Question de M. del PICCHIA Robert (Français établis hors de France - UMP) publiée le 30/03/2006

M. Robert Del Picchia interroge M. le ministre des affaires étrangères sur la mise en œuvre de la loi n° 2003-277 du 28 mars 2003 tendant à autoriser le vote par correspondance électronique pour l'élection des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger. L'adoption de cette loi à l'unanimité du Parlement a été une avancée démocratique essentielle pour les Français établis hors de France. Les élections des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger de juin prochain sont l'occasion d'une expérimentation en « vraie grandeur », puisque 480 000 électeurs se sont vus offrir la possibilité de voter par Internet pour élire les représentants de la zone Europe, Asie et Levant. La mise en place de ce scrutin numérique a été entourée de multiples mesures de sécurité par le département. Si les élus des Français de l'étranger se félicitent de cette prudence, ils s'inquiètent de la complexité du déroulement du scrutin numérique et notamment des phases préparatoires d'inscriptions et validations diverses que doivent « franchir » les électeurs. Il s'inquiète des délais très courts pour l'envoi des courriers informant les électeurs, lesquels risquent de ne pas avoir le temps de s'inscrire avant la date limite, ce qui ne manquera pas d'avoir des conséquences graves sur la participation. Dans la mesure où cette expérimentation est une première mondiale en matière d'élection politique, la communication et les explications qui doivent être dispensées aux électeurs jouent un rôle primordial. Il l'interroge sur la campagne de communication mise en place en amont du scrutin numérique et sur la visibilité de ces explications appelées à guider les « e-électeurs », et plus particulièrement ceux qui vivent loin des postes consulaires.

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Réponse du Ministère délégué aux affaires européennes publiée le 12/04/2006

Réponse apportée en séance publique le 11/04/2006

M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia, auteur de la question n° 1010, adressée à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Robert Del Picchia. Madame la ministre, je souhaite alerter le ministère des affaires étrangères sur la mise en oeuvre de la loi du 28 mars 2003 tendant à autoriser le vote par correspondance électronique des Français établis hors de France pour les élections des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, l'AFE.

Je ferai tout d'abord observer que le vote des Français de l'étranger pourrait être important pour la prochaine élection présidentielle. Voyez ce qu'il se passe en Italie,...

M. Richard Yung. Eh oui !

M. Robert Del Picchia. ...où le résultat de l'élection dépend du résultat du vote des Italiens de l'étranger !

Les élections des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger de juin prochain seront l'occasion d'une expérimentation en « grandeur nature » du vote par Internet. Près de 500 000 électeurs se sont vu offrir cette possibilité pour élire les représentants de la zone Europe, Asie et Levant.

La mise en place de ce scrutin numérique a été entourée de nombreuses mesures de sécurité ; c'est une bonne chose. Si les élus des Français de l'étranger se félicitent de cette prudence, ils s'inquiètent toutefois de la complexité du déroulement du scrutin numérique, notamment des phases d'inscription et de validations diverses que doivent « franchir » les électeurs.

Madame la ministre, je partage les inquiétudes des élus à l'AFE, qui estiment que les délais sont trop courts, que l'information est assez lacunaire et que les moyens humains et matériels sont relativement insuffisants.

En effet, cette élection, organisée sur trois continents, couvre une douzaine de fuseaux horaires, avec deux modes de scrutin différents et trois façons possibles de voter. Les opérations préélectorales se dérouleront sur deux mois seulement : les électeurs qui souhaitent voter par Internet peuvent répondre depuis hier à une lettre, laquelle apparemment, d'après ce que l'on m'a dit, n'est pas encore arrivée.

Les postes consulaires auront quelques jours pour envoyer le matériel de vote, avec lequel les électeurs devront ensuite s'authentifier et dont ils devront vérifier la compatibilité avec leur ordinateur, avant de pouvoir enfin voter.

Ils disposeront ainsi de sept jours pour revenir sur le site, choisir leur candidat ou leur liste, confirmer leur choix, s'identifier, confirmer de nouveau cette identification en indiquant leur date de naissance et finalement voter. Comme vous le voyez, c'est relativement compliqué.

Madame la ministre, qui va donc réussir à voter par Internet ? En outre, il est fort probable que certains courriers envoyés par voie postale arriveront trop tard, notamment en Afrique ou en Italie. Bref, le déroulement du scrutin numérique sera dissuasif pour un grand nombre d'électeurs.

C'est la première fois que l'on votera par Internet. Pour beaucoup, toutes ces étapes semblent compliquées. L'effort de pédagogie et de communication devrait être en proportion de l'événement et de la difficulté. Il semble pour l'instant que la seule campagne d'information se fera par voie d'affichage dans les ambassades et consulats. Or on ne parcourt pas trois cents kilomètres pour aller consulter une affiche dans un consulat. Pourtant, le vote par Internet devrait bénéficier avant tout aux électeurs qui sont le plus éloignés. Le système ne semble donc pas très efficace.

Madame la ministre, y aura-t-il des mesures d'information complémentaires ?

Enfin, certains postes ont fait état de difficultés matérielles. L'envoi des différents courriers électoraux requiert des mains qui ne sont pas disponibles. Les moyens financiers paraissent insuffisants, malgré l'allocation d'une enveloppe budgétaire importante pour le vote par Internet.

Madame la ministre, ne peut-on concevoir que les divers personnels en poste dans les consulats participent à l'envoi des courriers électoraux et, plus généralement, à la bonne organisation du scrutin ? Une gestion souple et flexible du personnel diplomatique me semble indispensable en période électorale, étant donné les difficultés que pose le recrutement de certains vacataires.

Madame la ministre, le vote par Internet est important. C'est une répétition générale pour la présidentielle de 2007. Il faut donc que les prochaines élections soient exemplaires. Aussi, il est nécessaire d'insister sur l'information à destination des électeurs, dont c'est le premier scrutin dans les centres de vote à l'étranger, et les familiariser avec cette façon de voter.

Madame la ministre, je partage pleinement les inquiétudes des élus des Français de l'étranger. Je regrette la façon dont ce texte, pour l'adoption duquel je me suis battu, est mis en oeuvre. Il serait dommage que la participation ne profite pas de ce nouveau moyen de vote. Pouvez-vous nous rassurer ce matin ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur Del Picchia, le vote électronique pour l'élection de l'Assemblée des Français de l'étranger du 18 juin 2006 est conforme aux recommandations formulées par la Commission nationale de l'informatique et des libertés dans sa délibération de juillet 2003, recommandation adoptée à la suite de l'expérience du vote électronique réalisée dans deux circonscriptions américaines en juin 2003. Le dispositif actuel lui a été soumis, et le décret du 13 mars 2006, qui en constitue le support juridique, a été examiné par le Conseil d'État.

L'authentification des électeurs est assurée par divers identifiants et mots de passe. La sécurité de ce mode d'identification repose sur la fourniture combinée de plusieurs éléments ainsi que sur leur acheminement vers les électeurs en plusieurs envois et par différentes voies.

Pour permettre l'acheminement de ces éléments, il est nécessaire d'établir auparavant une liste des électeurs désirant voter par voie électronique. C'est pourquoi, lors d'une première phase qui a débuté le 10 avril et qui se terminera le 25 avril, les électeurs intéressés doivent faire savoir s'ils choisissent de voter par voie électronique.

Une deuxième phase de validation, du 30 mai au 6 juin 2006, permettra de parer une éventuelle interception du courrier contenant l'identifiant et le code secret adressés à chaque électeur. Cette étape permettra également de vérifier la compatibilité du terminal informatique que l'électeur utilisera pour voter.

Ces différents éléments d'authentification seront ensuite utilisés durant la phase de vote proprement dite, ce qui répondra à la préoccupation du ministère des affaires étrangères d'entourer cette opération de toutes les garanties et d'organiser ce vote en toute sécurité.

La rigueur du calendrier s'ajoute à ces contraintes techniques. En effet, ce n'est qu'après le 31 mars 2006, date d'arrêt des listes électorales consulaires par la commission électorale siégeant au ministère des affaires étrangères, que les lettres informant les électeurs de la procédure à suivre ont pu leur être adressées.

Pour faciliter le travail des ambassades et des postes consulaires concernés, ces lettres ont été imprimées en France et adressées dès le 31 mars 2006 aux postes comptant plus de 10 000 électeurs inscrits. Les autres postes ont reçu, à cette même date, les possibilités d'effectuer eux-mêmes cette impression.

Le ministère des affaires étrangères a tout mis en oeuvre, vous en conviendrez, monsieur le sénateur, pour envoyer ces lettres au plus tôt, dès l'arrêt des listes électorales, et pour permettre aux électeurs qui le désirent de se prononcer par voie électronique, conformément à l'annonce qui a été faite à la session de mars 2006 de l'Assemblée des Français de l'étranger.

Mais ce n'est pas le seul moyen d'information que le ministère des affaires étrangères a retenu. Outre ce courrier adressé à tous les électeurs, les postes diplomatiques ont lancé une campagne d'information sur la tenue des élections et sur la possibilité de voter par Internet. Des affiches ont également été mises à leur disposition. Une information spécifique au vote électronique a été mise en ligne sur France-diplomatie - site bien connu de nos compatriotes à l'étranger - et la plupart des postes diplomatiques ont fait de même sur leur propre site.

Une « animation flash » décrivant le processus même du vote électronique sera prochainement mise en ligne sur le site du ministère des affaires étrangères. La presse a également été informée, lors de la présentation du dispositif faite par le prestataire retenu, en marge de la réunion de l'assemblée plénière de l'Assemblée des Français de l'étranger, au début du mois de mars. Enfin, une émission a été consacrée à ce sujet sur Radio France Internationale.

Ainsi, comme vous le voyez, monsieur Del Picchia, le ministère des affaires étrangères n'a pas ménagé ses efforts, du point de vue tant de la sécurité du vote que de l'information des électeurs, pour que cette élection numérique puisse se dérouler dans les meilleures conditions.

J'espère que ces éléments de réponse apaiseront vos inquiétudes.

M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia.

M. Robert Del Picchia. Je remercie Mme la ministre de ces précisions, qui sont de nature à rassurer non seulement les sénateurs représentants les Français de l'étranger, mais aussi, et surtout, les électeurs et les candidats sur le terrain.

Vous me dites que tout est en place. Malheureusement, d'après les informations dont je dispose, ce n'est pas encore le cas partout. Or, comme vous l'avez dit, le délai jusqu'au 25 avril est relativement bref. Si les lettres sont envoyées après Pâques, et compte tenu du temps que prend la distribution postale dans certains pays, elles risquent d'arriver trop tard.

Je suis tout à fait d'accord avec vous, la mise en ligne est une très bonne chose. Encore faut-il en avertir nos compatriotes, parce que, d'eux-mêmes, ils ne vont pas chercher ce dont ils ignorent l'existence.

Quant à l'émission de RFI, je trouve dommage qu'il n'y en ait qu'une pour l'instant. Pour ma part, je suggère que des spots soient diffusés sur cette chaîne ainsi que sur TV5, chaîne qui est regardée par les Français de l'étranger, surtout par ceux qui se trouvent dans les pays éloignés.

Madame la ministre, je conclus mon propos en vous signalant le cas un peu particulier de la principauté d'Andorre, qui va voter pour la première fois. Plusieurs milliers de Français sont appelés à se prononcer.

Il semble - je n'ai pas de confirmation officielle déterminante -, que les autorités consulaires auraient renoncé à l'affranchissement du courrier, qui n'est pas obligatoire dans la principauté. L'acheminement prendra dans ces conditions de deux à trois semaines. Donc, les lettres risquent d'arriver après la date limite.

À mon sens, un budget devrait être prévu pour cela, à l'instar de ce qui se passe dans les autres pays. Sans cela, les électeurs n'auront aucune chance de voter par Internet puisqu'ils ne seront pas informés.

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