Question de M. BRET Robert (Bouches-du-Rhône - CRC) publiée le 23/11/2000
M. Robert Bret appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés économiques majeures que connaissent nombre d'avocats dans l'exercice de leur profession du fait de l'insuffisance des indemnités qu'ils perçoivent au titre de l'aide juridictionnelle. Issue de la loi du 10 juillet 1991, l'aide juridictionnelle a pour objet de permettre aux personnes les plus démunies d'avoir accès au droit et à la justice grâce à une aide de l'Etat, versée aux avocats sous forme d'une indemnisation forfaitaire. Cette indemnité, calculée sur la base d'une unité de valeur, qui vaut selon les barreaux entre 136 francs et 154 francs, n'a pas connu de réévaluation conséquente depuis sa création et se révèle aujourd'hui plus que dérisoire. La tarification des actes des avocats, dans le cadre d'une prise en charge, est si faible qu'elle ne couvre pas les frais engagés par ces derniers pour la défense de leurs clients (nombre d'heures passées sur le dossier, déplacement à une audience, visite rendue à la personne incarcérée...). Or, les avocats ne peuvent plus continuer de la sorte à travailler à perte. Comment pourraient-ils, par ailleurs, assurer une justice égale pour tous s'ils ne perçoivent pas une juste rémunération de leurs actes ? Ainsi, faute d'avoir mis en oeuvre les moyens nécessaires pour l'application de la loi de 1991, l'aide juridictionnelle ne remplit plus son rôle. En effet, non seulement elle ne permet plus de garantir le principe de l'égalité de chacun devant la justice mais de plus, les plafonds prévus pour bénéficier de cette aide sont si faibles qu'ils ne permettent pas non plus d'assurer l'égalité d'accès de tous au droit. Devant un tel constat, de nombreux barreaux ont entamé une grève du zèle, avec comme point d'orgue la journée d'action du lundi 13 novembre 2000, jour du vote par l'Assemblée du budget de la justice pour 2001. A noter que si ce budget est en hausse de 3 % et se situe donc dans le prolongement des précédents depuis 1997, en revanche force est de constater qu'il ne prévoit aucune revalorisation substantielle concernant l'aide juridictionnelle (son montant stagne à 1,5 milliard de francs pour 2001), pas plus qu'il ne prévoit le financement des mesures, contenues dans la loi nº 2000-516 du 15 juin 2000, qui étendent le champ d'intervention des avocats : présence de l'avocat dès la première heure de garde à vue, dans les chambres disciplinaires des établissements pénitentiaires... Les revendications exprimées par les avocats lors de leur journée d'action portent notamment sur l'ouverture de négociations avec les ministères concernés afin de remettre à plat le système de l'aide juridictionnelle existant, sur le fait que leur travail soit rémunéré équitablement et non plus indemnisé forfaitement, sur le doublement immédiat de leurs indemnisations actuelles, sur la signature immédiate des décrets d'application des lois du 18 décembre 1998 sur l'accès au droit et du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence et les droits des victimes. Prenant acte de l'engagement pris récemment par M. la ministre de repenser le système de l'aide juridictionnelle pour l'horizon 2003, il lui demande cependant quels moyens urgents elle compte mettre en oeuvre pour remédier sans attendre à cette situation critique.
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Réponse du ministère : Justice publiée le 05/04/2001
Réponse. - La garde des sceaux, ministre de la justice a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que, consciente de la nécessité de satisfaire le besoin d'accès au droit et d'accès à la justice, elle a procédé le 13 décembre 2000 à l'installation d'une commission présidée par M. Paul Bouchet, conseiller d'Etat honoraire, président d'ATD Quart-Monde, regroupant des personnalités de divers horizons en la chargeant de la mission de remettre à plat l'ensemble du dispositif de l'aide juridique. Les travaux de cette instance, qui sont conduits dans un esprit de large concertation et qui s'achèveront d'ici le 30 avril prochain, devront déboucher sur des propositions concrètes de telle sorte qu'un projet de loi puisse être finalisé à l'été 2001. Ces travaux intègreront la question de l'assistance du détenu faisant l'objet d'une procédure disciplinaire. Dans l'intervalle, sont appliquées les mesures prévues dans le protocole d'accord qu'elle a conclu le 18 décembre 2000 avec les organisations professionnelles représentant les avocats et traduites dans le décret nº 2001-52 en date du 17 janvier 2001 publié au Journal officiel du 19 janvier. Ce décret procède aux revalorisations rendues nécessaires par l'évolution et la complexification de sept contentieux principaux (divorces et autres instances devant le juge aux affaires familiales, assistance éducative, procédures devant le juge de l'exécution, contentieux prud'homaux, baux d'habitation, procédures correctionnelles, procédures prévues par l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France). De même, il relève le montant de la contribution de l'Etat à la rétribution de l'avocat intervenant au cours de la garde à vue pour tenir compte de l'entrée en vigueur, depuis le 1er janvier 2001, des dispositions de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. Enfin, il créé en matière d'application des peines, une indemnisation de l'avocat assistant le condamné dans les conditions fixées par l'alinéa 6 de l'article 722 du code de procédure pénale, pour la période du 1er janvier au 16 juin 2001. La circulaire d'application de ce décret a été diffusée aux juridictions et aux barreaux le 26 janvier 2001. Les projets de décret portant application des dispositions de la loi du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits ayant un impact en matière d'aide juridictionnelle, sont rédigés ; ils sont soumis depuis novembre 2000 à la consultation des professionnels du droit concernés. Ils pourront être publiés dès que les organisations professionnelles saisies pour avis auront fait connaître leurs observations.
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Erratum : JO du 17/05/2001 p.1708
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