Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-R) publiée le 11/04/2003
Question posée en séance publique le 10/04/2003
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Tout comme le Gouvernement n'a pas organisé de débat devant le Parlement sur la position de la France face à l'effondrement souhaité du régime de Saddam Hussein - absence de débat dont s'est d'ailleurs ému Claude Estier, président du groupe socialiste -, le Gouvernement prépare en silence les négociations de l'Accord général sur le commerce des services, l'AGCS. Pourtant, celles-ci font peser sur l'ensemble de l'humanité des risques sans précédent : il s'agit de la libéralisation économique des services tels que la distribution de l'eau, l'énergie, les transports, la recherche, les assurances sociales ou la poste.
Il n'est pas normal que les décisions concernant l'ouverture des services à la concurrence internationale se prennent sans même que les citoyens en soient informés et que le Parlement en débatte. Cela ne peut que nourrir la désaffection de nombreux électeurs pour la classe politique ; l'abstention, le 21 avril dernier, nous invite pourtant à les entendre.
Les déboires de l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI, et les succès du Forum social mondial devraient vous alerter : la mondialisation ne doit plus se faire au détriment des citoyens par la voie de négociations menées dans des cadres non démocratiques. La démocratie exige transparence et contrôle citoyen.
Une proposition de loi allant en ce sens vient d'être déposée par Claude Saunier, visant à créer des délégations parlementaires de suivi des institutions commerciales et financières internationales.
Les négociations semblent trébucher sur le mode 4 de l'AGCS : une entreprise pourrait importer le personnel jugé nécessaire à la fourniture d'un service sur le territoire d'un autre pays, important dans le même temps les conditions salariales en vigueur dans le pays d'origine des salariés. Cette clause de dumping social n'a heureusement pas été adoptée. Mais qu'en sera-t-il le 16 avril prochain à Bruxelles ? Il se dit que des quotas rendraient cela possible.
La France et l'Union européenne doivent défendre leurs services publics ou d'intérêt général - éducation, santé, culture - et respecter le droit des pays du Sud à protéger leurs services publics, le service public de l'eau en particulier. Car la paix ne se construit pas dans une concurrence entre les peuples exacerbée par les multinationales.
« Notre maison brûle », disait le Président de la République, et nous, nous voulons arrêter les incendiaires. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour que ne soient pas bradés les biens communs mondiaux aussi essentiels que l'eau et la culture, la biodiversité et l'éducation, le climat et les services publics, le 16 avril à Bruxelles et dans les négociations suivantes ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Dominique Braye. Qu'avez-vous fait, vous ?
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Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 11/04/2003
Réponse apportée en séance publique le 10/04/2003
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Madame la sénatrice, je veux d'abord rectifier une affirmation de votre part en ce qui concerne l'Irak : un débat a eu lieu au Parlement et, à plusieurs reprises, des rendez-vous ont été organisés par le Premier ministre avec les principaux représentants des différents groupes parlementaires.
M. Claude Estier. Cela n'a rien à voir ! Nous parlons des derniers développements.
M. René-Pierre Signé. On ne s'en est pas aperçu !
M. Francis Mer, ministre. En ce qui concerne le sujet que vous évoquez, nous avons depuis longtemps décidé qu'il relevait de la responsabilité de la Commission européenne, sur la base d'un mandat qui lui a été transmis à partir de nombreuses discussions organisées à la fois dans les différents pays et à l'échelon de l'Europe.
Je vous rappelle tout de même que c'est pour nous une chance historique de développer nos activités de services à l'exportation, domaine dans lequel nous sommes très forts. Nous sommes en effet le troisième exportateur de services dans le monde.
M. Jean-Pierre Masseret. C'est l'héritage !
M. Francis Mer, ministre. Or, comme vous le savez, c'est dans ce secteur que se développent les emplois. Pour compenser les pertes d'emplois industriels que nous avons évoquées tout à l'heure, une des solutions consiste justement à créer des emplois dans les services ! Et les services que nous exportons font appel à la matière grise, c'est-à-dire à l'éducation, qui constitue notre atout !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce n'est pas si sûr !
M. Jean-Louis Carrère. Et vous réduisez les crédits de la recherche !
M. Francis Mer, ministre. Donc, contrairement à ce que vous pourriez penser, il est de notre intérêt collectif que les conditions d'exportation de nos services soient d'autant le plus ouvertes possible, d'autant que - et je ferai preuve d'un peu de cynisme - nous partons d'une position privilégiée en termes d'ouverture.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce n'est pas sûr !
M. Francis Mer, ministre. Je veux en outre indiquer que nous travaillons en toute transparence. De nombreuses réunions ont eu lieu. L'une d'elles, organisée par le ministre délégué au commerce extérieur, a réuni cent personnes à Bercy, dont vingt parlementaires, les associations, les organisations professionnelles et, bien entendu, les entreprises concernées.
Je veux vous indiquer qu'il est hors de question - et nous sommes tous d'accord sur ce point à l'échelon européen - d'introduire quoi que ce soit, dans les propositions que nous ferons, qui concernerait la santé, l'éducation ou la culture. (Exclamations sur certaines travées du groupe socialiste.)
La négociation sera menée d'ici à la fin de l'année 2004. Nous constaterons alors qu'elle aura été menée au profit de l'Europe et de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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