Question de Mme GAUTIER Gisèle (Loire-Atlantique - UC) publiée le 04/07/2002
Mme Gisèle Gautier attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur les essais nucléaires pratiqués par la France et sur leurs conséquences sur toutes les personnes qui ont, soit participé en tant que militaires ou civils à ces essais. En effet, depuis 1960, la France a procédé à 210 essais nucléaires tant au Sahara qu'en Polynésie française. Elle lui rappelle que le 27 janvier 1996, la France a décidé d'arrêter ces essais et qu'elle a fermé ses sites d'essais en Polynésie et ratifié le Traité d'interdiction totale des essais nucléaires. Si les vétérans des essais nucléaires français s'en réjouissent, ils rappellent cependant que nombre d'entre eux ont été témoins d'accidents et d'incidents, certains ayant travaillé en zone contaminée, parfois sans les plus élémentaires précautions. Plusieurs ont aujourd'hui une santé très précaire et certains sont décédés prématurément. Il semble que, contrairement à ce qui est avancé habituellement par les autorités françaises, les conséquences sur la santé des expériences nucléaires sont loin d'être négligeables, même après plusieurs dizaines d'années. C'est pourquoi, afin de répondre aux légitimes préoccupations des vétérans, elle lui demande de bien vouloir prendre des mesures visant à créer un Fonds d'indemnisation des victimes civiles et militaires des essais nucléaires ainsi qu'une commission de suivi de ces essais.
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Transmise au Secrétariat d'Etat aux anciens combattants
Réponse du Secrétariat d'Etat aux anciens combattants publiée le 12/09/2002
Le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'indemniser tout militaire souffrant d'une infirmité due à la guerre ou au service, qu'il s'agisse d'une blessure ou d'une maladie. Les aggravations par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service sont également prises en charge. Il en est ainsi de la participation à des essais nucléaires. S'agissant de l'imputabilité, les appelés bénéficient de la présomption d'imputabilité dans les conditions suivantes : pour une blessure, il suffit qu'elle ait été constatée, avant la fin de l'opération, par un document officiel, au moment où l'événement s'est produit ; pour une maladie, elle doit être constatée après le 90e jour de service effectif ou avant le 30e jour suivant la fin de l'opération. Dans les autres cas, l'imputabilité relève de la preuve. Il en va de même pour les autres catégories de militaires. L'imputabilité par preuve, qui peut intervenir à tout moment, suppose que le demandeur apporte la preuve d'une blessure ou d'une maladie causée par le fait ou à l'occasion du service et qu'il existe une relation médicale entre le fait constaté et l'infirmité évoquée. Cela étant, la reconnaissance du droit à indemnisation peut être malaisée lorsque l'incident à l'origine possible d'une affection n'a pas été constaté ou qu'un délai important s'est écoulé entre le fait invoqué et l'apparition de la maladie. De même, l'établissement d'un lien direct entre le fait de service et l'apparition de l'affection ne va pas parfois sans soulever certaines difficultés. Toutefois, cette rigueur apparente est atténuée par la possibilité ouverte par le droit des pensions militaires d'invalidité d'admettre la preuve d'imputabilité par un faisceau de présomptions ; ainsi, en l'absence d'une preuve indiscutable, un ensemble de circonstances permet d'admettre l'imputabilité. Dans le cas précis d'exposition à des sources radioactives, l'avis du service de protection radiologique des armées (SPRA) est précieux. En outre, ainsi que le montrent les pensions accordées, ce mécanisme permet d'ouvrir des droits sans condition de délai. S'agissant des essais nucléaires, des pensions ont été concédées près de vingt ans après la date du fait générateur. Un rapport, publié en février 2002, de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques - rapport provisoire sur les incidences environnementales et sanitaires des essais nucléaires effectués par la France entre 1960 et 1996 - a dressé l'historique des essais nucléaires français et étrangers et analysé les études dosimétriques effectuées. Les conclusions du rapport reconnaissent notamment que les mesures déjà engagées répondent aux besoins des participants aux expérimentations nucléaires. Elles considèrent qu'il ne doit pas être envisagé de transposer en France des mécanismes de prise en charge qui méconnaîtraient la couverture sociale existante et qui s'adressent à des victimes de contaminations avérées qui ne concernent pas la France. Compte tenu des faibles risques reconnus par le rapport et du nombre restreint de demandes de pensions répertoriées, il semble disproportionné d'envisager d'appliquer aux militaires un régime de nature différente. Quant à la mise en place d'un fonds d'indemnisation, sa création tardive viendrait en concurrence avec les prestations déjà servies aux pensionnés par les régimes existants, lesquels intègrent de surcroît la recherche du lien de causalité entre l'affection constatée et une exposition à un rayonnement considéré comme dangereux ainsi qu'une expertise médicale complète, dont il est difficile de s'exonérer en la circonstance. Pour l'avenir, la création de l'observatoire de la santé des vétérans est de nature à permettre un meilleur suivi des militaires qui seraient exposés à des risques particuliers et à faciliter, de nombreuses années après le fait générateur, les recherches éventuelles d'imputabilité. Une fois ce dispositif mis en place, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre devrait répondre totalement aux demandes des militaires concernés.
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