Question de M. GODEFROY Jean-Pierre (Manche - SOC) publiée le 16/01/2004
M. Jean-Pierre Godefroy souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur l'épave du cargo Léopoldville, coulé au large de Cherbourg dans la nuit de Noël 1944, avec à son bord 763 soldats américains. En juillet 2001, un grave accident de plongée révélait que le site était assidûment fréquenté par les amateurs de plongée et que des ossements et des objets avaient été récupérés. Ces actes de profanation avaient provoqué une énorme émotion aux Etats-Unis. La plongée sur le site est désormais réglementée par un décret du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, qui soumet toute plongée à une autorisation préalable, interdit de pénétrer dans le bâtiment et de ramasser des ossements. L'épave est par ailleurs classée comme bien culturel maritime. Au-delà de ces mesures, plusieurs associations, notamment d'anciens combattants américains, souhaitent que ce " cimetière marin " soit reconnu et protégé plus efficacement. La notion de cimetière marin n'existe ni en droit français, ni en droit international. Néanmoins, ces associations souhaitent qu'un statut particulier soit donné à ce site qui permette de le rendre plus officiel. Il avait saisi le précédent gouvernement de cette demande, lequel avait mis plusieurs pistes à l'étude (notamment au sein de la direction des affaires juridiques du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et de la direction de l'architecture et du patrimoine du ministère de la culture) ; il n'ignore pas les difficultés juridiques et/ou diplomatiques qui peuvent exister. Mais, en 2004, la France célébrera le soixantième anniversaire du débarquement allié en Normandie et de la Libération, dont le naufrage du Léopoldville est un des épisodes dramatiques. A cette occasion, il lui demande donc quelle démarche pourrait être menée pour transformer ce carré de mer en un vrai lieu du souvenir.
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Réponse du Secrétariat d'Etat aux anciens combattants publiée le 04/02/2004
Réponse apportée en séance publique le 03/02/2004
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur une question qui, à quelques mois des célébrations du soixantième anniversaire du débarquement allié sur les plages de Normandie, prend un caractère plus que symbolique. Elle concerne en effet l'épave du cargo Léopoldville, coulé au large de Cherbourg dans la nuit de Noël 1944, avec à son bord 763 soldats américains venus renforcer le front allié pour bloquer la contre-offensive allemande.
En juillet 2001, un grave accident de plongée révélait que le site était assidûment fréquenté par les amateurs de plongée et que selon toute vraisemblance, des ossements et des objets avaient été récupérés.
Ces actes de profanation - il n'y a pas d'autre mot - avaient provoqué une énorme émotion aux Etats-Unis et dans notre région, la Normandie.
La plongée sur le site est désormais réglementée par un décret du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord qui soumet toute plongée à une autorisation préalable et qui interdit de pénétrer dans le bâtiment et de ramasser des ossements.
L'épave est par ailleurs classée bien culturel maritime.
Mais plusieurs associations, notamment d'anciens combattants américains, souhaitent aller au-delà afin que ce « cimetière marin » soit reconnu et protégé plus efficacement.
La notion de cimetière marin n'existe ni en droit français, ni en droit international. Néanmoins, ces associations souhaitent qu'un statut particulier soit donné à ce site pour le rendre plus officiel.
Fin 2001, j'avais adressé plusieurs courriers au précédent gouvernement à ce sujet. Plusieurs pistes avaient alors été mises à l'étude, notamment au sein de la direction des affaires juridiques du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et de la direction de l'architecture et du patrimoine du ministère de la culture.
Lors de votre prise de fonctions en juin 2002, je vous ai également adressé un courrier pour vous faire part de ces démarches, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je mesure bien les difficultés juridiques, voire diplomatiques, que peut soulever un tel sujet. Mais, en 2004, la France célébrera le soixantième anniversaire du débarquement allié en Normandie et le naufrage du Léopoldville est un des épisodes dramatiques survenus les mois précédant la Libération. A cette occasion, je renouvelle ma demande, monsieur le secrétaire d'Etat : ne pourrait-on pas transformer ce carré de mer en un véritable lieu de souvenir ?
Par ailleurs, ne serait-il pas envisageable d'organiser une manifestation de recueillement et de souvenir sous l'égide de l'Etat et en accord avec l'ambassade des Etats-Unis le jour de Noël 2004, afin d'officialiser ce site comme lieu de mémoire de ce tragique épisode de notre histoire ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le sénateur, dans la nuit du 24 au 25 décembre 1944, alors qu'il faisait route vers Cherbourg, le cargo Léopoldville a été torpillé par un sous-marin allemand : 763 soldats américains ont, vous l'avez dit, péri lors du naufrage. Je salue, bien entendu, avec respect leur mémoire.
L'épave du Léopoldville repose à soixante mètres de fond, dans les eaux territoriales françaises. Son parfait état de conservation explique les visites réitérées de plongeurs dont elle a fait l'objet depuis plusieurs années.
Monsieur le sénateur, je suis évidemment sensible à l'émotion des associations de vétérans. Je souhaite souligner que des mesures - manifestement efficaces, nous nous en sommes assurés - ont déjà été prises.
En application de l'article 1er de la loi du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes, le ministre de la culture a pris, le 8 mars 2001, un arrêté classant l'épave du Léopoldville « bien culturel maritime » pour assurer sa sauvegarde.
Afin de prévenir les vols ou les actes de profanation par des particuliers, le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord a, quant à lui, pris le 31 juillet 2001 un arrêté contraignant les associations de plongeurs à demander une autorisation préalable avant toute plongée sur le site.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, la protection des restes humains est réglementée par l'article 225-17 du code pénal, qui prévoit que « toute atteinte à l'intégrité du cadavre, par n'importe quel moyen que ce soit », sera punie d'une forte amende et d'une peine d'un an d'emprisonnement.
Vous suggérez la création d'un « cimetière marin », monsieur le sénateur, mais cette notion n'existe pas en droit, comme vous le soulignez vous-même, et la création d'un précédent ne manquerait pas de soulever d'insurmontables difficultés en raison de l'importance du nombre de navires jonchant, hélas ! le fond des mers.
Je vous informe cependant que la marine nationale, à laquelle nous avons demandé un rapport sur la situation exacte, déclare que les mesures prises ont eu des effets pour l'instant dissuasifs et qu'aucun incident particulier n'a eu lieu depuis plusieurs mois.
Cette information est, je l'espère, de nature à dissiper les inquiétudes des associations représentatives.
Bien évidemment, nous restons d'une vigilance absolue afin de prévenir tout acte répréhensible.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait, et des précisions que vous venez d'apporter.
J'insiste sur le fait qu'une manifestation officielle, à l'occasion de ce soixantième anniversaire, permettrait d'authentifier ce lieu comme « cimetière marin », même si, comme vous l'avez dit, il est délicat d'utiliser ce terme en raison du nombre d'épaves au large des côtes de notre département. Comme il s'agit des eaux territoriales, seul l'Etat pourrait organiser une manifestation commémorative.
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