Question de M. LONGUET Gérard (Meuse - RI) publiée le 22/02/2002
Question posée en séance publique le 21/02/2002
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme Tasca, ministre de la culture et de la communication.
Lundi dernier, les quotidiens gratuits viennent de faire une irruption assez spectaculaire dans l'actualité française, à Marseille comme à Paris. On connaît l'impact immédiat de ces quotidiens gratuits : ils assèchent la publicité des quotidiens régionaux ; ils diminuent les ventes, et donc le tirage, des quotidiens régionaux et donnent le sentiment de dégrader la qualité de l'information.
Face à cette situation, les réactions sont assez désordonnées.
La plupart des quotidiens régionaux « tendent le dos » et espèrent que la médiocrité des recettes publicitaires locales les protégera des quotidiens gratuits. D'autres allument des contre-feux ; c'est le cas de La Provence à Marseille. D'autres encore s'accordent avec des sociétés de quotidiens gratuits ; c'est le cas de Ouest-France avec un groupe norvégien. D'autres enfin décident d'empêcher dans la rue, en employant des méthodes assez musclées - il faut le reconnaître -, la diffusion des quotidiens gratuits, comme le syndicat du Livre. Au demeurant l'imprimerie de France-Soir pourrait y trouver une augmentation de son chiffre d'affaires et, par conséquent, créer des emplois.
On a donc le sentiment que, face à une irruption prévisible, règne un grand désordre.
Le syndicat de la presse parisienne tout comme le syndicat de la presse régionale quotidienne expliquent qu'il faut réfléchir. C'est là une réponse avisée, certes, mais elle ne permet pas de choisir.
Ma question est très simple, madame le ministre : des trois désordres principaux que suscitent les quotidiens gratuits, le désordre éthique de l'information, le désordre économique, auquel les sénateurs, élus du territoire, sont évidemment sensibles - car nous avons besoin de quotidiens régionaux ayant les capacités de faire remonter l'information locale - et le désordre dans la rue, avec les affrontements physiques qu'il engendre, lequel choisissez-vous de combattre en premier ?
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Réponse du ministère : Culture publiée le 22/02/2002
Réponse apportée en séance publique le 21/02/2002
Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, le Gouvernement ne choisit pas entre trois risques : il est globalement attentif à la santé de la presse.
Nous assistons en effet à l'arrivée en France d'une presse gratuite d'information, une forme de presse qui s'est beaucoup développée en Europe du Nord. D'aucuns pensent qu'il y a là une opportunité pour attirer vers la presse un nouveau lectorat, notamment de jeunes, mais nombreux sont ceux qui, comme vous-même, s'interrogent et s'inquiètent.
La presse, par le passé, a été confrontée à bien des défis : industriels, économiques, rédactionnels. C'est toujours par la concertation qu'elle a trouvé les réponses adaptées. Aujourd'hui encore, les acteurs de ce dossier doivent dialoguer, ce qu'ils n'ont, à l'évidence, pas fait suffisamment jusqu'à présent.
Les intérêts en jeu sont complexes. Je note d'ailleurs que la presse quotidienne régionale, par exemple, a une approche diversifiée de ce problème. C'est ainsi que certains titres n'ont pas hésité à investir dans ces quotidiens gratuits.
La recherche d'équilibres globaux passe avant tout par une volonté réelle des professions concernées de trouver un accord.
Bien sûr, la gratuité de l'information n'est pas sans poser des problèmes à la presse quotidienne d'information politique et générale. Son équilibre financier est fragile, nous le savons. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement a renforcé les aides spécifiques qui sont accordées à cette catégorie de presse.
Mais, au-delà des problèmes économiques, il convient de s'interroger sur l'indépendance rédactionnelle d'un support dont l'existence dépend exclusivement de la publicité. C'est sans doute sur la question du pluralisme et de l'indépendance que je porterai l'essentiel de mon attention, plus que sur les autres troubles que vous avez évoqués, monsieur Longuet.
Il appartient aux collectivités locales d'apprécier les conditions dans lesquelles elles peuvent autoriser ou non la distribution de ces journaux gratuits sur leur territoire.
Pour ma part, j'ai pris trois initiatives.
Premièrement, j'ai demandé à la direction du développement des médias de recevoir très prochainement chacune des parties directement ou indirectement concernées.
Deuxièmement, j'ai demandé à cette même direction de procéder à une étude de l'impact de cette forme de presse sur l'économie et sur l'évolution rédactionnelle.
Troisièmement, j'ai souhaité que soit, dans le même temps, lancée une étude sur son impact dans les autres pays européens.
Dans l'immédiat, j'invite avec insistance toutes les parties concernées à renouer avec la voie du dialogue. Les dernières informations que j'ai reçues concernant notamment les initiatives syndicales me donnent à penser que, dans les tout prochains jours, un accord négocié pourrait intervenir. C'est ce que nous pouvons souhaiter de mieux.
Quoi qu'il en soit, je le répète, le Gouvernement sera très attentif à ce que le pluralisme et l'indépendance de la presse d'information soient maintenus dans notre pays.
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