Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOC) publiée le 02/02/2006
M. Jean-Marc Todeschini attire l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les difficultés que rencontrent les municipalités, et plus particulièrement la commune de Guénange en Moselle, qui souhaitent, dans le cadre de la loi de cohésion sociale et de l'accord passé entre l'État et l'Union sociale pour l'habitat (USH), s'investir dans la production de logements sociaux. Ces difficultés tiennent aux conditions de financement du logement social et plus précisément à celles liées au zonage. En effet, les communes du département de la Moselle sont réparties en zones 2 et 3. La ville de Guénange, deuxième ville du département, située sur la rive droite de la Moselle, est en zone 3, alors que les villes situées à 300 mètres de là, sur l'autre rive, et qui appartiennent au même bassin d'habitat le bassin sidérurgique nord mosellan sont classées en zone 2. Il en résulte des différences importantes en matière de financement, et surtout de plafonds de loyers. Ainsi, les plafonds appliqués en zone 3 ne permettent pas l'équilibre des opérations, dont le coût de revient, que cela concerne le foncier ou le coût des travaux, est identique que l'on soit d'un côté ou de l'autre de la rivière. Ce zonage, parce qu'il ne prend pas en compte l'évolution démographique et sociale des bassins d'habitation, emporte un certain nombre de contestations de la part des élus locaux, qui se trouvent du coup, freinés par des obstacles réglementaires dans leurs actions en faveur du développement du logement social, actions concourant à la réussite du plan de cohésion sociale. Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend accompagner les communes qui s'engagent à la réussite du plan de cohésion sociale, et, pour ce faire, modifier le décret relatif au zonage afin que soit pris en compte l'évolution démographique et sociale des bassins d'habitation. Il souhaite également, en cas de refus, qu'il lui indique les raisons objectives de ce refus, et il lui demande un examen attentif du cas particulier de la ville de Guénange.
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Réponse du Ministère délégué au budget et à la réforme de l'État, porte parole du Gouvernement publiée le 22/02/2006
Réponse apportée en séance publique le 21/02/2006
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, depuis plusieurs années déjà, de nombreuses communes s'investissent dans la production de logements sociaux.
Animées par une forte volonté politique, elles souhaitent aujourd'hui continuer sur ce terrain et contribuer à la réalisation des objectifs du plan de cohésion sociale et de l'accord passé entre l'État et l'Union sociale pour l'habitat.
Bien qu'elles soient déterminées, ces communes se heurtent à des difficultés réglementaires, qui tiennent essentiellement aux conditions de financement du logement social, et plus précisément au zonage. C'est notamment le cas dans mon département, la Moselle, dont les communes sont réparties en zones 2 et 3.
Permettez-moi, monsieur le ministre délégué, d'utiliser le cas particulier de la commune de Guénange pour expliciter mon propos.
Cité sidérurgique depuis 1952, Guénange compte déjà plus de 20 % de logements sociaux, et elle souhaite poursuivre sa politique de cohésion sociale par la mixité de l'habitat : 50 % d'accession à la propriété, 50 % de logement social, tant en pavillonnaire qu'en collectif.
Située sur la rive droite de la Moselle, à l'entrée des vallées ouvrières de la Fensch et de l'Orne et aux portes de l'agglomération thionvilloise, deuxième ville du département, Guénange est classée en zone 3. Les villes situées à trois cents mètres de là, sur l'autre rive, et qui appartiennent au même bassin d'habitat - le bassin sidérurgique nord-mosellan - sont, elles, classées en zone 2.
Ce classement conduit à des différences importantes en matière de financement, et surtout de plafonds de loyers. En effet, les plafonds appliqués en zone 3 ne permettent pas l'équilibre des opérations, dont le coût de revient - aussi bien pour le foncier que pour les travaux - est pourtant identique, que l'on se situe d'un côté ou de l'autre de la rivière.
De par cette situation, la ville de Guénange, qui travaille avec tous les grands bailleurs sociaux du département, publics et privés, a du mal à poursuivre son programme de développement du logement social, compte tenu de la difficulté pour les opérateurs d'équilibrer leurs opérations.
Monsieur le ministre délégué, je ne méconnais pas le principe des limites, selon lesquelles la réglementation administrative joue plus favorablement selon que l'on se situe de part et d'autre de ces limites. Je n'ignore pas non plus que ce zonage, aboutissant à la détermination des plafonds de loyers applicable, ressortit au domaine réglementaire.
Toutefois, je vous rappelle qu'à plusieurs reprises élus nationaux et locaux ont interpellé les services de l'État pour obtenir une modification du décret relatif au zonage, qui ne prend pas du tout en compte l'évolution démographique et sociale que connaissent les bassins d'habitat.
Si, à l'origine, la rive droite de la Moselle pouvait présenter un caractère moins urbain et industriel qu'aujourd'hui, je trouve dommageable et choquant que la volonté des élus de concourir au plan de cohésion sociale soit freinée pour des raisons réglementaires.
De cette modification réglementaire dépend en grande partie la réussite du plan de cohésion sociale. Aussi, je souhaiterais, monsieur le ministre délégué, connaître les intentions du Gouvernement.
Allez-vous modifier le décret relatif au zonage afin que soit prise en compte l'évolution démographique et sociale des bassins d'habitation ? Si la réponse doit être négative, je vous demande de bien vouloir m'indiquer les raisons objectives de ce refus, et je sollicite de votre part un examen attentif du cas particulier de la ville de Guénange.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les modalités relatives à la construction de logements sociaux. Empêché, M. Borloo m'a demandé de le remplacer et vous prie de l'excuser.
Vous évoquez tout particulièrement l'impact des zonages réalisés et demandez une modification de ce zonage pour la commune de Guénange. Vous mettez en avant le fait qu'elle est actuellement située en zone 3, alors que d'autres communes du département se trouvent en zone 2.
Le zonage actuel repose sur une analyse fine des conditions économiques locales et doit permettre d'équilibrer les opérations de logement social. Il est très fréquent qu'un département comprenne plusieurs zones.
Il est vrai que les conditions économiques locales peuvent évoluer dans le temps, justifiant des changements de zone. Néanmoins, de tels changements doivent être examinés avec beaucoup de précaution. En effet, ces modifications ont notamment pour conséquence d'augmenter les loyers des logements sociaux, et donc « le reste à charge » pour les ménages modestes.
Cela est particulièrement vrai pour le passage de la zone 3 à la zone 2 ; en effet, 80 % de l'impact repose sur l'augmentation du plafond des loyers.
Le Gouvernement est toutefois disposé à étudier au cas par cas ces demandes de changement de zone, lorsque l'équilibre des opérations pose véritablement un problème, comme cela a été le cas en 2005 sur un secteur de l'Ile-de-France.
Au-delà du zonage, je veux rappeler l'ensemble des mesures prises afin de faciliter l'équilibre des opérations de logement social.
Ainsi, la durée des prêts de la Caisse des dépôts et consignations a été augmentée de cinq ans : ceux-ci sont désormais de quarante ans.
Par ailleurs, l'État lui-même consent un effort sans précédent. Au terme de la première lecture au Sénat du projet de loi portant engagement national pour le logement, il a été décidé une compensation totale par l'État de l'exonération de la taxe foncière pendant vingt-cinq ans pour toutes les opérations de catégorie PLUS, prêt locatif à usage social, et PLAI, prêt locatif aidé d'intégration, c'est-à-dire pour le logement social ordinaire ou à destination des ménages les plus défavorisés.
Ces deux mesures cumulées correspondent à une subvention de l'État de plus de 15 % du coût des opérations, ce qui est très significatif, comparé à l'impact d'un changement de zonage.
Ces mesures doivent ainsi permettre de compenser la hausse récente du foncier ou des coûts de construction, et donc d'équilibrer très correctement les opérations de logement social dans quasiment toutes les régions, sans qu'il soit nécessaire de procéder en plus à un changement de zonage qui peut présenter des inconvénients pour les ménages.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Je vous remercie, monsieur le ministre délégué, de me transmettre la réponse de votre collègue, laquelle, je l'ai bien compris, revient à dire « circulez, il n'y a rien à voir ! »
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je l'ai dit plus gentiment ! (Sourires.)
M. Jean-Marc Todeschini. Certes, monsieur le ministre, mais je le dis à ma façon ! (Nouveaux sourires.)
Ma question vous a permis de rappeler les mesures qui ont été prises par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, mais aucune n'a réellement trait au cas que j'ai soulevé.
Je peux témoigner des difficultés de l'Office public d'aménagement et de construction de la Moselle, dont j'ai été moi-même vice-président, pour mettre en oeuvre son projet d'investissement à Guénange, alors que la ville de Mondelange, située à trois cents mètres, sur l'autre rive, et appartenant au même bassin d'habitat, bénéficie de conditions plus favorables.
Je souhaite donc que la situation de Guénange soit étudiée de près, sachant que cette commune ouvrière - la plus importante sur la rive droite de la Moselle - ne peut se développer aussi facilement que ses voisines en raison d'un zonage par lequel elle est littéralement coincée.
Certes, les autres mesures que vous avez citées en faveur du logement social sont intéressantes, mais elles le sont pour toutes les communes, et les bailleurs sociaux privilégient les communes où il est le plus facile d'investir.
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