Question de Mme LE TEXIER Raymonde (Val-d'Oise - SOC) publiée le 21/01/2005
Question posée en séance publique le 20/01/2005
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, aujourd'hui encore, dans le monde, toutes les sept minutes, une femme meurt des suites d'un avortement illégal. En France, il y a juste trente ans, grâce au combat d'associations féministes, de médecins militants et au courage de Simone Veil, les femmes sont sorties du Moyen-Âge.
M. Gérard Roujas. Très bien !
Mme Raymonde Le Texier. Rappelons que, dans les années soixante, l'une d'entre nous décédait chaque jour des suites d'un avortement.
Cependant, samedi dernier, à l'occasion de cet anniversaire si important pour elles, les femmes étaient dans la rue pour dire que ce combat était toujours d'actualité.
Oui, l'accès à l'avortement reste fragile et la loi n'est pas toujours respectée. Les raisons sont les suivantes : insuffisante prise en charge à l'hôpital public, refus de certains médecins de pratiquer les IVG, temps d'attente trop longs, fermeture de services durant l'été, attitude des personnels souvent remarquable, mais quelquefois, hélas ! inacceptable...
Compte tenu de tout cela, trente ans après le vote de la loi, ce sont chaque année environ 3 500 femmes qui doivent partir avorter à l'étranger, faute d'avoir pu trouver, ici, une réponse adaptée, dans les délais impartis par la loi.
Trouver une solution à l'étranger demande un minimum d'organisation, de moyens financiers, une solution pour la garde des enfants puisque 40 % des femmes faisant pratiquer un avortement sont des mères de famille. On peut donc supposer que les plus fragiles d'entre nous recourent encore à des pratiques qui mettent leur vie en danger.
Ma question, madame la ministre, portera sur trois points : quelles dispositions concrètes comptez-vous prendre pour que la loi soit appliquée comme elle doit l'être, afin qu'aucune femme ne soit contrainte à d'autres choix, faute d'avoir trouvé à temps une réponse à sa demande ?
Vous avez, certes, signé le décret d'application sur l'IVG médicamenteuse que nous attendions depuis trois ans, et on peut supposer que c'est là un début de réponse. Mais cette question va devenir d'autant plus aiguë que le départ en retraite de médecins militants et de ceux qui ont connu la situation avant la loi Veil s'accélère, tandis que nombre de praticiens plus jeunes sont réticents à pratiquer ces interventions.
Par ailleurs, quelles mesures le ministère de la santé, en partenariat avec le ministère de l'éducation nationale, compte-t-il prendre pour qu'une information sur la contraception soit largement diffusée, et ce de façon continue, auprès des jeunes en âge de la recevoir, de tous les jeunes, c'est-à-dire en milieu scolaire ?
Enfin, comment expliquez-vous que, à la rubrique « renseignements pratiques » concernant l'avortement, le site officiel du ministère de la santé ait été investi par les associations anti-IVG, dont on connaît la violence des actes et des propos ? Quels engagements pouvez-vous prendre pour que cela ne se reproduise plus à l'avenir ?
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Réponse du Ministère de la parité et de l'égalité professionnelle publiée le 21/01/2005
Réponse apportée en séance publique le 20/01/2005
Mme Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle. Je vous remercie, madame la sénatrice, du ton de votre intervention, et je vous demande de ne pas douter une seule seconde de l'attachement du Gouvernement à ce droit fondamental, à cette liberté dont nous avons été à l'origine...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est grâce à la gauche qu'elle a été obtenue, pas grâce à vous !
Mme Nicole Ameline, ministre. ... puisqu'elle a été défendue, comme vous l'avez souligné, par Simone Veil et qu'elle figure dans la loi du 17 janvier 1975, si importante pour les femmes.
Depuis, nous n'avons naturellement pas cessé de parfaire l'application de ce texte puisque, très récemment - et je me limiterai à cet exemple -, M. Philippe Douste-Blazy a permis que l'IGV médicamenteuse, c'est-à-dire pratiquée hors établissement, puisse intervenir dans de très bonnes conditions.
Je soulignerai aussi que le décret de juillet 2004, qui porte sur ce point, ainsi que l'arrêté qui a permis d'adapter les forfaits afférents à cette pratique permettent sa mise en oeuvre dans des conditions de sécurité tout à fait adaptées.
Ce même arrêté a, par ailleurs, revalorisé de près de 30 % les tarifs des établissements de santé relatifs à ces forfaits, lesquels n'avaient pas été réévalués depuis 1991.
Nous sommes aujourd'hui convaincus que, sur cette base, les cliniques privées se réengageront dans la mise en oeuvre de cette pratique, diminuant par là même le délai que vous avez signalé et qui est une réalité pour un certain nombre de femmes.
Enfin, la circulaire du 26 novembre dernier a permis d'établir les règles de remboursement liées à ce progrès.
Dois-je rappeler que, comme vous l'avez également très bien dit, la prévention est aussi extrêmement importante ? C'est dire tout l'effort que nous devons mener ensemble sur la contraception. Un certain nombre d'informations concernant tous les nouveaux moyens de contraception figurent sur le site du ministère de la santé. Si les associations auxquelles vous avez fait référence n'apparaissaient pas dans l'annuaire sous la rubrique « avortement », elles étaient cependant bien citées sous la rubrique « contraception ». C'est un point tout à fait important, car nous avons besoin de ce relais d'information.
J'ajoute que l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé sera précisément chargé, en 2005, d'une campagne relative à cette éducation et à cette sensibilisation en direction des jeunes, comme de toutes les femmes.
Enfin, madame la sénatrice, nous devons faire de plus en plus de la contraception une priorité. L'IVG est un droit, mais ce n'est pas un acte banal.
Mme Janine Rozier. Ah !
Mme Raymonde Le Texier. Qui a dit le contraire ?
Mme Nicole Ameline, ministre. Et nous devons faire en sorte que la liberté des femmes, la maîtrise de leur vie, de leur corps, de leur destin passe particulièrement par la maîtrise de leur choix.
Mme Hélène Luc. On est loin du compte !
Mme Nicole Ameline, ministre. C'est une forme d'exercice d'une responsabilité première.
C'est d'ailleurs le message que je livrerai dans le cadre de la conférence de Pékin qui s'adresse à toutes les femmes dans le monde.
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