Gouvernement). Ce qui explique que, dans son arrêt, réglant au fond cette affaire, le Conseil d'Etat précise qu'« aucune règle n'impose (...) que la décision de signer le contrat soit elle-même transmise au représentant de l'Etat avant sa signature » dès lors que la décision est matérialisée par la signature. Ainsi, comme le demandait le député dans sa question précitée, il semble opportun que des instructions soient données aux préfets de telle sorte qu'ils reçoivent, de manière uniforme, ces décisions pour les rendre exécutoires. Et, en particulier, qu'ils accusent réception des conventions de marchés passés sans formalités préalables en raison de leur montant dès lors que ceux-ci, non transmissibles en eux-mêmes, contiennent la décision de les passer formalisée par leur signature (CE, 29 avril 2002, ville de Dunkerque, n° 235708). Il lui demande donc si des instructions seront données dans ce sens.
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Réponse du Ministère délégué aux collectivités territoriales publiée le 25/05/2006
La position du ministère de l'intérieur sur le caractère transmissible de la décision prise par l'exécutif local relative à la signature d'un marché public lorsque celui-ci a reçu délégation pour signer certains types de marchés a été établie dans une réponse publiée le 3 mars 2003 à une question écrite posée par le député Richard Dell'Agnola (QE/AN n° 7269). Il ressort de cette réponse que en application de l'article L. 2131-2-1° du code général des collectivités territoriales, les décisions prises dans le cadre des délégations susceptibles d'être consenties à l'exécutif local en application de l'article L. 2122-22 sont soumises à l'obligation de transmission au titre du contrôle de légalité pour être exécutoires. Ce principe étant rappelé, il convient d'observer que la forme que doivent revêtir ces décisions n'est pas précisée. Ainsi, l'exécutif local n'est pas tenu de prendre une décision formelle distincte de l'acte qu'il se propose d'adopter. S'agissant d'un marché, la décision peut consister en la signature apposée sur le contrat lui-même. Or, en application de l'article L. 2131-2-4°, les contrats relatifs aux marchés passés sans formalité préalable en raison de leur montant sont exonérés de l'obligation de transmission au titre du contrôle de légalité. L'interprétation de l'article L. 2131-1-1°, qui conduirait à considérer que, dans l'hypothèse où la décision consiste en la signature apposée sur le contrat, il y a lieu de transmettre le contrat au titre du contrôle de légalité, priverait d'effet la dérogation introduite par la loi MURCEF de 2001 au 4° de l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales. C'est la raison pour laquelle il y a lieu de considérer que lorsque la décision de signer le marché n'est pas distincte formellement de la signature proprement dite du marché, l'article L. 2131-1-1° n'a pas lieu de s'appliquer. Les solutions dégagées par les jurisprudences citées par l'honorable parlementaire (CE, 30 janvier 1987, commissaire de la République d'Ille-et-Vilaine contre commune de Rheu ; CE, 29 avril 2002, Ville de Dunkerque), outre qu'elles sont relatives soit à des contrats autres que des marchés publics (contrat de location dans la jurisprudence commune de Rheu), soit à la situation antérieure à la loi MURCEF (décision en date du 7 avril 1998), ne sauraient s'appliquer aujourd'hui. Enfin, la réponse apportée le 8 novembre 2005 à la question écrite posée par Mme Martine David, députée (QE/AN 64592), ne saurait être comprise comme remettant en cause la position du ministère, constante depuis 2003. En effet, celle-ci vaut pour les décisions consistant en un acte formalisé distinct de la signature du marché pris en application de l'article L. 2122-22. Une information des services chargés du contrôle de légalité sur ce sujet est assurée via la mise en ligne sur l'intranet de la direction générale des collectivités locales d'une note reprenant les éléments développés ci-dessus.
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