Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC-UDF) publiée le 03/02/2006
Question posée en séance publique le 02/02/2006
M. Claude Biwer. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, permettez-moi de revenir sur cette OPA du groupe Mittal Steel sur Arcelor qui préoccupe nombre de personnes et suscite beaucoup d'interrogations.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est normal !
M. Claude Biwer. L'inquiétude des régions est grande, surtout en Lorraine, dont je suis un des élus et où le groupe Arcelor est particulièrement implanté.
M. Raymond Courrière. C'est le libéralisme !
M. Claude Biwer. En effet, lorsque le marché mondial sera moins porteur, il est à craindre qu'un groupe issu de la fusion de Mittal Steel et d'Arcelor ne privilégie les sites industriels les plus rentables, c'est-à-dire ceux qui sont situés dans les pays où le prix de revient est très bas, au détriment des usines européennes, ce qui, à terme, pourrait conduire à la quasi-disparition de la sidérurgie européenne. Cela nous ramène à la problématique des délocalisations.
Monsieur le Premier Ministre, vous avez placé votre action voilà quelques mois sous le signe du patriotisme économique et, plus récemment, sous celui du patriotisme économique européen. Évidemment, nous vous soutenons à cet égard.
Même si nous sommes conscients du fait que la décision finale appartiendra aux actionnaires du groupe Arcelor, le patriotisme économique national ne nécessiterait-il pas que des réformes structurelles soient engagées afin de rendre notre pays plus compétitif et plus attractif et que, à l'instar de l'Irlande, par exemple, l'État et les entreprises françaises consacrent plus de moyens à la recherche-développement, afin de se tourner vers des productions haut de gamme, que peuvent difficilement concurrencer les pays à bas coûts ?
Le patriotisme économique national ne devrait-il pas conduire l'État à réduire plus rapidement les déficits publics, comme vous souhaitez d'ailleurs le faire, et à réorienter l'épargne des Français vers les entreprises ? Je rappelle qu'une part importante du capital des plus grandes entreprises françaises est détenue par des fonds de pensions anglo-saxons.
Le patriotisme économique européen, quant à lui, ne devrait-il pas conduire l'Union européenne à se doter enfin d'une véritable politique industrielle ? Ainsi, plutôt que de laisser Arcelor mener un combat sans merci avec ThyssenKrupp pour prendre le contrôle de Dofasco, combat dont on mesure aujourd'hui les conséquences, n'eût-il pas été plus judicieux de tenter de former un grand groupe européen autour de ces deux entreprises ? Ne payons-nous pas aujourd'hui le « non » français au référendum qui nous prive de moyens de pressions dans ce sens ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah ! Changeons le peuple !
M. Claude Biwer. Enfin, en cas de réussite éventuelle de l'OPA de Mittal Steel sur Arcelor, quel sera, à terme, l'avenir des usines françaises, de leurs dizaines de milliers de salariés, de leurs chercheurs et des régions concernées, notamment la Lorraine,...
M. le président. Monsieur Biwer, veuillez poser votre question !
M. Claude Biwer. ...qui a déjà tant souffert des restructurations industrielles passées et dont les habitants sont, une fois de plus, plongés dans une grande inquiétude ? Ces derniers peuvent-ils espérer que, même dans un marché moins porteur, l'emploi pourra être maintenu ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP et du RDSE.)
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 03/02/2006
Réponse apportée en séance publique le 02/02/2006
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez indiqué, c'est un combat qui est engagé, car l'OPA a été déclarée hostile par l'une des parties prenantes. In fine, ce seront les actionnaires qui décideront,...
Mme Hélène Luc. Voilà !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les actionnaires ont toujours raison !
M. Didier Boulaud. Cela ne sert à rien de jouer les golden boys !
M. Thierry Breton, ministre. ...lorsqu'ils seront saisis du projet, que nous ne connaissons pas encore, ce dont je me suis d'ailleurs quelque peu étonné.
M. Didier Boulaud. Il joue aux indiens et aux golden boys !
M. Thierry Breton, ministre. Cela étant dit, s'agissant des actionnaires, le Premier ministre a insisté pour que nous puissions aujourd'hui accompagner différemment l'actionnariat des entreprises.
M. René-Pierre Signé. Il est sans pouvoir !
M. Thierry Breton, ministre. De façon à pouvoir créer un actionnariat plus stable et plus long dans les entreprises, le Premier ministre a souhaité faire en sorte que les actionnaires qui décident de détenir pendant plus de six ans des actions de l'entreprise dans laquelle ils investissent bénéficient de l'exonération sur les plus-values. Ils seront ainsi incités à accompagner sur le long terme le développement des entreprises et non à répondre aux premières sirènes venues. Cette mesure a été adoptée tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.
Le Premier ministre a aussi insisté - et cette mesure a été adoptée par le Parlement - pour que les salariés qui investissent dans leur entreprise bénéficient d'une exonération pendant la période de leur investissement, notamment de l'impôt sur la fortune,...
M. Didier Boulaud. C'est du capitalisme !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est sûr !
M. Thierry Breton, ministre. ... afin de favoriser la création d'un actionnariat long, au profit également desdits salariés.
M. Didier Boulaud. C'est le monde que vous avez voulu !
M. Thierry Breton, ministre. Enfin, je rappelle que, à la demande du Premier ministre, Gérard Larcher, Jean-Louis Borloo et moi-même travaillons sur un projet de loi qui a pour vocation d'associer désormais plus étroitement les salariés, les actionnaires et l'entreprise, de façon, entre autres, à créer ce noyau d'actionnaires que nous appelons de nos voeux...
M. Didier Boulaud. C'est le monde que vous avez voulu ! Vous n'avez qu'à vivre avec !
M. Thierry Breton, ministre. ... qui permettra aux entreprises françaises et européennes de se développer plus harmonieusement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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