Question de M. PENNE Guy (Français établis hors de France - SOC) publiée le 05/10/2000
M. Guy Penne attire l'attention de M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie sur les conséquences prévisibles de la signature par le gouvernement français, le 16 octobre prochain à Londres, du projet d'accord intergouvernemental mettant fin à l'obligation de traduction des brevets européens en français. Selon ce projet, les Etats signataires renonceraient aux exigences de traduction en langue nationale actuellement en vigueur. Les déposants choisiraient librement l'une des trois langues officielles : allemand, anglais ou français. La majorité des brevets européens étant déjà déposée en anglais, il est probable que le français sera très rapidement marginalisé au seul bénéfice de l'anglais. Outre des conséquences économiques néfastes pour notre tissu industriel, essentiellement pour les PME-PMI (petites et moyennes entreprises - petites et moyennes industries), cet accord portera un grave préjudice au rayonnement de la langue française. Alors que le fançais est encore la langue d'accès au savoir culturel, technique et juridique pour des millions d'individus dans le monde, cet accord le viderait peu à peu de sa vraie substance. L'académie des sciences morales et politiques a d'ailleurs, au sujet de ce projet d'accord, récemment mis l'accent sur " le danger d'accélérer et de généraliser un mouvement tendant à faire de la langue anglaise la langue unique de la technologie et de l'industrie ". Il souhaite savoir si le ministère envisage une action auprès des autres départements ministériels concernés par ce projet d'accord pour que la France revienne à la position retenue en juin 1999 entre le Gouvernement et les professionnels, qui consistait à limiter l'obligation de traduction à la seule partie signifiante de la description du brevet, indispensable pour la compréhension de l'invention. Cette solution aboutissait à réduire de 50 % le coût de traduction du brevet, tout en préservant les intérêts des langues nationales européennes.
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Réponse du ministère : Coopération publiée le 14/12/2000
Réponse. - Le coût élevé du brevet européen constitue un frein à l'innovation à la compétitivité européenne. C'est la raison pour la quelle la France a lancé en juin 1999, comme vous le savez, une conférence intergouvernementale visant à modifier la convention de Munich sur le brevet européen, avec pour objectif, d'une part, la réduction des coûts supportés par les inventeurs losqu'ils ont recours à l'Office européen des brevets et, d'autre part, l'amélioration de la sécurité juridique des brevets. Un groupe de travail a été mandaté pour faire des propositions visant à diminuer de moitié les frais liés aux traductions, qui représentent le premier poste de dépense dans la procédure d'obtention d'un brevet européen. Les travaux de ce groupe ont révélé que la proposition française de limiter les exigences de traduction à la seule production d'une traduction partielle n'était pas soutenue par les autres délégations. En revanche, il s'est dessiné un mouvement en faveur de l'abandon complet des exigences de traduction, pour peu que le brevet soit disponible en anglais. Un tel dispositif était bien évidemment inacceptable au regard de la politique de défense de la langue française. Aussi le Gouvernement a-t-il donné instruction à notre délégation au sein de la conférence intergouvernementale de s'y opposer. Cette attitude ferme a permis l'adoption d'un compromis plus satisfaisant au regard des deux impératifs qui ont guidé notre démarche : l'amélioration de la compétitivité européenne et la défense de la langue française. En effet, l'accord additionnel facultatif issu des travaux du groupe prévoit désormais un régime fondé sur les trois langues de travail de l'office européen des brevets, dont le français. Cet accord offre les garanties souhaitées pour la préservation de la place du français. Il prévoit que tout pays peut continuer à exiger la traduction des revendications, partie la plus significative du fascicule du brevet. En outre, selon l'interprétation souhaitée par la France, il ménage la possibilité pour les Etats qui le souhaitent de faire assurer la traduction du fascicule du brevet à leurs propres frais. Pourtant, en dépit de ces garanties, l'accord suscite dans les milieux intéressés, comme le montre la question posée, de nombreuses interrogations voire des inquiétudes auxquelles le Gouvernement est très sensible. Aussi, à la conférence intergouvernementale qui s'est tenue les 16 et 17 octobre 2000 à Londres, notre délégation, conduite par le secrétaire d'Etat à l'industrie, a annoncé qu'elle ne pouvait à ce jour envisager la signature de l'accord proposé. Le Gouvernement entend poursuivre ses consultations en sollicitant toutes les parties intéressées : parlementaires et élus, entreprises et chercheurs, avocats, conseils en propriété industrielle, académies... C'est à la lumière de ces résultats que le Gouvernement arrêtera sa position à l'égard de l'accord, au plus tard le 30 juin 2001.
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