Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 05/12/2002
M. René Trégouët rappelle à l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales l'idée émise sur les ondes radiophoniques le 25 novembre dernier par un ancien premier ministre de rendre le vote obligatoire, obligation devant être accompagnée de la reconnaissance du vote blanc. Le Gouvernement a-t-il une position officielle sur ce sujet ?
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Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 20/03/2003
Le vote obligatoire n'a jamais été appliqué en France. Sur le plan théorique, deux doctrines s'opposent. Le vote obligatoire se rattache à la théorie de l'" électorat fonction ", selon laquelle le vote est une fonction qui implique le devoir de la remplir. Au contraire, la théorie de l'" électorat droit " considère le vote comme une faculté individuelle imprescriptible que le possesseur est libre d'exercer ou pas. C'est la théorie de " l'électorat droit " qui a prévalu dans le droit français. Les difficultés techniques de mise en oeuvre du vote obligatoire et l'incertitude suscitée par la réaction de l'électorat contraint d'aller voter ont motivé le refus de modifier le droit électoral à ce sujet. Par ailleurs, l'idée selon laquelle le vote obligatoire permettrait de lutter contre l'abstention doit être relativisée. La hausse des abstentions est un phénomène relativement récent, et n'est donc pas liée au caractère facultatif du vote : après une période de politisation intense, marquée par une bipolarisation maximale des scrutins nationaux et locaux dans les années 1974-1983, les élections se sont singularisées par une baisse durable de la participation à partir de 1988. La motivation de l'électorat dépend également des enjeux suscités par chaque scrutin. L'analyse des résultats électoraux confirme que l'éventail des options proposées au scrutin, l'acuité de la compétition et la portée de la consultation ont une influence sur le volume de l'abstention. Par ailleurs, on observe que les élections locales suscitent une participation toujours plus faible que les élections nationales. En outre, le mode de scrutin et le type de circonscription électorale ont un impact sur la participation, qui est également tributaire des réalités géographiques et sociologiques. Enfin, le vote obligatoire ne semble pas de nature à répondre de façon totalement satisfaisante à cette baisse de la participation observée dans d'autres Etats démocratiques. En effet, les Etats européens où le vote est obligatoire (Belgique, Grèce, Luxembourg) ont toujours un taux incompressible d'abstentions, prouvant l'existence d'une indifférence structurelle d'une partie du corps électoral, et la proportion de bulletins blancs et nuls y est plus élevée qu'ailleurs. D'autres solutions de nature juridique et technique sont avancées pour motiver l'électeur, comme l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales depuis 1997 ou le recours au vote par procuration, dont les conditions ont été assouplies par la loi n° 93-894 du 6 juillet 1993 et vont l'être de nouveau par voie d'ordonnance. En tout état de cause, la lutte contre l'abstention passe par une meilleure information de l'ensemble du corps électoral sur l'inscription sur les listes électorales et les pouvoirs conférés aux différents types d'élus pour mieux souligner l'importance du droit de vote.
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