Question de M. MURAT Bernard (Corrèze - UMP) publiée le 28/07/2004
M. Bernard Murat souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire sur les difficultés auxquelles sont confrontés les maires de communes rurales pour respecter les normes en matière de défense incendie. La circulaire interministérielle n° 465 du 10 décembre 1951 précise les dispositions visant à assurer dans les meilleures conditions l'utilisation du réseau d'eau potable pour la lutte contre l'incendie. A ce titre, la note de doctrine adressée aux maires et élaborée par les services de l'Etat en concertation avec les SDIS tend à définir les modalités d'instruction des actes d'urbanisme relatives à la prise en compte de ce risque. Toutefois, ces textes révèlent de nombreuses difficultés d'application. Ainsi, les réseaux d'adduction d'eau potable ayant été réalisés et dimensionnés pour assurer la desserte des habitants ne semblent pas adaptés aux besoins réels. De surcroît, la création de réserves artificielles, en cas d'insuffisance de prise d'eau, l'équipement et l'aménagement des points d'eau pour permettre l'accessibilité des engins ont un coût souvent très élevé pour les petites communes rurales. Enfin, dans les communes ne possédant pas de POS ou de PLU, une interprétation stricte des textes entraîne le refus d'octroi du permis de construire pour des constructions d'habitations individuelles, ce qui entrave le développement des zones rurales, en application de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme. De fait, de nombreuses questions écrites ont été déposées sur ce sujet et les services du ministère de l'intérieur n'ont pas apporté de réponse convaincante aux maires de ces communes rurales. Un amendement, dont il est l'auteur, examiné dans le cadre du projet de loi relatif à la sécurité civile et qui avait pour objet de prévoir pour les plus petites communes un système dérogatoire permettant l'obtention d'un permis de construire en dépit de l'inobservation des normes en matière d'incendie, a attiré l'attention du Gouvernement qui s'est engagé à intervenir. Ainsi, à l'heure des débats parlementaires concernant l'adoption du projet de loi relatif au développement du monde rural, il lui demande de lui indiquer la position ministérielle sur cette question et de lui préciser les perspectives d'action, ce afin de ne pas pénaliser davantage des communes qui éprouvent déjà des difficultés à attirer la population sur leur territoire.
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Transmise au Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales
Réponse du Ministère déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion publiée le 20/10/2004
Réponse apportée en séance publique le 19/10/2004
M. Bernard Murat. Monsieur le président, je voudrais tout d'abord m'associer à mes collègues qui ont salué votre première présidence et vous souhaiter une pleine réussite dans vos nouvelles fonctions.
M. le président. Je vous remercie, mon cher collègue.
M. Bernard Murat. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés auxquelles sont confrontés les maires de communes rurales pour respecter les normes en matière de défense incendie.
M. le secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire nous a rendu visite en Corrèze, il y a quelques semaines. Nous avions alors pu aborder avec lui ce problème sur le terrain. C'est la raison pour laquelle j'ai dû modifier quelque peu le texte de ma question.
La circulaire interministérielle n° 465 du 10 décembre 1951 précise les dispositions visant à assurer dans les meilleures conditions l'utilisation du réseau d'eau potable pour la lutte contre l'incendie.
A cet égard, et ce sera ma première question, a-t-on réellement besoin d'utiliser de l'eau potable pour lutter contre les incendies ?
A ce titre, la note de doctrine adressée aux maires et élaborée par les services de l'Etat, en concertation avec les SDIS, tend à définir les modalités d'instruction des actes d'urbanisme relatives à la prise en compte de ce risque. Toutefois, ces textes révèlent de nombreuses difficultés d'application.
Ainsi, les réseaux d'adduction d'eau potable ayant été réalisés et dimensionnés pour assurer la desserte des habitants ne semblent plus adaptés aux besoins réels.
De surcroît, la création de réserves artificielles, en cas d'insuffisance de prise d'eau, ainsi que l'équipement et l'aménagement des points d'eau pour permettre l'accessibilité des engins, ont un coût souvent très élevé pour les petites communes rurales, voire pour les entreprises qui voudraient s'installer dans ces communes rurales.
Enfin, dans les communes ne possédant pas de plan d'occupation des sols ou de plan local d'urbanisme, une interprétation stricte des textes entraîne le refus d'octroi du permis de construire pour des constructions d'habitations individuelles, ce qui entrave le développement des zones rurales, en application de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme, et va complètement à l'encontre de la politique voulue par le Gouvernement.
De fait, de nombreuses questions écrites ont été déposées sur ce sujet et les services du ministère de l'intérieur n'ont pas apporté de réponse convaincante aux maires de ces communes rurales.
J'ai déposé un amendement, il y a quelques mois, examiné dans le cadre du projet de loi relatif à la sécurité civile, qui avait pour objet de prévoir pour les petites communes un système dérogatoire permettant l'obtention d'un permis de construire en dépit de l'inobservation des normes en matière d'incendie.
A cette occasion, le Gouvernement s'était engagé à intervenir en la matière et à réfléchir à ce problème afin de tenter de le résoudre. Où en sommes-nous aujourd'hui ?
Ainsi, à l'heure où les débats parlementaires se focalisent autour du problème du développement du monde rural, ce qui avait justifié la visite de M. Copé en Corrèze, je vous demande de nous indiquer quelle est la position ministérielle sur cette question.
Lors de la dernière assemblée générale de l'association des maires de Corrèze, les élus locaux, un peu frustrés par les réponses du SDIS les renvoyant soit à leur responsabilité pénale, soit au cadre rigide de la loi, m'ont demandé d'intervenir à nouveau avec insistance pour que le Gouvernement leur réponde enfin, prenne ce problème véritablement en considération et s'engage, tout au moins, à dépoussiérer le dispositif en vigueur.
Je crois à cet égard m'exprimer au nom de nombre de mes collègues sénateurs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Jean-François Copé, retenu à l'Assemblée nationale.
Le problème que vous posez est réel : la circulaire de 1951 crée des obligations en terme de sécurité incendie pour tous ceux qui souhaitent construire leur logement dans les petites communes rurales. Elle impose ainsi la présence d'un réseau d'eau. Mais vous avez raison, monsieur le sénateur, de dire qu'il ne faut pas forcément recourir à l'eau potable.
Cette circulaire impose également la présence de réserves d'eau à proximité, pour permettre aux sapeurs-pompiers d'accomplir leur mission de secours face au risque d'incendie.
Vous avez rappelé que ce sujet n'est pas nouveau. Nous l'avons d'ailleurs évoqué ici même, lors du débat sur le projet de loi de modernisation de la sécurité civile. Et s'il n'est pas nouveau, c'est parce que ce problème est extrêmement difficile à résoudre.
Chacun convient qu'il ne peut être question pour l'Etat de proposer une « sécurité au rabais » pour les habitants des zones rurales, souvent difficiles d'accès. Je rappelle également que les incendies domestiques sont la cause de 800 décès par an en France. Nous porterions tous une lourde responsabilité en décidant d'assouplir des règles dont la portée est prioritairement d'assurer la sécurité de nos concitoyens.
A l'inverse, il ne saurait non plus être question d'imposer des équipements surdimensionnés dans tous les centres de secours des zones rurales, pour faire face à l'insuffisance de la ressource en eau à proximité des habitations éloignées. Les représentants des collectivités locales, qui financent les SDIS, trouveraient à juste titre le remède encore pire que le mal.
A la suite du débat que nous avions eu ici même le 17 juin dernier, le Gouvernement explore toutes les pistes possibles pour apporter une réponse au problème que vous avez rappelé.
Au terme des premières réflexions engagées sur ce sujet, je suis convaincue que si nous ne pouvons pas transiger sur le niveau de sécurité, nous avons en revanche la possibilité de revoir les moyens pour y parvenir.
C'est le sens de la concertation engagée, à la demande de M. le ministre de l'intérieur, par la direction de la défense et de la sécurité civiles avec les élus et les sapeurs-pompiers pour faire évoluer le texte de la circulaire de 1951.
Je crois que la notion d'objectif de sécurité doit être préférée au simple recensement des moyens à mettre en oeuvre. Cet objectif doit être apprécié en fonction des situations locales. Les exigences ne peuvent pas être les mêmes si l'on construit sa maison à 500 mètres d'un centre de secours ou si l'on souhaite s'installer dans un lieu reculé et très difficile d'accès.
Le sens de la démarche que nous avons engagée est donc bien de laisser au niveau local, avec l'expertise des SDIS, le soin de décider des modalités à mettre en oeuvre pour satisfaire l'exigence de sécurité, tout en continuant, au plan national, à définir la norme à atteindre et à assurer un niveau élevé de sécurité pour chaque citoyen.
Vous comprendrez, monsieur le sénateur, qu'une telle démarche ne peut pas être mise en place en quelques semaines et qu'elle demande de la part des services du ministère une attention très vigilante et une étroite concertation avec les acteurs du secours et les élus locaux.
Mais je peux vous confirmer que le Gouvernement sera très attentif à ce que ce texte de 1951 soit enfin dépoussiéré - pour employer le même terme que vous - et qu'une vraie perspective soit ouverte pour ne plus entraver le développement des communes rurales.
M. le président. La parole est à M. Bernard Murat.
M. Bernard Murat. J'ai entendu la réponse de Mme la ministre avec d'autant plus de plaisir que je vais enfin pouvoir dire aux élus locaux et maires de Corrèze que ce texte va enfin être dépoussiéré.
Ils comprendront également que cela demandera quelque temps. Si, en 1951, ce problème était moins crucial, il faut dire qu'il le devient actuellement de plus en plus.
Madame la ministre, au-delà de la sécurité incendie pour les habitations, ce texte comporte une sorte d'ambivalence au terme de laquelle un maire qui a la chance de voir arriver dans sa commune un entrepreneur ou un jeune désireux de continuer l'entreprise familiale se voit confronté à des réponses kafkaïennes, de la part du SDISS en particulier.
Pour moi, la vérité est, surtout dans nos campagnes, là où se trouve le bon sens.
Il va falloir que le ministère de l'intérieur donne aux responsables des SDISS des consignes pour qu'ils ne se contentent pas d'une application rigide du règlement. En fin de compte, ils sont là pour protéger les communes et pour faire en sorte que la sécurité soit la meilleure possible.
Comme vous l'avez parfaitement senti, mieux vaudrait, dans certains cas, aborder les choses de plus près ou, plutôt, dans le bon sens. Il faudrait surtout faire comprendre que l'objet de cette concertation est d'ancrer, de pérenniser le développement économique sur les territoires ruraux.
Conscient que tel est bien le souci du Gouvernement, je vous remercie, madame la ministre, de la réponse que vous voudrez bien m'apporter.
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