Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC-UDF) publiée le 28/10/2004
M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'annonce faite par le chef de l'Etat d'une réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties devant aboutir à l'élimination progressive de cette taxe pour les exploitants agricoles. Si l'on ne peut qu'approuver cette démarche, il n'en demeure pas moins que le produit de cette taxe constitue une recette importante pour les communes rurales. Il le prie de bien vouloir préciser les mesures que le Gouvernement envisage de proposer visant à ce que cette réforme préserve les ressources propres des communes concernées et respecte leur autonomie fiscale et financière.
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Transmise au Ministère délégué au budget et à la réforme budgétaire
Réponse du Ministère déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion publiée le 16/02/2005
Réponse apportée en séance publique le 15/02/2005
M. Claude Biwer. Ma question s'inscrit dans le droit-fil de celle de M. Jean Boyer et témoigne aussi de l'inquiétude des élus.
Le 21 octobre 2004, au cours d'un déplacement dans le Cantal, le Président de la République a annoncé le lancement d'une réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, l'objectif étant d'obtenir l'élimination progressive de cette taxe pour les exploitants agricoles et ainsi contribuer fortement à préserver le revenu agricole dans un contexte de plus en plus concurrentiel.
Si cette annonce a réjoui les agriculteurs, elle a également suscité une certaine inquiétude chez les maires de dizaines de milliers de communes rurales, souvent les plus petites.
En effet, s'ils se sentaient, jusqu'alors, peu concernés par le débat autour de la très difficile réforme de la taxe professionnelle dans la mesure où cet impôt ne représente souvent qu'une part infime des recettes de leurs communes, il n'en va pas de même de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
Ainsi, les 869 millions d'euros que les communes rurales ont encaissés au titre de cette taxe en 2004 représentent une part importante de leurs recettes, souvent très maigres, surtout dans les plus petites d'entre elles. Il s'agit incontestablement d'une ressource qui compte dans les communes rurales, notamment dans mon département, la Meuse, d'où l'extrême sensibilité des élus ruraux sur cette question.
Madame la ministre, pouvez-vous nous en dire un peu plus ? Quel sera le calendrier de la mise en oeuvre de cette réforme, le chef de l'Etat ayant parlé « d'élimination progressive » ? Par quel impôt cette taxe sera-t-elle remplacée ? En effet, taxer différemment l'activité agricole comme on envisage de le faire pour des activités commerciales, industrielles et de services dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle n'aurait évidemment aucun sens.
Dans ces conditions, on peut supposer que la suppression, pour les collectivités territoriales, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties sera compensée par le transfert d'une fraction d'un impôt national - mais lequel ? - ou bien, plus vraisemblablement, par le versement d'une nouvelle dotation compensatrice.
Si tel devait être le cas, il s'agirait d'un nouveau coup de canif porté à l'autonomie financière et fiscale des communes. Certains estiment même que cette réforme pourrait remettre en cause le fait communal, puisque les maires concernés n'auraient plus beaucoup de responsabilités dans l'établissement de leur budget.
Ainsi un haut responsable de l'Association des maires de France a-t-il affirmé qu'il s'agirait d'un premier pas vers la disparition totale des communes rurales, se demandant même ce qui pourrait rester à celles qui sont intégrées dans des intercommunalités.
Pour ma part, je n'ose croire à ce funeste destin, mais il me paraît évident qu'il est plus aisé d'annoncer des réformes de la fiscalité, surtout de la fiscalité locale, que de les mettre en oeuvre.
Madame la ministre, je souhaite avant tout que le principe constitutionnel d'autonomie financière des communes soit respecté et que les communes rurales n'aient pas à pâtir de cette réforme, ni aujourd'hui ni demain. Pour qu'il en soit bien ainsi, les compensations devraient avoir un caractère historique et être évolutives.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, lors de son déplacement à Murat, le 21 octobre 2004, le Président de la République a annoncé, en présence d'Hervé Gaymard, la nécessité « d'ouvrir avec les représentants des collectivités territoriales une concertation en vue de réformer la taxe foncière sur les propriétés non bâties ». L'objectif de cette réforme viserait la suppression progressive de la taxe pour les exploitants agricoles.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, le Gouvernement est très attaché à l'autonomie financière des collectivités locales. C'est ainsi qu'il a soumis au Parlement une modification constitutionnelle visant à garantir cette autonomie financière, ce qui est désormais le cas avec l'article 72-2 de la Constitution.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a mené à bien la mise en oeuvre de ce principe dans une loi organique. Aussi pouvez-vous lui faire une entière confiance pour travailler avec les élus à une réforme qui soit optimale.
Le Gouvernement est conscient que le produit de cette taxe constitue, vous l'avez d'ailleurs rappelé, une recette importante pour les collectivités locales, en particulier pour les communes rurales.
Je veux vous rassurer, monsieur le sénateur : en cas de suppression de la taxe ou de réduction de son assiette, il va de soi que la réforme devrait respecter l'ensemble des principes relatifs à l'autonomie financière des collectivités territoriales.
Il est donc actuellement prématuré de présenter les grands axes de la réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
En effet, fidèle à sa méthode des « trois D », le Gouvernement entend établir un Diagnostic partagé avec les représentants des collectivités concernées, suivi d'un Dialogue dense ; puis viendra le temps des Décisions.
Aussi je tiens à saluer la tenue de la réunion constitutive, cet après-midi même, au sein de la commission des finances de la Haute Assemblée, du groupe de travail sur la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Je suis persuadée, monsieur le sénateur, que les travaux de cette commission éclaireront utilement le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Je vous remercie de cette réponse qui m'apporte quelques apaisements, madame la ministre. La réflexion se poursuit donc sur le diagnostic, et peut-être aussi approche-t-on de la décision.
Toutefois, j'insiste sur le fait que les collectivités locales ne sont pas très rassurées. Je suis ravi que la commission des finances du Sénat se saisisse de cette question aujourd'hui même, d'autant que son président, M. Jean Arthuis, qui a coprésidé à mes côtés l'assemblée des maires de mon département, a ainsi pu entendre les inquiétudes que suscite ce projet de réforme.
Je vous remercie d'avoir accepté d'engager cette réflexion et j'espère que nous pourrons, ensemble, trouver les solutions adéquates.
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