Question de M. REINER Daniel (Meurthe-et-Moselle - SOC) publiée le 06/04/2004
M. Daniel Reiner attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences du séisme qui a touché le sud de la Meurthe-et-Moselle le 22 février 2003. De nombreux maires de communes qui ont subi des dégâts se sont étonnés de recevoir un avis défavorable de la commission interministérielle alors que la situation objective de leur commune aurait justifié, en toute logique, un avis contraire. Or, cet avis pénalise leurs administrés qui attendent le classement de la commune en état de catastrophe naturelle pour se faire rembourser par leur compagnie d'assurance, à due concurrence des dégâts subis. Il apparaît, au total, que l'étude réalisée par le bureau central sismologique français de Strasbourg n'a pas été réalisée de manière suffisamment exhaustive et que les formulaires d'enquête macrosismique, remplis dans l'urgence à la demande de la préfecture alors qu'il était encore impossible d'avoir une connaissance totale de l'ensemble des dégâts, ont été certainement déterminants pour fonder l'avis de la commission interministérielle. En effet, très peu de visites d'experts sur le terrain ont été réalisées. Il souhaite obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur ce dossier en particulier et, plus généralement, sur ce que le Gouvernement envisage pour améliorer et renforcer la transparence de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. En effet, dans la plupart des cas, ce sont les élus locaux qui apparaissent responsables de ces situations aux yeux de leurs administrés, alors que les possibilités de recours sont quasiment inexistantes.
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Réponse du Secrétaire d'Etat aux droits des victimes publiée le 28/04/2004
Réponse apportée en séance publique le 27/04/2004
M. Daniel Reiner. Madame la secrétaire d'Etat, ma question est relative aux suites du séisme qui a touché l'est de la France, en particulier le sud de mon département, la Meurthe-et-Moselle, le 22 février 2003. Ce séisme a endommagé un assez grand nombre de bâtiments dans la mesure où, je le rappelle, il a atteint une magnitude de 5,4 sur l'échelle de Richter.
A la suite de ce tremblement de terre, plus de deux cents communes ont sollicité la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Seules vingt-trois d'entre elles ont reçu un avis favorable de la commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle par des décisions du 28 mai, pour neufs communes, du 16 juillet, pour deux communes, et du 18 septembre 2003, pour douze communes.
De nombreux maires de communes qui ont subi des dégâts se sont étonnés de recevoir un avis défavorable de la commission interministérielle alors que la situation objective de leur commune aurait justifié, en toute logique, un avis contraire. Or, naturellement, cet avis pénalise leurs administrés, qui attendent le classement de la commune en état de catastrophe naturelle pour se faire rembourser par leur compagnie d'assurance, à due concurrence des dégâts subis.
A la lecture de la note préliminaire relative à ce séisme, établie par le Bureau central sismologique français de Strasbourg, il apparaît que l'enquête menée conforte largement cette impression d'incohérence et d'opacité qui préside à la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. La manière dont est établi ce rapport est pourtant primordiale, car les avis de la commission se fondent essentiellement sur ses conclusions.
La cartographie des communes retenues et non retenues est particulièrement inexplicable pour les habitants. Bien souvent, les parties urbanisées des communes sont limitrophes et les bâtiments ont subi les mêmes dégâts. Comment, alors, expliquer aux citoyens qu'à 100 mètres de distance ils seront ou ne seront pas remboursés des dommages qu'ils ont subis ?
Une telle situation ne peut que laisser, au sein des populations concernées, un sentiment de traitement inéquitable pour des situations pourtant comparables et d'une procédure incohérente. Cela conduit les citoyens à mettre en cause la responsabilité de leurs propres élus locaux.
Il apparaît que l'étude réalisée par le Bureau central sismologique français de Strasbourg n'a pas été réalisée de manière suffisamment exhaustive. En outre, les formulaires d'enquête macrosismique remplis dans l'urgence, à la demande de la préfecture, par les maires alors qu'il était encore impossible d'avoir une connaissance totale de l'ensemble des dégâts ont été très certainement déterminants pour fonder l'avis de la commission interministérielle. En effet, très peu de visites d'experts sur le terrain ont été réalisées : à ma connaissance, trois seulement.
Au surplus, les maires de mon département ont été informés de l'avis défavorable de la commission interministérielle par une simple lettre du préfet et n'ont jamais été destinataires de l'arrêté interministériel constatant officiellement l'état de catastrophe naturelle. Or ce document indiquant la liste des communes retenues est seul susceptible de recours devant les juridictions administratives.
Bref, l'information est pour le moins peu transparente, voire déficiente, et la décision finale inéquitable.
Dans un courrier commun avec M. François Guillaume, député de Meurthe-et-Moselle, en date du 3 décembre dernier, j'avais alerté le ministre de l'intérieur sur ce sujet et relayé les demandes des maires, qui souhaitaient au moins rencontrer les experts du Bureau central sismologique français de Strasbourg pour obtenir des explications fiables. Je m'étonne, d'ailleurs, de n'avoir obtenu aucune réponse à cette lettre.
J'ai, par la suite, informé de ces difficultés le président de la commission des affaires économiques de notre assemblée, qui, vu l'importance du sujet, a lui-même saisi les présidents des commissions des lois et des finances.
Ma question est simple, madame le secrétaire d'Etat : s'agissant d'une compétence de l'Etat, j'aimerais obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur ce dossier en particulier et, plus généralement, sur ce que le Gouvernement envisage pour améliorer et renforcer la transparence de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. En effet, dans la plupart des cas, ce sont les élus locaux qui apparaissent responsables de ces situations aux yeux de leurs administrés, alors que leurs possibilités de recours sont inexistantes.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences du séisme qui a touché le sud du département de Meurthe-et-Moselle, le 22 février 2003. Celui-ci m'a chargé de vous apporter les précisions suivantes.
Le rapport du Bureau central sismologique français, le BCSF, sur lequel s'est appuyée la commission interministérielle pour statuer sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a été établi conformément aux règles communément admises en la matière. Les formulaires concernant l'enquête macrosismique ont été adressés à près de 8 500 communes, réparties dans vingt départements. Les services postaux les plus proches de l'épicentre disposaient également de formulaires et l'adresse du site Internet du BCSF a été très largement diffusée par les radios, la presse et les télévisions. Chacun a donc pu faire part de ses observations sur le séisme du 22 février 2003.
Pour des raisons de fiabilité de l'information recueillie, il était important que les observations soient collectées dans les jours qui ont suivi le séisme. Le BCSF a ainsi pu produire un rapport dans des délais raisonnables, permettant alors à la commission interministérielle de statuer sur ce phénomène dès le mois de mai 2003. La rapidité dans le traitement du dossier a permis d'apporter une réponse diligente aux personnes sinistrées et, le cas échéant, d'ouvrir les droits à indemnisation.
J'attire votre attention sur le fait que, sur ces dossiers relatifs au séisme, des recours gracieux sont possibles sur la base d'une étude bâtimentaire établissant le lien direct entre les dommages observés et le séisme. A l'issue de cette expertise, qui pourra être soumise à son examen, le BCSF pourra apprécier s'il convient de modifier l'intensité macrosismique précédemment observée sur l'échelle macrosismique européenne, dite EMS 98.
Plusieurs communes ont recouru à cette possibilité, ce qui, dans un certain nombre de cas, a conduit le BCSF à revoir son évaluation de l'intensité macrosismique et la commission à émettre un avis favorable.
En ce qui concerne les remarques relatives à la transparence de la procédure, il convient de noter que la commission se prononce au vu d'études et de rapports techniques produits par des organismes habilités et compétents. Les critères qui fondent l'avis de la commission sont communiqués à tout élu ou particulier qui en fait la demande.
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Voilà une réponse qui laisse particulièrement insatisfait le représentant des quarante maires des communes qui ne comprennent toujours pas cette décision !
En premier lieu, la rapidité est certes souhaitable, madame la secrétaire d'Etat, mais elle a aussi des conséquences négatives.
D'une part, les maires remplissent un formulaire - sans d'ailleurs savoir que ce formulaire va servir à l'information du laboratoire en question - et il est évidemment très difficile de dire si la terre a beaucoup bougé, un peu ou moyennement. Bref, ils agissent dans l'urgence.
D'autre part, la rapidité fait que si des décisions sont intervenues dès le 28 mai, d'autres ont été rendues le 16 juillet, puis le 18 septembre, ce qui prouve que la première étude était tout à fait insuffisante. Sur ce point, je continue donc de penser que la procédure n'est pas satisfaisante.
En second lieu, je pense qu'il faudra améliorer les textes : les maires n'étant en réalité informés que par le préfet, ils ne sont pas saisis de l'arrêté interministériel de manière officielle. Par conséquent, ils n'ont aucune possibilité de recours.
Selon vous, il suffit de faire une expertise. Mais qui va la payer ? La collectivité locale ? Les particuliers ? Et, naturellement, les assurances ne se précipitent pas pour envoyer leurs propres experts et prouver que les dommages constatés résultent du séisme, parce que cela les mettrait en cause directement !
Je pense très objectivement que, dans ce cas particulier - et même d'une manière générale -, nous devons faire beaucoup mieux pour traiter équitablement les populations.
Par ailleurs, je le répète ici, les maires sont très gênés, car ils sont mis en cause par leurs propres concitoyens, qui leur disent qu'ils ne travaillent pas bien, contrairement à leurs voisins qui ont réussi à obtenir l'état de reconnaissance naturelle. Nous sommes aussi là pour défendre nos collègues élus locaux !
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