Question de M. HUE Robert (Val-d'Oise - CRC) publiée le 09/03/2006
M. Robert Hue souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur la situation de l'hôpital Victor-Dupouy d'Argenteuil. Cet établissement emploie 2 000 personnes ; le service d'urgence reçoit 60 000 patients. Les problèmes s'amoncellent, entre suppressions d'emplois et heures supplémentaires accumulées. Le conseil d'administration a voté, l'année dernière, un plan drastique de réduction des dépenses. Au plan national, le budget pour 2006 prévoit de nouveau des coupes strictes et importantes dans le secteur de la santé et de l'action sociale. La situation est très alarmante. Des centaines d'emplois sont menacés et certains établissements sanitaires vont se retrouver devant une situation sans précédent, certains envisagent même une cessation de paiement. Dans ce contexte alarmant, il souhaite connaître l'avancement des réflexions du Gouvernement dans ce domaine.
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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 22/03/2006
Réponse apportée en séance publique le 21/03/2006
M. le président. La parole est à M. Robert Hue, auteur de la question n° 973, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Robert Hue. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur l'avenir de l'hôpital public dans notre pays. En effet, la situation est grave, alarmante, pour ne pas dire parfois dramatique.
Avec le groupe CRC, je me suis opposé au budget pour 2006, tant sont lourdes de conséquences les coupes claires et inquiétantes qui ont été effectuées dans le secteur de la santé et de l'action sociale. Des centaines d'emplois sont menacés et certains établissements envisagent même - tenez-vous bien ! - une cessation de paiement.
Et pourtant, aucune solution concrète susceptible d'apporter un peu d'air frais n'est inscrite sur votre feuille de route !
Ainsi, dans mon département du Val-d'Oise, le service des urgences de l'établissement hospitalier Victor-Dupouy, situé à Argenteuil et qui emploie 2 200 personnes, ne reçoit pas moins de 60 000 patients par an, d'après les derniers chiffres connus.
Je parlais à l'instant de cessation de paiement. : avec 12 millions d'euros de déficit cumulé, l'hôpital Victor-Dupouy n'en est peut-être malheureusement pas loin. Cette situation financière est intenable à court terme et le conseil d'administration, qui doit statuer sur le budget pour 2006, ne cesse d'être repoussé.
Le budget de 2005 avait déjà été l'occasion d'entériner un plan drastique de réduction des dépenses de fonctionnement, pesant lourdement sur les activités de cet établissement.
Cette situation inédite de sous-financement des hôpitaux se traduit par une atteinte à la dernière variable d'ajustement touchable : les personnels.
Ces derniers voient déjà les heures supplémentaires s'accumuler et les plannings non respectés. Le déficit d'infirmières - il en manque soixante à l'hôpital d'Argenteuil - et de manipulateurs radio, notamment, est criant, alors même que tous les départs prévus ne seront peut-être pas remplacés.
Enfin, je souhaite évoquer la question du ménage dans les hôpitaux, activité privatisée depuis peu, ce qui n'est pas sans représenter un danger en matière d'hygiène, et notamment d'infections nosocomiales, tout au moins si la formation de ces personnels privés n'est pas garantie.
Monsieur le ministre, comment ne pas s'alarmer lorsqu'il est porté atteinte à ces secteurs majeurs que sont la santé publique et l'hygiène, au motif de faire des économies que, pour ma part, je soupçonne d'être peu créatrices de moyens budgétaires supplémentaires ?
À ce propos, je vous signale que j'ai interrogé il y a un an, le 8 mars 2005, l'agence régionale d'hospitalisation sur les difficultés qu'engendre, en accentuant les inégalités territoriales, la tarification à l'activité. Or je n'ai reçu à ce jour aucune réponse, ce qui est inacceptable.
Une partie de cette tarification, à hauteur de 46 %, devait être consacrée au fonctionnement des hôpitaux : où en est-on, monsieur le ministre ?
Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour redonner à l'hôpital et à son personnel, dont le sens de la responsabilité et du dévouement est exceptionnel, les moyens de remplir leur mission de service public, sans que soient remis en cause le droit à la santé et à la protection sociale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, s'il y a bien un point sur lequel je suis d'accord avec vous, c'est pour rendre hommage au dévouement du personnel hospitalier qui, jour après jour, au chevet des malades, assure dans nos hôpitaux des soins de qualité.
Ce personnel a d'autant plus de mérite que sa charge de travail a été notablement aggravée par l'application particulièrement désordonnée de la réforme des 35 heures à l'hôpital, dans les années qui ont précédé les élections présidentielle et législatives de 2002.
À cette époque, d'ailleurs, les budgets hospitaliers n'augmentaient pas davantage que dans la période actuelle.
Je tiens en effet à vous rappeler, au-delà de la situation de l'hôpital d'Argenteuil, qu'en 2006 le taux de progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour l'hôpital, voté par le Parlement, s'établit à 3,44 %, ce qui représente plus de 2 milliards d'euros supplémentaires qui seront versés par l'assurance maladie aux établissements de santé.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur. Le Gouvernement, qui est engagé dans l'application du plan Hôpital 2006, plan d'investissement sans précédent en faveur de l'hôpital, poursuivra cet effort national reposant sur la solidarité.
Le centre hospitalier d'Argenteuil a dû faire face depuis plusieurs années, de même que plusieurs établissements de la région d'Île-de-France, à des tensions budgétaires importantes : fin 2003, les reports de charges s'élevaient à 7,25 millions d'euros.
Pour ces raisons, un contrat de retour à l'équilibre a été signé au mois d'octobre 2004 entre l'agence régionale de l'hospitalisation de l'Île-de-France et cet établissement. Ce contrat a permis d'apporter une aide budgétaire de 10 millions d'euros sur la période 2004-2007, dont 7,25 millions d'euros au titre du report des charges et 2,75 millions d'euros au titre de l'accompagnement des activités développées au sein du centre hospitalier.
Le contrat de retour à l'équilibre repose sur deux objectifs : l'augmentation de l'activité par réduction de la durée moyenne de séjour des patients, qui est encore longue au centre hospitalier Victor-Dupouy, et l'ouverture de nouvelles activités, accompagnées financièrement par l'agence régionale de l'hospitalisation dans le domaine de la médecine gériatrique et polyvalente.
En contrepartie de cette aide, qui ne couvre pas la totalité de l'impasse budgétaire cumulée, l'hôpital s'est engagé à réaliser des économies en réorganisant de façon plus optimale la prise en charge des patients.
Les efforts réalisés par cet hôpital en 2004 et 2005, avec l'aide de l'agence régionale de l'hospitalisation, ont permis de réduire le déficit cumulé. En effet, la progression de l'activité, de 7 % en 2005 et d'environ 4 % sur les premiers mois de l'année 2006, se traduit par une augmentation des recettes issues de la tarification à l'activité, qui contribue à rééquilibrer le budget du centre hospitalier.
Cette augmentation d'activité devrait se poursuivre avec l'impact des lits ouverts en 2005 et 2006, en particulier en médecine gériatrique, en médecine générale et en oncologie.
Quant au service des urgences de l'hôpital Victor-Dupouy, il a été entièrement reconstruit et a ouvert ses nouveaux locaux en 2003. L'État a poursuivi le soutien apporté à cette activité essentielle pour les patients puisque, en 2005, au titre du plan d'urgence, le centre hospitalier d'Argenteuil a bénéficié de 190 000 euros pour ouvrir vingt lits et d'un poste et demi de praticien hospitalier pour renforcer le service mobile d'urgence et de réanimation, le SMUR, ainsi que l'activité des urgences.
Je tiens donc à vous confirmer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement veille à assurer la continuité du fonctionnement du centre hospitalier d'Argenteuil, comme de tous les établissements de santé, dont les moyens vont continuer à s'accroître, pour le service de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Robert Hue.
M. Robert Hue. Monsieur le ministre, votre réponse ne me rassure pas.
Comme vous l'avez dit d'emblée, nous sommes d'accord pour reconnaître le travail exceptionnel effectué tous les jours et sans relâche par les praticiens et les personnels hospitaliers.
Cependant, les chiffres que vous donnez ne me rassurent pas et vous ne montrez pas très concrètement à ces personnels votre attachement à ce que l'hôpital, à Argenteuil comme ailleurs, retrouve l'essor nécessaire en tant que service public. Vous évoquez un contrat de retour à l'équilibre et l'obtention d'une aide budgétaire de 10 millions d'euros, mais, je le répète, le déficit de l'hôpital porte sur 12 millions d'euros !
Par ailleurs, l'un de vos propos me paraît exceptionnellement grave, mais bien dans l'esprit de votre démarche : l'hôpital d'Argenteuil doit faire des efforts, avez-vous dit, notamment au niveau de la réduction du temps d'hospitalisation. Je suis issu moi-même du monde de l'hôpital et, s'il est évident que nous pouvons gagner du temps sur l'hospitalisation, il est un moment où gagner du temps revient à mettre en réel danger les patients.
Nous ne pouvons accepter que l'hôpital soit géré à coups de calculette par des technocrates qui ignorent son fonctionnement et oublient que, au bout, il y a des malades qu'il faut soigner.
Je ne suis donc pas satisfait, monsieur le ministre, et je rendrai naturellement compte de votre réponse aux personnels hospitaliers et aux élus de mon secteur.
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