Question de Mme CERISIER-ben GUIGA Monique (Français établis hors de France - SOC) publiée le 06/04/2004
Mme Monique Cerisier-ben Guiga appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les difficultés des Français établis hors de France pour obtenir des cartes d'identité et des passeports. Actuellement, le Centre de traitement des documents sécurisés (CDTS) du ministère des affaires étrangères comptabilise 14 000 demandes de carte nationale d'identité (CNI) et 30 000 demandes de passeport en instance ; 25 % seulement des demandes de CNI sont traitées et le délai d'obtention d'un passeport atteint quatre mois. Elle dénonce le fait que les Français de l'étranger sont contraints de se faire établir des passeports provisoires pour garantir leurs droits au séjour à l'étranger et pour voyager. De ce fait, privés de documents d'identité et de titres normaux de transport, les Français de l'étranger sont victimes d'un déni de leurs droits de citoyens et, de plus, ils sont financièrement pénalisés. Pour que le CDTS fonctionne normalement, il lui faudrait 24 agents et non 12. Même l'actuel recours à une société de service, même, ultérieurement, la télétransmission des données depuis les consulats ne remédieront pas à la faiblesse de l'effectif du CDTS. Par ailleurs, l'ouverture des centres régionaux de fabrication, sans création de postes supplémentaires dans les consulats concernés, risque de déplacer le lieu d'instance des demandes sans écourter les délais de délivrance. Elle lui demande le doublement du nombre des agents au CDTS, la création de postes dans les consulats promus centres régionaux de fabrication et, tant que le délai de délivrance des CNI et des passeports n'aura pas été réduit à quatre semaines, la gratuité des passeports provisoires.
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Réponse du Secrétariat d'Etat aux Affaires étrangères publiée le 14/04/2004
Réponse apportée en séance publique le 13/04/2004
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'appelle votre attention sur les difficultés que connaissent depuis maintenant neuf mois les Français établis hors de France pour obtenir des cartes d'identité et des passeports.
Il y a un mois, lors du dépôt de cette question, le centre de traitement des documents sécurisés du ministère des affaires étrangères, implanté à Nantes, le CTDS, comptabilisait 14 000 demandes de cartes nationales d'identité et 30 000 demandes de passeports en instance ; 25 % seulement des demandes de cartes nationales d'identité étaient traitées, les 75 % restant étaient laissés en instance, mis dans des cartons, et le délai d'obtention d'un passeport atteignait quatre mois.
Aujourd'hui, 20 000 cartes nationales d'identité et 30 000 passeports sont toujours en attente.
Je dénonce le fait que les Français de l'étranger soient contraints de se faire établir des passeports provisoires pour garantir leurs droits de séjourner à l'étranger, de voyager, d'avoir des visas et de pouvoir se déplacer d'un pays à l'autre.
De ce fait, privés de documents d'identité et de titre de transport, les Français de l'étranger sont victimes d'un déni de leurs droits de citoyens et, de plus, ils sont financièrement pénalisés puisque, dans l'attente d'un passeport sécurisé, ils doivent se faire établir un passeport provisoire qu'ils paient.
Pour que le centre de traitement des documents sécurisés fonctionne normalement, il lui faudrait vingt-quatre agents et non pas douze. L'actuel recours à une société de service pour la saisie des données et ultérieurement la télétransmission des données depuis les consulats ne remédieront pas à la faiblesse de l'effectif du CTDS.
Par ailleurs, l'ouverture de centres régionaux de fabrication de documents sécurisés dans une demi-douzaine de consulats, sans création de postes supplémentaires, déplacera le lieu d'instance des demandes en divisant le nombre de personnes par autant de consulats, sans écourter pour autant les délais de délivrance.
En conséquence, je demande le doublement du nombre des agents du CTDS, la création de postes dans les consulats promus centres régionaux de fabrication et, tant que le délai de délivrance des cartes nationales d'identité et des passeports n'aura pas été réduit à quatre semaines, ce qui est très raisonnable au regard de ce qu'il est en France, que les passeports provisoires soient gratuits pour les Français de l'étranger.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Madame le sénateur, je vous remercie pour cette question que vous m'avez posée avec votre sourire habituel, mais aussi avec la détermination qui est toujours la vôtre. Nous sommes particulièrement attentifs à la rapidité du traitement administratif, notamment à l'étranger. Nous avons souvent l'occasion d'en parler avec M. Del Picchia et les autres sénateurs représentant les Français de l'étranger, qui suivent ce dossier.
Depuis le 1er octobre 2003, les passeports lisibles en machine DELPHINE - délivrance de passeports à haute intégrité de sécurité - sont fabriqués de façon centralisée par le centre de traitement des documents sécurisés à Nantes. Ce dispositif n'a guère plus de six mois d'existence et on ne peut en tirer des conclusions définitives.
Les nombreuses plaintes de nos compatriotes ont été relayées par nos consulats ou nos ambassades et évoquées lors des récentes réunions du Conseil supérieur des Français de l'étranger.
Il est vrai que, par le passé, les passeports étaient fabriqués en poste sur-le-champ. La direction des Français à l'étranger et des étrangers en France, sensible au mécontentement de nos compatriotes, n'a ménagé aucun effort pour revenir à des délais de fabrication raisonnables en mettant tout en oeuvre pour y parvenir.
Dans les consulats, cinq pôles régionaux de fabrication de passeports ont été créés : à Bruxelles pour les demandes reçues en Belgique et au Luxembourg, à Genève pour la Suisse, à Londres pour le Royaume-Uni et l'Irlande, à Montréal pour les demandes reçues au Canada, à Hong Kong pour les demandes reçues en Chine, au Brunei, au Cambodge, en République de Corée, en Indonésie, au Japon, en Malaisie, au Laos, aux Philippines, à Singapour, en Thaïlande et au Vietnam, Taïwan dépendant de la circonscription consulaire de l'ambassade de France en Corée.
Ces pôles traiteront environ 40 % de la demande mondiale des passeports.
Les services du ministère ont mis au point en un temps record une application permettant la télétransmission de données entre les postes et le CTDS. Elle a été testée avec succès à Barcelone. Elle simplifie considérablement le travail des agents et sera développée dans tous les postes, qui en seront équipés avant la fin du mois de juin. Elle présente d'énormes avantages : le dossier est dématérialisé, il n'est donc plus transmis par la valise diplomatique. En outre, elle supprime une nouvelle saisie informatique des dossiers à Nantes.
Une opération de résorption du stock des demandes est en cours. Dans cette optique, il a été fait appel, il est vrai, à un prestataire de services extérieurs pour la saisie des données informatiques. Le recours à un prestataire extérieur a déjà été pratiqué, par le passé, au service central d'état civil. La fabrication des passeports proprement dite reste sous le contrôle des fonctionnaires.
Le centre de traitement des documents sécurisés monte également en puissance. Le nombre d'agents sera doublé pour atteindre, en septembre prochain, vingt agents titulaires complétés par des vacataires. Le recours à des vacataires s'explique par le caractère temporaire de la situation actuelle, qu'aggrave le rythme saisonnier de la demande de passeports.
En outre, les renforcements en moyens des pôles régionaux de fabrication sont actuellement à l'étude.
Enfin, la délivrance des passeports d'urgence s'effectue conformément au code général des impôts. Des droits de chancellerie sont donc perçus à cette occasion. Cependant, nous tâchons d'aider nos compatriotes en faisant porter la durée de validité de ce passeport de six mois à un an. Une première tentative a échoué en décembre dernier, le Conseil Constitutionnel ayant jugé que cette modification n'avait pas sa place dans une loi de finances rectificative. Le Parlement est actuellement saisi d'un projet de loi en ce sens.
Il est incontestable que la priorité donnée aux passeports a des répercussions sur les délais de traitement des demandes de cartes nationales d'identité sécurisées. Cependant, les efforts entrepris en ce qui concerne les passeports permettront de donner un nouveau rythme au traitement des dossiers de cartes nationales d'identité.
Sans méconnaître la difficulté technique de l'exercice, le ministère des affaires étrangères met tout en oeuvre pour résorber le stock des demandes non satisfaites et permettre le passage à la télétransmission des données dans les toutes prochaines semaines.
M. Robert Del Picchia. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je ne mets nullement en cause la réactivité de la direction des Français à l'étranger et des personnels nantais. Au contraire, je salue une administration qui n'a plus que la peau sur les os, pour sa capacité à réagir très rapidement face à des difficultés nouvelles.
Cela dit, que se passera-t-il, car il ne s'agit que d'une étape, lorsque nous en viendrons aux passeports et, probablement, aux cartes nationales d'identité biométriques ?
Les décisions techniques sont encore en instance sur le plan européen et les négociations avec les Etats-Unis sont très difficiles. Or les Etats-Unis ont adopté une loi qui n'accordera l'entrée sans visa aux étrangers qui n'y sont pas soumis actuellement que s'ils présentent un passeport comportant des données biométriques, et ce à partir du 1er octobre 2004. Il y aura tout de même encore une tolérance pour les étrangers titulaires d'un passeport sécurisé délivré avant le 30 septembre 2004, qui seront exonérés de visa.
Vous voyez la situation dans laquelle se trouvent les Français de l'étranger qui ont besoin de se rendre aux Etats-Unis, souvent plus fréquemment que les Français de France. Je pense surtout à ceux du Canada et d'Amérique latine. Je pense également aux hommes d'affaires, aux intellectuels, aux chercheurs. Et Dieu sait si les chercheurs ont besoin d'y aller !
Leur intérêt serait d'obtenir, dès cette année, des passeports sécurisés afin de ne pas avoir à demander de visa à partir du 1er octobre 2004. S'ils sont nombreux à en faire la demande et si nous, parlementaires, les encourageons dans cette voie, le centre de traitement des documents sécurisés sera submergé par un véritable raz de marée.
S'ils ne les demandent pas, leur entrée aux Etats-Unis sera soumise à visa à dater du 1er octobre de cette année. Il est clair que, dans ce domaine sensible de la citoyenneté, le fait d'être un Français établi à l'étranger constitue une pénalité.
Il serait intéressant de comparer les moyens en agents des préfectures à ceux du ministère des affaires étrangères par rapport au nombre de cartes d'identité et de passeports demandés et délivrés.
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