Question de M. PEYRAT Jacques (Alpes-Maritimes - RPR) publiée le 07/12/2000
M. Jacques Peyrat appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le problème croissant de la délinquance des mineurs. En effet, un pourcentage sans cesse en augmentation de délits et d'actes d'incivilité commis en milieu urbain est le fait d'enfants ou d'adolescents de plus en plus jeunes, souvent âgés de moins de treize ans. Nombre de nos concitoyens ont d'ailleurs le sentiment que ces délinquants bénéficient d'une impunité quasi totale qui les incite à recommencer devant l'absence ou l'insuffisance de sanction. Le principe de la mise sous tutelle des allocations familiales, qui permettrait pourtant de responsabiliser certains parents trop laxistes, n'ayant pas été retenu par le Gouvernement, il lui demande quelles dispositions elle entend prendre pour remédier à ce fléau majeur qui menace l'ordre public et pourrit la vie quotidienne de nombre de nos concitoyens. Il souhaiterait notamment savoir pourquoi les mesures de réparation-médiation telles que les travaux d'intérêt général ne sont pas plus souvent mise en oeuvre alors que, du fait de leur visibilité et de leur rapidité d'application, elles sont appréciées et réclamées par la population.
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Réponse du ministère : Justice publiée le 19/04/2001
Réponse. - La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le traitement de la délinquance juvénile figure parmi les préoccupations essentielles du Gouvernement qui fixe annuellement depuis 1998 des orientations de politique pénale lors des conseils de sécurité intérieure. Il y a lieu en effet de rappeler que le conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998 a arrêté un pan gouvernemental de lutte contre la délinquance juvénile impliquant pour une grande part l'autorité judiciaire dont l'action a été développée dans une circulaire du garde des sceaux en date du 15 juillet 1998. Les orientations définies portaient sur la nécessité d'apporter une réponse judiciaire rapide aux premiers faits de délinquance commis par les mineurs, à associer les familles et les acteurs sociaux concernés en permettant aux parents d'exercer leurs responsabilités éducatives et en les impliquant notamment dans les procédures concernant leur enfant mineur. La circulaire du garde des sceaux en date du 13 octobre 1999 a dressé un bilan de ces directives qui a permis de constater que l'ensemble des juridictions avaient mis en place le traitement en temps réel des procédures pénales à l'encontre des mineurs délinquants et avaient diversifié la réponse judiciaire à ces actes de délinquance, en ayant recours à l'ensemble des mesures alternatives aux poursuites, telles l'avertissement, le classement sous condition, la médiation pénale et la mesure de réparation. Une augmentation sans précédent des moyens de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse permettra d'ailleurs à brève échéance d'améliorer les conditions d'exercice, dans des délais utiles, de la prise en charge des mesures éducatives et des mesures alternatives aux poursuites. A cet égard, la loi de finances 2001, prévoit pour la deuxième année consécutive, un programme exceptionnel de création d'emplois et d'autorisation de recrutements : 380 emplois supplémentaires, dont 230 emplois d'éducateurs et de chefs de service éducatif ont été créés par la loi de finances 2001, ce qui correspond à 1 010 emplois supplémentaires créés depuis 1998. En outre cette circulaire appelle l'attention des parquets sur la nécessité d'utiliser les qualifications pénales les plus adaptées en retenant, notamment pour les actes s'inscrivant dans le cadre de violences urbaines, les circonstances aggravantes de réunion et, plus exceptionnellement, de bande organisée, d'association de malfaiteurs ou de participation à un attroupement armé étant porteur d'une arme. En effet, il est apparu nécessaire que l'implication des mineurs dans des phénomènes de violences urbaines notamment lorsqu'elles seraient commises en bande reçoive une traduction juridique exacte et dissuasive, dans le cadre des poursuites engagées par les parquets. De même, il semble important que parallèlement, l'action éducative entreprise à l'égar de ces mineurs intègre cette dimension collective. A cet égard, le prononcé d'une mesure de réparation ou d'une peine de travail d'intérêt général à l'encontre des mineurs constitue des réponses particulièrement adaptées à des actes de délinquance commis par ces derniers. En premier lieu, la mesure de réparation consiste à faire effectuer à un mineur auteur d'une infraction la prestation la plus adaptée soit au profit de la victime, soit au profit de la société. Elle peut être proposée au mineur à chaque phase de la procédure, y compris de façon présentencielle. Elle a été particulièrement encouragée pour apporter une réponse à la fois pénale et éducative aux mineurs délinquants dont les actes délictueux nécessitent une réponse complète, plus élaborée que les rappels à la loi exercés par les délégués du procureur : elle permet aux mineurs d'appréhender leur propre responsabilité, de prendre conscience de la portée de leurs actes à l'égard des victimes. 13 516 mesures de réparation ont été exercées par les services de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ou d'autres services éducatifs habilités en 1999, soit une augmentation de 7,9 % par rapport à 1998. En second lieu, il convient de noter que le nombre de condamnations à des peines de travail d'intérêt général est en augmentation constante, progressant de 1 162 en 1994 à 2 628 en 1999. Dès lors, il apparaît que l'intérêt éducatif et pédagogique de la peine de travail d'intérêt général qui ne peut être prononcé que par le tribunal pour enfants à l'encontre des mineurs de plus de 16 ans, dont la non-exécution peut être sanctionnée d'un emprisonnement ferme, n'a pas échappé aux juridictions des mineurs. Enfin, le recrutement déterminant de personnels de la protection judiciaire de la jeunesse pour l'année 2001 sera également susceptible de renforcer le suivi de cette peine alternative à l'emprisonnement. Enfin, le conseil de sécurité intérieure du 30 janvier 2001 a réaffirmé l'engagement du Gouvernement pour lutter ocntre l'insécurité et pour améliorer la prise en charge des mineurs délinquants. Afin de mieux répondre aux actes de délinquance troublant la vie quotidienne, ce conseil de sécurité intérieure a décidé la génralisation d'une nouvelle modalité d'exercice de la mesure de réparation ou de travail d'intérêt général consistant à soumettre les auteurs d'infractions à une obligation de formation civique. A cet égard, l'apaisement des tensions dans un quartier nécessite cette dimension plus citoyenne de la sanction pénale afin de rétablir la sérénité des conditions de vie dans un quartier. Un travail pédagogique peut modifier les comportements individuels en profondeur en associant les familles, selon les modalités diverses. Des expériences ont déjà été menées en ce sens dans les tribunaux, tels les stages citoyens au parquet de Colmar, les stages institutionnels à la protection judiciaire de la jeunesse du Nord, les stages d'éducation à la citoyenneté à Mulhouse, modules dialogue citoyen au tribunal de grande instance de Versailles.
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