Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 28/10/2004

M. Georges Mouly appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat sur la problématique du maintien des services publics en milieu rural. Alors que s'est engagée la discussion en seconde lecture du projet de loi en faveur du développement des territoires ruraux, des élus de ces territoires restent confrontés, dans leur gestion quotidienne, aux difficultés de maintenir tel ou tel service (La Poste, les services fiscaux, l'école en milieu rural...). Alors qu'il est question d'instaurer un service minimum dans les services publics, que certains appellent à la modification des commissions départementales des services publics, que les résultats des expérimentations menées dans quatre départements pilotes sont impatiemment attendus, il lui demande comment il envisage de donner quelque lisibilité aux politiques susceptibles de permettre le maintien des services publics en milieu rural.

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Transmise au Secrétariat d'Etat à l'aménagement du territoire


Réponse du Secrétariat d'Etat à l'aménagement du territoire publiée le 03/11/2004

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2004

M. Georges Mouly. Monsieur le secrétaire d'Etat, il n'est pas besoin de rappeler combien le maintien des services publics conditionne pour une bonne part le maintien non seulement d'une qualité de vie mais aussi de la vie même en milieu rural.

Est-ce à dire pour autant que tout doit être maintenu partout en l'état ? Certes non, et ce point de vue est d'ailleurs de plus en plus souvent partagé. En effet, chacun est conscient du fait qu'il faut adapter les services publics plutôt que de les maintenir tous en l'état partout.

Or, en la matière, force est de constater que nous n'avons guère de lisibilité, situation qui conduit d'ailleurs parfois certains maires et autres élus locaux à démissionner.

Une question récurrente se pose donc quant au maintien ou à la présence des services publics. A cet égard, je prendrai un exemple, celui de La Poste.

De toutes les solutions envisageables, celle, de plus en plus souvent admise, de l'agence postale communale a été retenue. La teneur de la convention passée entre La Poste et la commune est cependant un frein bien connu à la mise en place de cette formule, la convention devenant même, après les trois premières années, pénalisante pour la commune.

Le président de La Poste, que j'ai maintes fois saisi, m'a répondu qu'une étude en cours pourrait aboutir à créer des conditions plus favorables pour la commune, et l'on pourrait ainsi aller au-delà des 1 550 agences postales communales actuelles.

La Poste souhaitant maintenir sa présence en 17 000 points de contact, rien ne devrait poser problème en principe. Or, nombreuses sont les situations de crispation.

En effet, qu'en est-il de l'obligation du fonctionnement des commissions départementales ou cantonales de la présence postale ? Je pose la question même si, ici ou là, les choses ne se passent pas trop mal.

Mon intention n'est pas de passer en revue tout ce qui est relatif aux services publics, a fortiori les services au public, mais je m'arrêterai cependant sur les services fiscaux.

Dans un courrier de juin 2004, le ministre concerné précise ceci : « Un rapprochement des centres des impôts et des recettes est en cours sur la période 2004-2005. Il s'agit-là d'un véritable changement de perspectives puisque c'est l'administration qui adapte son organisation à l'usager et non l'inverse. » Or cela conduit à la fermeture de perceptions, fermeture qui a provoqué, en Creuse, les démissions que l'on sait !

Je ne m'appesantirai pas sur l'évolution des centres EDF dont une partie des services consiste en la réception du public.

Dans l'optique du maintien des services publics, ou plus précisément de leur évolution, je veux parler du manque de lisibilité.

S'agissant de La Poste, j'ai cité les commissions départementales et cantonales de la présence postale mais, plus généralement, c'est la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics qui opère.

Année après année, avait aussi été évoquée l'idée de créer des maisons des services publics. En tout état de cause, la volonté que rien ne soit fait sans concertation préalable avec les élus concernés a constamment été manifestée.

Le manque de lisibilité concerne aussi le travail qui devrait être conduit dans les départements pilotes où l'expérimentation a été mise en place et à propos desquels le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire précisait dans un courrier, voilà moins d'un an, qu'il souhaitait que les premières propositions d'action puissent être identifiées avant la fin de l'année 2003. Or nous sommes à la fin de l'année 2004 !

Ce même ministre indiquait encore : « Dans un courrier adressé le 2 octobre 2003 à l'ensemble des représentants des services publics concernés, j'ai insisté sur la nécessité pour chaque organisme de veiller à ce que les éventuelles réorganisations qui pourraient être programmées dans ces départements s'inscrivent dans le cadre de la démarche qui sera menée à bien dans les prochains mois. J'ai eu récemment l'occasion de rappeler que cette même nécessité s'imposait aux différents ministères concernés. »

C'est dans ce contexte, et dans celui aussi de l'adoption du texte relatif au développement des territoires ruraux, qu'il me semble nécessaire de mieux fixer les contours et la teneur même d'une démarche politique visant au maintien ou à la mise en place d'un réseau de services publics de qualité en zone rurale. Au fond, qui doit faire quoi ? Qu'est-ce qui peut être imposé et à qui ? Il me semble qu'une démarche politique d'ensemble doit être définie.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, l'accessibilité des services publics en milieu rural est essentielle à la vitalité de ces territoires. Des orientations précises ont été fixées lors des comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire, ou CIADT, du 13 décembre 2002 et du 3 septembre 2003.

Ces orientations reposent sur un objectif simple, mais essentiel : satisfaire les besoins de l'usager sans préempter les moyens d'y arriver.

Plus précisément, ces orientations se déclinent selon quatre axes que je voudrais développer quelque peu pour répondre à votre attente en matière de lisibilité.

Premièrement, il faut renforcer les cadres nationaux d'organisation entre l'Etat, les associations d'élus et les grands réseaux d'opérateurs.

Deuxièmement, il faut consolider les outils de pilotage locaux de l'organisation des services publics.

Troisièmement, il faut appuyer la polyvalence de l'accueil.

Enfin, quatrièmement, il importe de renforcer le traitement à distance des dossiers, les moyens modernes de communication devant être utilisés en vue d'une meilleure adaptabilité.

Afin de définir une démarche pragmatique sur ces sujets, le Gouvernement s'est appuyé sur des expérimentations qui ont été conduites dans quatre départements, dont celui de la Corrèze.

Ces expérimentations ont été lancées sur la base d'un accord national associant l'ensemble des grands opérateurs de services publics - une quinzaine.

Le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux nous permet de capitaliser un certain nombre d'enseignements de ces expérimentations ; je me félicite d'ailleurs de l'excellent travail qui a pu être réalisé avec la Haute Assemblée sur ces questions.

S'agissant des cadres nationaux d'organisation, ce projet de loi prévoit que des objectifs d'aménagement du territoire seront fixés aux grands opérateurs de services publics d'ici au mois de décembre 2005. Les projets de réorganisation des services publics devront donc respecter ces objectifs.

S'agissant de la concertation locale, dont on a beaucoup parlé ces derniers temps, elle est renforcée sous l'égide du préfet et dans le cadre de la commission départementale des services publics.

Cette concertation avec les acteurs de terrain, et notamment les élus, doit précéder toute décision de réorganisation des services publics. Elle ne doit pas être un lieu où sont entérinées les décisions, ce qui était le cas auparavant, mais doit au contraire constituer l'occasion d'un débat permettant de trouver des solutions réalistes adaptées aux situations locales.

A l'issue de cette concertation, le préfet peut saisir le ministre de tutelle et le ministre chargé de l'aménagement du territoire pour remettre en cause tout projet de réorganisation.

En matière de polyvalence de l'accueil, le régime des maisons des services publics a été assoupli afin de faciliter leur fonctionnement.

Dans le même esprit, les agents de la fonction publique territoriale des communes de moins de 3 500 habitants pourront cumuler un emploi public et un emploi privé. C'est le cas pour ceux de La Poste, entreprise que vous avez évoquée, monsieur Mouly.

Enfin, s'agissant du traitement des dossiers à distance, le programme ADÈLE lancé par le Gouvernement en matière d'administration électronique facilite l'accès aux services publics de manière spectaculaire. Nous pouvons prendre l'exemple du numéro de renseignements administratifs « 39-39 », qui est maintenant en place sur tout le territoire depuis le 1er octobre.

J'ai également pu constater, lors d'une visite dans un chef-lieu de canton du département du Cantal, département voisin du vôtre, monsieur Mouly, comment, par le biais des maisons des services publics qui s'étaient dotées de visioguichets, on pouvait accéder à des services et dialoguer à distance avec un interlocuteur, comme on le ferait dans un guichet traditionnel. Ce système fonctionne bien.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement suit les orientations qu'il s'est fixées, dans le but de répondre aux besoins nouveaux de l'usager.

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, qui a le mérite d'être précise et concrète.

Fixer un objectif précis aux grands opérateurs est une bonne mesure. Il est également souhaitable que les commissions départementales ou cantonales des services publics fonctionnent correctement.

Lorsque ces commissions sont réunies - c'est d'ailleurs rare dans de nombreux départements -, leur fonctionnement laisse aujourd'hui plutôt à désirer, alors qu'elles constituent un moyen d'échanges et peuvent proposer différentes solutions. Obliger la mise en place de ces commissions est une bonne chose.

Année après année, sous tous les gouvernements, on a beaucoup parlé des maisons des services publics, qui constituent en quelque sorte un guichet unique. Je ne sais pas si ces maisons sont nombreuses en France. En tout cas, elles connaissent vraiment des difficultés pour se mettre en place, ce qui est dommage, car c'est une excellente formule.

S'agissant du traitement à distance des dossiers, il recouvre certes toutes les vertus que vous avez indiquées, monsieur le secrétaire d'Etat, mais il n'est pas encore vraiment entré dans les moeurs en milieu rural. Toutefois, il est vrai, il s'agit là d'une bonne perspective.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite que, grâce à toutes les précisons que vous nous avez apportées, les choses se passent à l'avenir mieux qu'elles ne se passent actuellement, dans ma région tout au moins.

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