Question de M. VIAL Jean-Pierre (Savoie - RPR) publiée le 26/04/2001

M. Jean-Pierre Vial attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'augmentation inquiétante des hospitalisations psychiatriques sans consentement. Alors que la France est le pays européen ayant le plus recours à l'internement administratif, la loi sur la présomption d'innocence du 15 juin 2000 (nº 2000-516) donne qualité au juge des libertés et de la détention, se substituant au président du tribunal de grande instance, pour ordonner la sortie immédiate d'une personne contestant son internement. Ce même magistrat se voit aussi confier par la loi le rôle de statuer sur la détention des délinquants et criminels afin de contrôler les décisions du juge d'instruction. En donnant compétence au juge pénal, la loi de juin 2000 a insidieusement assimilé le traitement à une sanction, ce que le corps médical a toujours dénoncé. De plus, devant la forte augmentation des délits, l'intervention du juge des libertés risque d'avoir pour conséquence de l'amener à déresponsabiliser la petite délinquance en ayant recours à la psychiatrisation, déchargeant ainsi les instances pénales et les prisons d'un grand nombre de cas. Alors que le Conseil de l'Europe incite la France depuis 1985 à judiciariser le système d'internement, la loi sur la présomption d'innocence répond à cet objectif de la plus mauvaise des façons en en confiant la responsabilité au juge pénal. Considérant que le recours à l'hospitalisation psychiatrique ne doit pas servir de pis-aller pour faire face au manque d'innovation du système pénal, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle entend prendre afin de mieux assurer la distinction entre traitement pénal et traitement psychiatrique.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 04/10/2001

La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que le législateur a entendu, dans le cadre de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, instituer une nouvelle fonction au sein de la magistrature du siège, le juge des libertés et de la détention, dont les attributions sont étendues aux décisions juridictionnelles concernant de manière générale la protection des libertés individuelles, au-delà de la stricte procédure pénale. C'est pourquoi l'article 49 de la loi précitée confère au juge des libertés et de la détention des compétences qui relevaient auparavant de celle du président du tribunal de grande instance, telle celle visée à l'article L. 351 de l'ancien code de la santé publique, devenu l'article L. 3211-12 dudit code. Cet article permet à toute personne hospitalisée sans son consentement, à ses tuteur, curateur, conjoint, concubin, parent ou toute personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade, de saisir par simple requête le juge des libertés et de la détention qui statue, en la forme des référés après débat contradictoire et après vérifications nécessaires, et qui peut ordonner la sortie immédiate de la personne concernée. Cet article précise également que le procureur de la République dispose du même pouvoir de saisine et que le juge des libertés et de la détention peut se saisir d'office. Il convient d'ajouter que d'autres dispositions légales ont été modifiées dans le même esprit de cohérence à l'égard de la fonction de juge des libertés et de la détention, gardien des libertés individuelles, telles celles de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, celles du livre des procédures fiscales ou encore celles du code des douanes. Il faut préciser que l'ensemble de ces dispositions entreront en vigueur, selon l'article 49 de la loi du 15 juin 2000 précité, deux ans après la publication de cette loi, soit le 15 juin 2002. Cependant, à ce jour, le président de tout tribunal de grande instance peut d'ores et déjà conférer les fonctions précitées au juge des libertés et de la détention nommé dans sa juridiction. Ainsi, l'honorable parlementaire aura pu observer que ce transfert de compétence à un magistrat spécialisé ne signifie en aucune manière une pénalisation de procédures qui relèvent de la garantie des libertés individuelles.

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