Question de M. ALFONSI Nicolas (Corse-du-Sud - RDSE) publiée le 15/10/2004
Question posée en séance publique le 14/10/2004
M. Nicolas Alfonsi. Les citoyens corses qui, voici un an, malgré les recommandations du chef de l'Etat, celles de la majorité des partis nationaux, celles des nationalistes, ont fait connaître à la nation leur attachement à la République et leur souci de tourner la page sont aujourd'hui partagés entre le désarroi et la colère.
Que le matraquage publicitaire pour la promotion d'un film récent transforme les souffrances d'une région française en divertissement dérisoire, qu'il puisse suggérer, par contraste, que les bombes et les assassinats auraient disparu, tout cela en dit long sur l'état de notre délitement.
Ne doutez point de ce désarroi.
L'extrême banalisation de la violence, ce cancer de l'île, rendra le rétablissement républicain plus difficile et plus douloureux. Craignez que, par des glissements successifs, vous ne puissiez plus, demain, mettre un terme aux désordres.
Aux attentats contre les services publics, les gendarmeries, les particuliers, répondent, comme en écho, des condamnations impuissantes des élus, mais aussi le silence assourdissant de l'Etat.
Un groupe de nationalistes force la clôture, tenaille en main, du terrain militaire d'Aspretto sous l'oeil de la caméra de France 3 appelée pour la circonstance, y tient conférence de presse. Aucun communiqué du parquet n'apprendra à l'opinion l'ouverture d'une information, comme si l'on doutait déjà de l'absence de résultat.
Deux douzaines de personnes empêchent les navires d'une société appartenant à l'Etat de naviguer. Faute d'évacuer les personnels qui réclament la « corsisation » des emplois, voilà le Premier ministre contraint de rendre un arbitrage pour mettre un terme à la cacophonie.
On pourrait multiplier les exemples de cette vacuité.
Je ne le ferai pas, car je sais que, dans ces dossiers difficiles, l'intérêt national commande de dépasser les clivages partisans.
Nous avons apprécié la sobriété - cela nous a changé de la période précédente -, qu'a manifestée le ministre de l'intérieur, tout comme sa ferme volonté de réduire les auteurs et les actes de violence.
Nous savons qu'il n'y a pas dans ce domaine d'obligation de résultat, mais qu'il est indispensable, quand bien même le rétablissement sera difficile, que l'Etat soit présent.
L'opinion est désabusée.
Evitez de laisser le champ libre à la surenchère séparatiste. Réaffirmez au sommet de l'Etat les grandes lignes de votre politique.
Le moment est venu : dites quelque chose, parlez, monsieur le garde des sceaux, les Corses vous en sauront gré.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 15/10/2004
Réponse apportée en séance publique le 14/10/2004
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Chacun connaît, ici comme ailleurs, la situation en Corse, une situation difficile qui exige détermination, conviction, et cela dans la durée.
Si les attentats n'ont jamais cessé en Corse, je veux tout de même rappeler qu'ils ont diminué de 40 % par rapport à l'an dernier. C'est encore beaucoup trop, mais cette baisse est significative. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)
C'est en particulier encore beaucoup trop lorsqu'il s'agit, comme on l'a vu ces dernières semaines, d'attentats contre des gendarmeries, à Cauro, à Ventiseri, à Montesoro, ou encore contre une inspection d'académie, en l'occurrence celle de Corse-du-Sud.
Le Gouvernement est très attentif à la situation de ses agents qui ont été menacés, ou qui sont victimes, ainsi qu'à la situation de leurs riverains.
Il est par ailleurs indispensable de réaffirmer la détermination des forces de l'ordre, ce que je fais au nom de Dominique de Villepin qui, comme vous le savez, ne peut être présent cet après-midi.
Je veux rappeler que 1 621 personnes ont été interpellées en 2003, contre 1 488 l'an dernier, soit près de 10 % de plus.
Nous poursuivrons inlassablement la lutte contre le terrorisme et, de manière concomitante, le démantèlement d'activités mafieuses qui sont parfois liées au terrorisme.
Enfin, monsieur le sénateur, le Gouvernement a la conviction que la Corse attend de l'Etat non seulement du sang-froid, mais aussi de la proximité, d'abord en restant fidèle au principe républicain, et je sais combien, monsieur le sénateur, vous y êtes attaché comme l'ensemble des élus de Corse ; ensuite, en se mettant au service de la Corse et des Corses pour le développement de l'île et pour surmonter ses handicaps naturels ; en respectant aussi ses engagements financiers, et vous savez ce que cela signifie ; enfin, en soutenant, comme il se doit, dans un partenariat positif, la collectivité territoriale dans ses efforts pour le développement de l'île.
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