Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 28/04/2004
M. Roland Courteau expose à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales que le règlement 1493/99 établissant les règles de l'OCM viticole de l'Union européenne, dans la partie qui concerne la gestion du potentiel de production, prévoit, d'une part, que les Etats membres doivent remettre à la Commission un rapport sur ce potentiel et sur la façon de régulariser les plantations illicites et que, d'autre part, l'échéance extrême pour la remise de ce rapport est fixée au mois de juin 2004. Il lui précise que, selon certains experts, les superficies que couvriraient ces plantations illicites en Italie, Grèce et Espagne s'élèveraient à quelque 100 000 hectares. On mesure donc toute l'importance du préjudice économique des vignerons, notamment français, lesquels, ayant pourtant toujours respecté l'ensemble des contraintes nécessaires à une gestion saine de la filière, risquent d'être amenés, face aux difficultés qu'ils rencontrent, à recourir à l'arrachage et à l'abandon de leur métier. Il lui demande donc quelles initiatives la France entend prendre permettant de conduire l'Union européenne à exiger l'arrachage de ces plantations illicites.
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Réponse du Secrétariat d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales publiée le 19/05/2004
Réponse apportée en séance publique le 18/05/2004
M. Roland Courteau. Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, selon un rapport de la Commission européenne sur la gestion des droits de plantation, on dénombrerait en Europe quelque 100 000, voire 150 000 hectares de plantations illicites de vignes situées en Espagne, en Grèce et, pour les deux tiers, en Italie.
Il s'agit là d'un potentiel de production de l'ordre de cinq à six millions d'hectolitres qui échappe à toute maîtrise européenne des plantations ainsi qu'aux différents mécanismes de régulation.
Son impact est patent en matière de déséquilibre du marché. Il est donc également très préjudiciable sur le plan économique.
En France, la profession est d'autant plus scandalisée d'une telle situation qu'elle a toujours respecté, en ce qui la concerne, l'ensemble des contraintes nécessaires à une gestion saine de la filière et qu'elle est régulièrement soumise à de nombreux contrôles que je qualifierai de pointilleux.
Notez bien la comparaison, monsieur le secrétaire d'Etat : 100 000 à 150 000 hectares de plantations illicites chez nos partenaires contre 127 hectares en France.
Ainsi, d'un côté, en France, on respecte règles et contraintes, et d'un autre côté, chez nos partenaires européens, on laisse s'installer impunément des vignobles interdits.
Dans ces conditions, comment s'étonner que la profession s'insurge à la suite de certaines informations faisant état d'un projet de la Commission européenne qui viserait à régulariser lesdites plantations illicites ? Cela serait inacceptable ; cela ne sera d'ailleurs pas accepté, monsieur le secrétaire d'Etat.
Que les choses soient claires : tout laxisme ou toute sorte d'amnistie à l'égard de telles opérations frauduleuses serait gravissime et équivaudrait à un encouragement à la fraude. L'impact serait donc désastreux en tout point.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous connaissez le contexte de crise de cette production. Vous n'ignorez pas les difficultés qu'elle rencontre sur le marché intérieur en matière de communication et de promotion.
Vous savez également à quelle rude concurrence nous sommes confrontés à l'exportation de la part des pays du Nouveau monde, d'un côté, et de nos propres partenaires européens, d'un autre côté, et notamment, comme par hasard, de l'Italie et de l'Espagne !
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, la profession veut bien se battre, mais les armes ne doivent pas être inégales. Or force est de constater qu'elles le sont, ce qui ne peut être accepté plus longtemps.
Les instances européennes se doivent d'être intransigeantes envers ceux, souvent les mêmes, d'ailleurs, qui ne respectent pas les règles.
Il n'est donc pas acceptable que de telles opérations puissent être régularisées. La seule réponse qui puisse être apportée à cette situation, c'est l'arrachage des plantations illicites.
J'en viens à ma question, monsieur le secrétaire d'Etat : le Gouvernement entend-il faire preuve, sur ce dossier, de la plus grande fermeté vis-à-vis des instances européennes ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur Courteau, croyez que je suis très sensible, comme Hervé Gaymard et l'ensemble du Gouvernement, à la situation actuelle de la viticulture en France, notamment au regard de la concurrence à l'exportation que vous évoquiez. La concurrence des vins du Nouveau monde et d'Europe est bien réelle. Une large réflexion est conduite au sein même de la profession, en liaison avec le Gouvernement, sur les réponses à apporter pour soutenir le secteur viticole. Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir, comme cela a déjà été le cas, notamment dans l'enceinte du Sénat, lors du débat sur le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.
Mais, aujourd'hui, vous me posez une question bien précise qui concerne les plantations illicites de vignes dans l'Union européenne. Ce sujet a été évoqué notamment lors de la récente mise à sac des locaux des douanes de Carcassonne-Salvaza ; il a même été invoqué pour justifier cette opération.
Je voudrais condamner sans appel une telle mise à sac. Cette action manifeste certainement l'inquiétude d'un certain nombre de professionnels. Pour autant, parce qu'elle est dirigée contre les services de l'Etat qui accompagnent les opérateurs de la filière viticole dans leurs activités, elle dessert en réalité tout le secteur.
S'agissant maintenant du fond de votre question, qui concerne les plantations illicites de vignes dans l'Union européenne, Hervé Gaymard a eu l'occasion de s'exprimer très clairement sur ce sujet lors d'un déplacement récent dans l'Aude.
La Commission européenne vient en effet de publier un rapport sur les plantations de vignes dans l'Union européenne. Ce rapport fait le point, entre autres sujets, sur les plantations illicites recensées par les Etats membres et révèle effectivement l'existence de surfaces importantes sur lesquelles aucun élément chiffré n'avait été jusqu'à présent rendu public. Vous avez cité des chiffres que je ne rappellerai pas mais qui sont très significatifs.
Vous m'interrogez sur la position de la Commission et, le cas échéant, du Gouvernement. Que ce soit clair : il n'existe à ce jour aucune proposition de la Commission concernant ces hectares illicites, ni dans un sens ni dans l'autre.
En tout état de cause, aux yeux du Gouvernement français, il ne peut être question que le conseil des ministres européens de l'agriculture traite ce problème de façon unilatérale, sans contrepartie équitable pour notre propre viticulture, et surtout sans un débat plus global sur l'OCM viticole et sur ses nécessaires améliorations.
Nous attendons donc de savoir ce que la Commission peut être conduite à proposer dans cette affaire, mais il va de soi - je crois répondre ainsi à votre inquiétude - que le Gouvernement est extrêmement clair à propos de ces éventuelles propositions et ne saurait accepter quoi que ce soit, quelle que soit la situation, sans contrepartie équitable pour notre propre viticulture, au regard des conséquences que peuvent représenter, effectivement, la présence de ces hectares de plantations illicites dans un certain nombre de pays de l'Union européenne. Je pense donc que la situation est claire.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau
M. Roland Courteau. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. A mes yeux, la situation n'est pas aussi claire que vous le dites.
Nous aurons l'occasion de revenir sur vos engagements. En tout cas, je voulais vous prévenir.
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