Question de M. CHABROUX Gilbert (Rhône - SOC) publiée le 15/11/2001

M. Gilbert Chabroux attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la décision prise récemment par les présidents yougoslave et monténégrin. Le président yougoslave, Vojislav Kostunica, et son homologue monténégrin Milo Djukanovic, ont convenu, vendredi 26 octobre 2001, d'organiser un référendum sur la question de l'indépendance du Monténégro. Cette décision entérine la persistance de divergences sur le devenir de la Fédération de Yougoslavie. Reste que cette province de l'actuelle fédération est, à l'instar du sud de la péninsule balkanique, une mosaïque de peuples. Ainsi, sur les 615 000 habitants que compte le Monténégro, les Albanais représentent 22 %, les Serbes 14 %, les Croates 1 %, les Macédoniens et Slovènes moins de 0,5 %. Reste que dans la perspective d'une sécession de cette partie de la Fédération de Yougoslavie, les risques de radicalisation de certains éléments constitutifs de la population du Monténégro ne sont pas inexistants. Au regard de l'histoire récente de cette partie du monde balkanique, il lui demande quelles sont les dispositions que prévoient de prendre les institutions internationales telles que l'ONU ou l'Union européenne afin de prévenir tout risque de confrontation entre les diverses composantes de la population monténégrine.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 24/01/2002

L'avenir du cadre fédéral en République fédérale de Yougoslavie constitue l'une des préoccupations majeures de la politique de la France et de l'Union européenne dans les Balkans. La France soutient avec l'Union européenne et les membres du Groupe de contact l'idée d'un " Monténégro démocratique dans une Yougoslavie démocratique ". Un référendum sur l'indépendance au Monténégro comporterait de nombreux risques d'autant qu'aucune majorité claire ne se dessine actuellement chez les électeurs monténégrins. Une nouvelle indépendance dans les Balkans, obtenue dans des conditions ambiguës, serait lourde de conséquences à la fois pour le Monténégro lui-même, multiethnique, économiquement fragile, terre de prédilection pour les réseaux criminels et à la stabilité politique incertaine, et pour l'Europe du Sud-Est dans son ensemble, avec des incidences probables sur le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine et l'ancienne République yougolave de Macédoine. Avec ses partenaires de l'Union européenne, la France n'a eu de cesse depuis la fin de l'année 2000 de mettre en garde les autorités monténégrines contre toute initiative unilatérale et d'appeler Podgorica et Belgrade à l'ouverture d'un dialogue constructif et substantiel en vue de trouver de nouveaux arrangements constitutionnels acceptables par toutes les parties, dans le respect des principes démocratiques et dans les conditions assurant la stabilité de la région. Elle a ainsi exprimé ses regrets et ses inquiétudes lors de l'échec du sommet tripartite Monténégro-RFY-Serbie du 26 octobre où le Président Djukanovic, le Président Kostunica et le Premier ministre serbe Djindjic n'ont été d'accord que pour annoncer leur décision de laisser le Monténégro statuer par référendum sur son propre avenir. Depuis, la France n'a pas ménagé ses efforts, avec ses partenaires de l'Union européenne, pour encourager les autorités concernées à la reprise du dialogue, et la situation semble maîtrisée. Sur un plan bilatéral, le ministre des affaires étrangères a rappelé à ses interlocuteurs yougoslaves, notamment lors de la visite du Premier ministre fédéral Dragisa Pesic à Paris, le 20 novembre, combien Belgrade bénéficiait de l'entier soutien de la France dans ses efforts pour la préservation du cadre fédéral. Le Président de la République et le ministre ont eu récemment encore l'occasion de s'exprimer à ce sujet lors de la visite présidentielle à Belgrade le 7 décembre. Dans le même esprit, à l'échelon de l'Union européenne, suite aux conclusions du conseil des affaires générales du 19 novembre, le secrétaire général/Haut représentant s'est rendu à Belgrade et Podgorica les 27 et 28 novembre. Le message de M. Solana a été ferme : la reprise immédiate du dialogue est indispensable, le Monténégro a tout à gagner au maintien d'un cadre fédéral a fortiori rénové. Dans le prolongement de cette mission, le Conseil européen de Laeken des 14 et 15 décembre a donné mandat exprès au Haut représentant pour encourager le dialogue entre Belgrade et Podgorica en vue d'une solution négociée pour le statut d'un Monténégro démocratique dans une République fédérale de Yougoslavie démocratique. La reprise du dialogue le 17 décembre dernier entre les autorités monténégrines, fédérales et serbes à Belgrade, en présence du Haut représentant, couronne ces efforts et va dans le bon sens. Les parties se sont mises d'accord pour constituer avant la fin de l'année des groupes de travail au niveau d'experts en vue de discuter des aspects spécifiques et techniques de l'avenir du cadre fédéral. Il est prévu que l'Union européenne, qui bénéficie naturellement du plein soutien de la France, fournisse son expertise et ses bons offices au cours des négociations. La France espère vivement que ces discussions aboutiront rapidement à un accord en faveur d'une Fédération rénovée, respectueuse des prérogatives de chacune des Républiques et des droits des citoyens.

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