Question de Mme PAYET Anne-Marie (La Réunion - UC) publiée le 18/11/2004
Mme Anne-Marie Payet souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé et de la protection sociale sur l'urgence de mettre en place une véritable prise en charge du pied diabétique à la Réunion. Selon une enquête de l'observatoire régional de la santé, le nombre des personnes atteintes de diabète à la Réunion est trois à quatre fois supérieur à celui constaté en métropole. Le pied du diabétique forme une zone particulièrement fragile en raison des complications vasculaires et neurologiques qui touchent l'extrémité des membres inférieurs. Les aspects cliniques de ces complications sont variés et l'amputation en constitue l'aboutissement le plus tragique. Or 50 % de ces amputations pourraient être évitées si des mesures de prévention efficaces étaient mises en place. Si la fréquence du nombre d'amputations est stable, il n'en reste pas moins vrai que le nombre de patients, lui, est en augmentation du fait d'une plus grande prévalence du diabète. De même, l'incidence du diabète est plus importante en proportion de la population selon l'âge des patients. Ainsi, dans certaines tranches d'âge, le diabète touche jusqu'à 70 % de la population. Face à cette situation hautement préoccupante, et dans le cadre du plan diabète 2002-2005, un groupe de travail a travaillé sur l'amélioration de la prévention des lésions du pied chez le diabétique pour les patients porteurs d'un risque de lésion du pied de grade 2 ou de grade 3. Leur travail s'est concrétisé dans la définition d'un forfait podologique, qui a fait l'objet d'un protocole d'expérimentation nationale à travers les réseaux diabète. Ce protocole a été adopté le 4 mai dernier par le comité de suivi du programme d'action diabète 2002-2005. A la Réunion, ce sont 3 500 patients qui sont concernés par ce problème et qui ont besoin de soins et d'un suivi podologique. Or ces derniers ne sont pas, actuellement, remboursés par la sécurité sociale. Le coût d'une amputation s'élève approximativement à 64 000 euros (420 000 de nos anciens francs), et il en est pratiqué plus de 400 par an. Face à cette situation critique, elle indique que les pédicures-podologues de l'île souhaitent que soit mise en place une prise en charge spécifique - intégrée à la nomenclature - pour les patients développant des lésions de grade 2 et de grade 3, et pour l'ensemble des patients bénéficiaires de la couverture maladie universelle. Au vu de l'incidence de cette maladie à la Réunion, il est indispensable, d'une part, de permettre aux patients d'accéder aux soins dont ils ont impérativement besoin et, d'autre part, de donner aux pédicures-podologues les moyens nécessaires pour lutter contre ce véritable problème de santé publique. C'est pourquoi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les moyens qu'il envisage de mettre en oeuvre pour remédier à cette situation qui, encore trop souvent hélas, connaît un aboutissement tragique.
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Réponse du Secrétariat d'Etat à l'assurance maladie publiée le 22/12/2004
Réponse apportée en séance publique le 21/12/2004
Mme Anne-Marie Payet. Dans le cadre du programme régional de santé du département de la Réunion, l'observatoire régional de la santé a conduit une enquête sur la fréquence des amputations chez les diabétiques. Selon cette enquête, à la Réunion, l'incidence du diabète est de trois à quatre fois supérieure à ce qu'elle est en métropole.
Le pied représente une zone particulièrement fragile chez le diabétique en raison des complications vasculaires et neurologiques qui touchent l'extrémité des membres inférieurs. Les aspects cliniques de ces complications sont variés, et l'amputation en constitue l'aboutissement le plus tragique. Chez les diabétiques, le taux d'amputation augmente avec l'ancienneté du diabète et avec l'âge, et il est plus élevé chez les hommes.
Ainsi, de 5 % à 10 % des diabétiques seront un jour amputés d'un doigt, d'un orteil ou d'une jambe. Or 50 % de ces amputations pourraient être évitées si des mesures de prévention efficaces étaient mises en place. Les résultats de l'étude menée révèlent que, du 1er mai 2000 au 30 avril 2001, 406 amputations ont été pratiquées dans l'ensemble des sites chirurgicaux de l'île, soit plus d'une amputation par jour ! Plus des deux tiers des patients concernés, soit 279 personnes, sont des diabétiques, parmi lesquels 179 sont atteints du diabète de type 2. Si le nombre annuel d'amputations est stable, le nombre de patients, lui, est en augmentation, du fait d'une plus grande prévalence du diabète.
Parmi les diabétiques amputés, 89 % bénéficient d'une couverture sociale, 62 % d'entre eux relevant de la couverture maladie universelle. Les plus concernés par le risque podologique sont les diabétiques de type 2, qui représentent 92 % des cas, après une durée moyenne d'évolution connue de leur diabète de quinze ans.
Ces chiffres, alarmants, prouvent que le diabète constitue un véritable problème de santé publique dans mon département et conduisent à considérer qu'il est nécessaire d'y mettre en place un programme de prévention des complications podologiques, d'autant que, du fait du climat tropical, la culture locale privilégie le port de chaussures ouvertes, exposant les pieds aux microtraumatismes.
Je pense que cette indispensable prévention doit intervenir à tous les niveaux.
Il faut tout d'abord insister sur le dépistage des diabètes méconnus et des patients diabétiques à haut risque sur le plan podologique.
Il faut ensuite informer sur le traitement ainsi que sur la surveillance des troubles trophiques des pieds et assurer le suivi des patients amputés, en leur proposant un appareillage adapté.
La réduction du nombre de plaies et d'amputations chez les diabétiques passe par la sensibilisation et la formation des médecins généralistes et spécialistes, des infirmiers et des pédicures à ce problème du pied diabétique et à l'urgence de sa prise en charge. Elle nécessite également une harmonisation des actes, nombre des problèmes actuels tenant à un défaut d'organisation entre les différents intervenants.
Face à cette situation hautement préoccupante, et dans le cadre du plan diabète 2002-2005, un groupe de travail composé d'experts, de professionnels et de représentants du ministère et de l'assurance maladie a réfléchi à l'amélioration de la prévention des lésions du pied chez le diabétique pour les patients présentant un risque de lésion du pied de grade 2 ou de grade 3. Cette réflexion a débouché sur la définition d'un forfait podologique, qui a fait l'objet d'un protocole d'expérimentation nationale à travers les réseaux de santé diabète. Ce protocole a été adopté le 4 mai dernier par le comité de suivi du programme d'action diabète 2002-2005.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la prévention des complications du diabète fait partie des objectifs fixés par la loi relative à la politique de santé publique. Ces complications sont fréquentes et leur évolution est souvent grave. Leur prévalence est estimée, en France, entre 4 % et 25 %.
A la Réunion, ce sont 3 500 patients qui sont concernés par ce problème et qui ont besoin de soins et d'un suivi podologique. Or ces patients ne sont pas, actuellement, remboursés par la sécurité sociale, alors que le coût d'une amputation s'élève approximativement à 64 000 euros, qu'il en est pratiqué plus de 400 par an et que la moitié d'entre elles pourraient être évitées si, outre une prévention adéquate, les patients avaient les moyens de se faire soigner.
J'espère vous avoir convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'acuité de ce problème à la Réunion. Aussi vous saurais-je gré de me faire savoir quels moyens vous envisagez de mettre en oeuvre pour remédier à une situation qui, trop souvent encore, hélas, connaît un aboutissement tragique.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. Madame le sénateur, je voudrais tout d'abord vous préciser que la lutte contre le diabète figure parmi les priorités retenues au titre de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.
Les objectifs concernant le diabète s'inscrivent dans la continuité de la mise en oeuvre du programme d'actions 2002-2005 de prévention et de prise en charge du diabète non insulinodépendant : il s'agit de réduire la fréquence et la gravité des complications liées à cette pathologie en assurant une surveillance conforme aux recommandations de bonnes pratiques cliniques pour 80 % des diabétiques, alors que, actuellement, ce taux varie de 16 % à 72 % selon les types d'examen.
Comme vous l'avez souligné, plus de 1,8 million de personnes souffrent d'un diabète. Ce nombre tend à augmenter avec le vieillissement de la population et l'aggravation des risques liés à l'alimentation et à la sédentarité. Ainsi, le diabète est devenu la principale cause de survenue de la cécité avant soixante-cinq ans et la première cause d'amputation non traumatique en France.
C'est pourquoi, dès le début de 2005, deux actions prioritaires seront mises en oeuvre par le ministère des solidarités, de la santé et de la famille : le dépistage de la rétinopathie diabétique dans plusieurs sites pilotes et l'amélioration de la prévention, du dépistage et de la prise en charge des lésions des pieds chez les diabétiques dans les réseaux de santé diabète, dont les budgets vont d'ailleurs considérablement augmenter à la suite de l'adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.
Ces actions sont le fruit d'une coopération entre les services du ministère chargé de la santé, les caisses primaires d'assurance maladie, les professionnels de santé et les associations de patients. Elles se dérouleront pendant une année et feront l'objet d'une évaluation dont les résultats seront transmis en 2006 à la Haute Autorité de santé.
Le réseau de santé diabète implanté à la Réunion, REUCARE, fait partie de l'ANCRED, l'Association nationale de coordination des réseaux diabète, et je peux vous confirmer, madame le sénateur, qu'il sera partie prenante à cette expérimentation nationale.
De plus, des actions de formation au dépistage des lésions des membres inférieurs vont être menées à destination des médecins généralistes. Par ailleurs, il a été demandé à l'Association française des diabétiques d'informer et de sensibiliser les patients diabétiques à la prévention des complications et à l'éducation thérapeutique.
A la Réunion, compte tenu de la prévalence de cette pathologie, dont on estime qu'elle touche 10 % de la population, soit plus de 70 000 personnes - étant entendu que, pour la plupart d'entre elles, elle n'a pas été pas diagnostiquée -, le diabète représente une priorité de santé publique depuis plusieurs années. Afin de réduire les facteurs de risque et les complications, des actions d'éducation à la santé sont menées, notamment en matière de conduite alimentaire, d'exercice physique, de dépistage et de prise en charge. Nous savons pouvoir compter sur le soutien des élus, comme vous pouvez compter sur celui du Gouvernement, madame Payet, dans ce combat que vous entendez mener.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, que je transmettrai aux personnes intéressées.
Aujourd'hui, j'ai évoqué les complications podologiques chez les diabétiques, mais je pense que l'on doit prendre le problème bien en amont. Nous devons tous nous mobiliser, à tous les niveaux, contre ce fléau qui sévit beaucoup plus sévèrement dans mon département qu'en métropole.
Il s'agit non seulement de tenter de modifier certaines habitudes alimentaires, mais aussi de mettre fin aux pratiques de certains industriels locaux qui n'hésitent pas à incorporer dans les produits alimentaires qu'il fabriquent, par exemple les sodas ou les yaourts, jusqu'à 20 % de sucre de plus qu'en métropole, sous prétexte de ne pas déplaire aux consommateurs réunionnais, qui manifesteraient une nette préférence pour les produits très sucrés. J'estime que nous ne pouvons pas rester inactifs devant cette situation.
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