Question de M. DOMEIZEL Claude (Alpes de Haute-Provence - SOC) publiée le 01/09/2005
M. Claude Domeizel attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique sur l'application de l'article 136 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004, loi de finances rectificative pour 2004. Cet article étend aux fonctionnaires masculins la possibilité, dont bénéficiaient jusqu'alors uniquement les fonctionnaires féminins, d'obtenir la mise en paiement immédiate d'une pension dès lors qu'ils ont effectué 15 années de services et sont parents de trois enfants. Ce texte subordonne ce départ anticipé à une condition d'interruption d'activité et renvoie à un décret en Conseil d'Etat pour en préciser les modalités. Le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005, paru au Journal officiel le 11 mai, est entré en vigueur le 12 mai 2005. Entre la publication de la loi et celle du décret, des pères de famille ont souhaité faire valoir leurs droits à la retraite. Néanmoins, certains services de l'Etat leur ont donné des réponses imprécises fondées sur l'attente de la parution dudit décret. Pourtant, dans son arrêt Lefebvre du 23 mars 2005, le Conseil d'Etat a considéré que l'article 136 de la loi de finances rectificative pour 2004 n'entrerait en vigueur que lors de la publication de son décret d'application. Les services des pensions auraient donc dû maintenir la position qui prévalait jusqu'alors, c'est-à-dire rejeter les demandes de départ anticipé, en application de l'ancienne réglementation. Ainsi les intéressés auraient eu la possibilité de saisir la juridiction administrative. L'absence de décision de rejet claire et certaines réponses assez équivoques ont créé une inégalité manifeste entre les fonctionnaires qui ont pu former un recours et ceux qui sont restés dans l'attente d'une décision plus explicite de l'administration. Par ailleurs, il est rappelé que cette situation inéquitable résulte d'une position illégale défendue par le Gouvernement. En donnant pour instruction aux différents services chargés de la liquidation des pensions de refuser systématiquement le bénéfice du départ anticipé aux pères de famille, ce dernier a délibérément méconnu le principe communautaire d'égalité des rémunérations entre les hommes et les femmes ainsi que la jurisprudence tant de la Cour de justice des Communautés européennes que du Conseil d'Etat pourtant affirmée depuis 2001. Les intéressés ont donc été contraints d'engager de longues procédures devant la juridiction administrative pour se voir reconnaître un droit qui aurait dû leur être accordé de façon automatique et dont seuls les mieux informés ont en définitive pu bénéficier. Aussi, dans un souci d'équité entre l'ensemble des fonctionnaires et pour mettre fin à cette situation inacceptable, il lui demande de bien vouloir reconnaître le bénéfice du départ anticipé au titre de trois enfants à tous les fonctionnaires qui ont formulé une demande d'admission à la retraite antérieurement au 12 mai 2005, que la juridiction administrative ait été saisie ou non par les intéressés.
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Réponse du Ministère de la fonction publique publiée le 03/11/2005
Depuis 1924, le code des pensions civiles et militaires prévoyait qu'une femme fonctionnaire, mère de trois enfants, peut prendre sa retraite après quinze ans de service avec jouissance immédiate. Ce dispositif n'était pas conforme au droit européen applicable en matière d'égalité entre les hommes et les femmes. Il a suscité de nombreux recours devant les juges administratifs. Il n'était pas possible de continuer à demander aux tribunaux de dire le droit à la place du législateur. Lors de l'examen au Sénat du projet de loi de finances rectificative pour 2004, le sénateur Leclerc a déposé un amendement visant à rendre le droit français compatible avec les règles communautaires. Il a, en effet, proposé d'aménager le dispositif législatif de la façon suivante : le droit au départ anticipé sera désormais ouvert aux hommes fonctionnaires, pères de trois enfants, dans les mêmes conditions que pour les femmes. Pour pouvoir prétendre à ce droit, les hommes comme les femmes devront avoir temporairement renoncé à leur activité professionnelle afin de s'occuper de leurs enfants au moment de leur naissance ou de leur adoption. La durée et les modalités de l'interruption d'activité nécessaire pour obtenir le bénéfice de la mesure seront fixées par décret. Le Sénat a adopté cet amendement à l'unanimité. Le Gouvernement a aussi soutenu cette initiative parlementaire pour deux raisons essentielles. D'abord, elle permet de mettre le code des pensions civiles et militaires de retraite en conformité avec le droit communautaire et de mettre ainsi fin aux nombreux contentieux qui encombrent aujourd'hui les juridictions administratives. Ensuite, le décret d'application de cet amendement permettra de construire un dispositif qui ne porte pas préjudice aux droits acquis des mères de famille. En effet, l'intention du Gouvernement est que le nouveau dispositif n'exclue pas les femmes pouvant prétendre aujourd'hui au départ anticipé. C'est ainsi par exemple, que seront prises en compte les périodes d'interruption d'activité dans la fonction publique et en dehors de celle-ci. De même, afin de ne pas exclure les femmes ayant eu un ou plusieurs enfants avant le début de leur activité professionnelle, l'amendement du sénateur Leclerc prévoit d'assimiler à une interruption d'activité les périodes d'absence d'activité professionnelle, notamment les années d'études. Cette réforme, essentielle pour clarifier notre droit national conformément aux engagements que nous avons pris devant nos partenaires européens en matière d'égalité homme-femme, se fera ainsi sans remettre en cause les droits acquis. Le décret d'application, qui a été soumis à la concertation avec les organisations syndicales, a été publié le 11 mai 2005 (décret n° 2005-449 du 10 mai 2005).
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