Question de M. TRUCY François (Var - UMP) publiée le 26/06/2003
M. François Trucy attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la forte montée en puissance de la cellule Tracfin, chargée de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Certaines sources d'informations avancent des chiffres considérables qu'il souhaite vérifier auprès des service du ministère. Ainsi il lui demande s'il est exact qu'en 2002 6 896 déclarations de soupçons ont été recueillis, soit une hausse de 92 % par rapport à 2001. Il lui indique qu'il peut y avoir plusieurs interprétations, optimistes ou pessimistes, face à cet accroissement. Il précise que seules des explications détaillées de la part de M. le ministre peuvent permettre à la représentation nationale d'apprécier les causes de cette évolution. Par ailleurs, M. François Trucy rappelle qu'il est auteur, pour le comptes de la commission des finances du Sénat, d'un rapport d'information sur les jeux de hasard et d'argent. A ce titre il souhaiterait savoir si, dans les déclarations de soupçons en 2002, il y a des cas de blanchiment dans les établissements de jeux français. En cas de réponse positive, il souhaiterait en connaître le nombre, les faits reprochés et enfin les suites données à ces procédures.
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Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 28/08/2003
Le niveau d'activité de Tracfin a effectivement connu une très forte progression en 2002.6 896 déclarations de soupçon lui ont été transmises (+ 92 % par rapport à 2001) et Tracfin a transmis 291 dossiers aux autorités judiciaires (+ 29 % par rapport à 2001). Plusieurs facteurs ont concouru à cette évolution : l'élargissement à de nouvelles professions de l'obligation de déclaration des opérations douteuses à Tracfin. D'abord limitée aux établissements financiers, cette obligation a été progressivement étendue et concerne désormais les intermédiaires immobiliers (notaires et agents immobiliers, pour l'essentiel), les directeurs responsables de casinos, les marchands de biens de grande valeur (oeuvres d'art, antiquités, bijoux, pièces d'orfèvrerie), ainsi que les commissaires priseurs judiciaires. Il y a là, mécaniquement, une nouvelle source de déclarations de soupçon. Ensuite, la sensibilisation croissante de la totalité des professions à l'importance économique et éthique de la lutte anti-blanchiment et aux risques (pénaux, financiers, d'image) que peut leur faire courir un manque de vigilance. Cela les a conduit à renforcer leurs procédures de veille interne, à multiplier les contacts avec Tracfin et finalement à accroître le nombre de leurs déclarations de soupçon. Par ailleurs, le passage à l'euro fiduciaire au 1er janvier 2002 et les échanges franc-euro concomitants ont généré de nombreuses déclarations d'opérations financières suspectes. La Banque de France a été particulièrement vigilante sur ces transactions et a transmis plus de 1 500 déclarations de soupçon. Enfin, la priorité a été donnée à la lutte contre le financement du terrorisme. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, les établissements financiers, fortement mobilisés, ont émis de nombreux signalements sur des transactions susceptibles de recouvrir le financement d'un acte ou d'une organisation terroriste. Au final, on ne peut tirer de cette évolution le sentiment que les opérations de blanchiment auraient tendance à se multiplier dans le pays, mais plutôt que le dispositif croît en efficacité. Sur l'autre point évoqué, relatif à d'éventuelles opérations de blanchiment dans les établissements de jeux, il convient de rappeler que les casinos, seuls établissements de jeux actuellement soumis à l'obligation de déclaration de soupçon, ne le sont que depuis 2001. La sensibilisation de la profession au risque de blanchiment n'a donc été engagée que récemment. Cependant, des déclarations de soupçon commencent à être émises, particulièrement depuis le début de l'année 2003. Elles portent sur des comportements atypiques de joueurs ou sur des sommes anormalement élevées engagées par des inconnus qui semblent bien accepter une perte importante de leurs enjeux. Les faits ainsi rapportés, agrégés par Tracfin aux autres renseignements financiers obtenus par ailleurs, ont pu concourir à asseoir une transmission aux autorités judiciaires. Compte tenu du caractère récent de ces obligations, il est encore trop tôt pour établir des statistiques sur l'utilisation des établissements de jeux pour réaliser du blanchiment d'argent, aucune décision définitive de justice n'étant encore intervenue.
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