Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 20/10/2005
M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que le projet de réforme du droit des successions prévoit une réduction du délai de prescription de l'option successorale qui passerait de trente ans à dix ans. Ce projet présente des inconvénients pour tous les héritiers que les généalogistes successoraux recherchent. En l'état actuel du droit, tout héritier peut faire valoir ses droits dans une succession ou une indivision pendant trente ans. En pratique, lorsque les héritiers sont connus, ils demandent à un notaire de régler la succession dans les mois suivants le décès. Les droits de succession sont alors réglés à l'État dans les six mois suivant le décès. Lorsque les héritiers sont des collatéraux éloignés (cousins au-delà du 4e degré), ils supportent jusqu'à 60 % de pression fiscale. Bien souvent, ces héritiers ne sont pas connus immédiatement et la succession ne peut pas être réglée dans un délai de six mois. Les héritiers risquent alors de supporter des intérêts de retard, des pénalités et majorations dont ils peuvent demander remise au fisc sans être assurés néanmoins qu'une remise leur sera accordée. Bien sûr, lorsque le délai atteint plusieurs années, la pression fiscale devient confiscatoire. Cependant, il arrive fréquemment que les héritiers ne soient identifiés qu'après une dizaine d'années. Le législateur a prévu dans ce cas une prescription fiscale décennale, de sorte que ces héritiers, de bonne foi, n'ayant pas profité de l'actif successoral d'une manière indépendante de leur volonté, ne supportent plus de droits de succession. En résumé, l'État recueille 60 % environ de droits auxquels s'ajoutent d'éventuelles majorations, sauf lorsque plus de dix ans sont révolus sans que des héritiers soient connus, indépendamment de l'éventuelle intervention du service des domaines. La prescription fiscale décennale applicable aux successions est conforme aux dispositions généralement applicables dans les autres branches du droit fiscal français. Or, selon le projet actuel, tout héritier devrait prendre parti dans les dix ans suivant le décès, à défaut de quoi ses droits seraient prescrits. Il souhaiterait qu'il lui indique s'il n'y aurait alors pas une atteinte à l'article 544 du code civil puisqu'il est admis par la jurisprudence que la propriété ne s'éteint pas par le non-usage. De plus, l'article 2262 du code civil dispose que le délai normal de prescription en matière civile est de trente ans.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 27/04/2006
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le projet de loi portant réforme du droit des successions et des libéralités adopté par l'Assemblée nationale le 22 février dernier réduit le délai de prescription de l'option successorale de trente à dix ans. Cette réduction est rendue nécessaire par la poursuite d'un des objectifs majeurs du projet de loi qui est l'accélération du règlement des successions. Toutefois, la jurisprudence a depuis longtemps dégagé le principe selon lequel la prescription ne court pas contre celui qui n'a pas connaissance de la naissance de son droit. Ainsi, l'héritier qui, plus de dix ans après le décès de celui dont il a vocation à hériter, ignore toujours qu'il peut se prévaloir de cette qualité, ne pourra pas se voir opposer cette prescription. Dans un souci de sécurité juridique et de clarification, l'examen du texte devant l'Assemblée nationale a permis l'adoption d'un amendement, avec l'avis favorable du Gouvernement, qui précise, à l'article 781 du code civil tel qu'il résulte du projet de loi, que la prescription de dix ans ne court pas tant que le successible a de juste raison d'ignorer la naissance de son droit, notamment l'ouverture de la succession.
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