Question de M. ROUVIÈRE André (Gard - SOC) publiée le 05/03/2004

M. André Rouvière appelle l'attention de M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire sur les difficultés d'application que soulève la contrainte nouvelle contenue dans la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 31 décembre 2003) et concernant la vente de récepteurs de télévision. En effet, il semblerait que les vendeurs de récepteurs de télévision soient obligés de demander une pièce d'identité à l'acheteur. Ces commerçants n'ont aucune habilitation leur permettant d'exiger de tels documents. De telles pièces d'identité ne sont pas forcément détenues par tous les acheteurs. De plus, l'acheteur n'est pas toujours l'utilisateur de l'appareil de télévision. En conséquence, il lui demande si la réglementation ne pourrait pas être assouplie afin que le contrôle d'identité des acheteurs de télévision ne soit pas une obligation.

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Réponse du Secrétariat d'Etat au budget et à la réforme budgétaire publiée le 14/04/2004

Réponse apportée en séance publique le 13/04/2004

M. André Rouvière. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés d'application que soulève la contrainte nouvelle contenue dans la loi de finances pour 2004 concernant la vente de récepteurs de télévision. En effet, il semblerait que les vendeurs de récepteurs de télévision soient dans l'obligation de demander une pièce d'identité à tout acheteur de ces appareils.

Je comprends très bien le but de cette démarche, mais je voudrais que vous soyez sensible, monsieur le secrétaire d'Etat, aux difficultés qu'elle soulève. J'en citerai quelques unes.

Les commerçants ne sont pas habilités officiellement à exiger de tels documents. L'éventuel acheteur d'un poste de télévision n'a aucune obligation de posséder une carte d'identité, un passeport, ou même un permis de conduire. Que se passe-t-il si l'acheteur refuse d'apporter la preuve de son identité et si le vendeur vend le récepteur de télévision convoité ?

Monsieur le secrétaire d'Etat, si cette mesure nouvelle s'applique, qui contrôle la vente de ces appareils ? Comment, le cas échéant, avez-vous prévu l'exercice de ces contrôles ? En cas de non-application, quelles sont les sanctions prévues à l'encontre du vendeur ?

Dans l'esprit des vendeurs, des acheteurs et de celui qui vous parle, cette nouvelle réglementation, si elle est appliquée, va renforcer le sentiment de la mise en place d'un régime policier. Est-ce le souhait du nouveau gouvernement de M. Raffarin ? Monsieur le secrétaire d'Etat, ne pensez-vous pas que cette mesure est à la fois inopportune et, par essence, inapplicable ? Que comptez-vous faire dans ce domaine, monsieur le secrétaire d'Etat ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le sénateur, vous avez raison de poser cette question parce que les commerçants et nos concitoyens s'interrogent avec bon sens sur les obligations des uns et des autres.

L'article 37 de la loi de finances pour 2004 relatif à la redevance audiovisuelle prévoit en effet que les commerçants sont tenus de faire souscrire par leurs clients une déclaration à l'occasion de toute vente de matériel. Cette déclaration comporte la date d'achat, l'identité sous laquelle se déclare l'acquéreur - vous savez comme moi, monsieur le sénateur, que cela peut donner lieu à des tricheries - son nom, son prénom, son adresse, sa date et son lieu de naissance. Certains commerçants s'inquiètent de ne pas disposer des moyens leur permettant de remplir cette obligation.

Je vais vous dire quel est l'état du droit, et il faudra peut-être à l'avenir réfléchir à cette mesure. Qu'attend-on des professionnels dans ce domaine ?

L'obligation de déclarer toute vente de téléviseur qui s'impose aux commerçants depuis la création de la redevance constitue l'élément indispensable de l'assiette de la redevance audiovisuelle puisque c'est sur la base des déclarations adressées aux centres régionaux par les commerçants que les comptes des redevables sont ouverts en cas de première acquisition.

Le recueil de certaines informations, telles que la date et le lieu de naissance, a pour principal objet de protéger le contribuable des risques d'homonymie, en leur évitant notamment de subir d'éventuelles poursuites à la place d'un autre.

Toutefois, le commerçant s'en tient aux informations qui lui sont communiquées, puisque le texte ne l'habilite pas -je ne vois d'ailleurs pas pourquoi il le ferait - à demander au client de lui présenter une pièce d'identité.

Si le commerçant est tenu de déclarer toutes ses ventes et encourt une amende dans l'hypothèse où il ne le ferait pas, il ne peut en aucun cas être pénalisé en cas d'informations incomplètes ou erronées de la part d'un client. Nous pouvons donc sur ce point rassurer les commerçants.

En outre, vous le souligniez à juste titre, il n'est pas tenu de refuser la vente dans l'hypothèse où le client s'opposerait à la communication des informations qui lui sont demandées. En ce cas, la vente doit être effectuée et elle sera déclarée au centre régional de la redevance avec les informations dont le commerçant dispose, même si elles sont incomplètes.

Si le commerçant ne court pas de risque, le redevable, en revanche, s'expose à une sanction dès lors qu'un contrôle à domicile révélerait qu'il détient un téléviseur et ne l'a pas déclaré, ou au risque de poursuites si les éléments d'identification erronés ou incomplets amènent l'administration à diligenter des poursuites à son encontre.

Telle est la loi. Il me semble toutefois qu'il faudra à l'avenir s'interroger sur ces mesures. Il s'agit en effet d'un système compliqué qui, d'une certaine manière, donne une prime à la fraude. Le ministre de la culture connaît bien ce débat sur la redevance, son utilisation, son mode de perception, qui s'est souvent posé tant dans cette assemblée qu'à l'Assemblée nationale. Peut-être conviendrait-il de le repenser, mais c'est un débat beaucoup plus vaste que la question sur laquelle vous m'interrogez.

M. le président. La parole est à M. André Rouvière.

M. André Rouvière. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette réponse, qui apporte des éclaircissements. Il est vrai que l'interrogation des vendeurs de télévision ne portait pas sur le formulaire qui existe depuis la mise en place de la redevance. Ils craignaient d'être dans l'obligation de contrôler l'identité que l'acheteur inscrivait sur le formulaire. Si cette vérification n'est pas une exigence contenue dans la loi de finances pour 2004, je pense qu'il est bon de le faire savoir.

A cette occasion, monsieur le secrétaire d'Etat, je me permets de vous faire une suggestion. La redevance de télévision n'est pas acquittée par tout le monde, il y a de nombreux fraudeurs. Sa rentabilité n'est donc pas évidente. Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous suggère de proposer à M. le Premier ministre de remplacer la baisse de l'impôt sur le revenu par la suppression de cette redevance. (Exclamations amusées sur plusieurs travées.)

M. Daniel Raoul. Très bien !

M. André Rouvière. Cette mesure, si vous l'adoptiez, serait beaucoup plus équitable que la baisse de l'impôt sur le revenu. En effet, pour celles et ceux qui paient des impôts, la redevance de télévision n'est pas une lourde contribution ; en revanche, pour ceux que l'insuffisance des revenus exonère d'impôts, la charge de la redevance de télévision est souvent très lourde à acquitter. Je vous propose donc, monsieur le secrétaire d'Etat, la suppression de la redevance de télévision dès 2005 en lieu et place de la baisse de l'impôt sur le revenu.

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