Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 26/08/2004
M. Jean-Louis Masson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que le délit " d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste " est relativement imprécis. Son application peut conduire à des décisions arbitraires ne reposant sur aucun élément concret. En 1999, dans un rapport sur la législation antiterroriste en France, la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) a d'ailleurs demandé l'abrogation de la loi de 1996. Elle s'est fait l'écho de l'opinion de nombreux avocats en estimant qu'il y avait un risque d'extension arbitraire d'un champ d'application des procédures et du nombre des personnes inculpées " sans aucune présomption de commission - d'actes terroristes - au sens exact du terme ". En fait, trop souvent, l'application qui est faite de ce délit conduit, selon la FIDH, à des conclusions juridiques reposant " sur un maximum de spéculations, de déductions et d'insinuations ". Dans le climat d'hystérie sécuritaire qui règne actuellement à l'encontre des intégristes musulmans, ce constat est plus vrai que jamais. Il souhaiterait donc qu'il lui indique s'il ne pense pas qu'il conviendrait de mieux préciser le délit susvisé, ainsi que ses conditions d'application et de limiter également les possibilités d'arbitraire dans la mise en détention provisoire des personnes concernées.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 17/02/2005
Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire savoir à l'honorable parlementaire que le délit d'association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme est prévu par l'article 421-2-1 du code pénal qui dispose que constitue un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 du code pénal. Ce délit est donc tout d'abord circonscrit à une certaine catégorie d'infractions limitativement énumérées dans les articles précités et doit être caractérisé, pour être constitué contre une personne, par son appartenance démontrée à un groupe qualifié de terroriste et par la mise en place de moyens logistiques, humains, financiers, d'actes préparatoires permettant ou facilitant la planification, la préparation ou la réalisation de projets terroristes éventuels, ce qui limite son champ d'application. En outre, cette incrimination, instaurée dans le code pénal par la loi du 22 juillet 1996, est la reprise, dans le champ du terrorisme, du délit d'association de malfaiteurs de droit commun de l'article 450-1 de ce même code. Le garde des sceaux assure de même l'honorable parlementaire que, dans ces dossiers qui font l'objet d'un suivi attentif de la part de ses services, l'application du délit d'association de malfaiteurs par les juridictions spécialisées se fait avec la plus grande rigueur et sur le fondement de faits précis et circonstanciés. Toute décision tendant à utiliser cette incrimination puis à placer en détention provisoire une personne ne saurait enfin être qualifiée d'arbitraire puisqu'elle est nécessairement prise par une juridiction indépendante et susceptible de contestation par le mécanisme des voies de recours. Enfin, le garde des sceaux rappelle à l'honorable parlementaire que la lutte contre le terrorisme est une priorité nationale et qu'il convient, pour ce faire, de se doter de moyens répressifs efficaces reposant en particulier sur le démantèlement très en amont des groupes criminels avant même la commission ou la tentative de commission d'attentat, au lieu de se concentrer sur des individus ou des actes isolés. C'est grâce à ce type de moyens associés au respect des droits de la défense et du procès équitable que le modèle judiciaire français de lutte contre le terrorisme reste aujourd'hui incontesté, sur la scène européenne et internationale.
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