Question de Mme DIEULANGARD Marie-Madeleine (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 03/10/2000

Mme Marie-Madeleine Dieulangard souhaite interroger Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur la fixation des périodes ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité pour les salariés ayant été exposés à l'amiante, en particulier dans des établissements de construction et de réparation navale. La liste de ces établissements et des métiers, ainsi que les dates retenues pour la durée d'exposition figurent dans un arrêté du 7 juillet 2000. Pour les chantiers de l'Atlantique, à Saint-Nazaire, la date butoir est fixée à 1975. Or il est avéré que l'amiante a été utilisée bien au-delà, au moins jusqu'aux années 1980. Il paraît donc essentiel que le temps réel d'exposition à l'amiante soit pris en compte afin que les mesures de départ anticipé puissent bénéficier à l'ensemble des salariés qui auraient été exposés. Elle souhaite connaître les critères retenus pour la détermination de cette date. Le Gouvernement entend-il réexaminer cette date, notamment au regard des éléments apportés par plusieurs organisations syndicales et par l'Association des victimes de l'amiante ?

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Réponse du ministère : Santé publiée le 08/11/2000

Réponse apportée en séance publique le 07/11/2000

Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Ma question, qui s'adresse à Mme le secrétaire d'Etat
à la santé, concerne les modalités de mise en oeuvre de la préretraite « amiante » et le calcul
des dates de fin d'exposition à ce matériau dangereux. Elle concerne également la liste des
établissements retenus, car certaines entreprises sous-traitantes de la construction et de la
réparation navale ont été oubliées.
En 1998, le Gouvernement a souhaité instituer une allocation de cessation anticipée d'activité
pour les salariés ayant été exposés à ce matériau, susceptible de provoquer des pathologies
graves telles que les plaques pleurales, les asbestoses ou les mésothéliomes.
Un arrêté du 7 juillet 2000 précise la liste des entreprises, des métiers et des périodes
d'exposition pour la construction et la réparation navale.
Plusieurs organisations syndicales, mais aussi l'association de défense des victimes de
l'amiante, se mobilisent car, pour le chantier de Saint-Nazaire, le choix de l'année 1975
comme date de fin d'exposition à l'amiante pose un problème.
En effet, l'écoulement des stocks d'amiante pour le flocage s'est poursuivi au-delà de 1975.
Puis un autre procédé a été utilisé jusqu'aux années quatre-vingt-dix : il s'agit de panneaux en
marinite, composé d'amosite qui est, selon l'Institut national de recherche et de sécurité pour
la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, une des variétés
d'amiante les plus dangereuses. A l'occasion de leur manipulation, des fibres ont été inhalées
par les salariés jusqu'aux années 1990, et des joints contenants de l'amiante ont été
employés jusqu'en 1997.
Vous comprendrez donc, madame la secrétaire d'Etat, que les salariés aient été émus lors de
la parution de l'arrêté de juillet dernier alors que, pour les sites de la Normed, où étaient
exercés les mêmes métiers dans des conditions techniques comparables, la date retenue
correspond, en fait, à la fermeture de cette entreprise en 1989.
Par ailleurs, certaines personnes qui seraient concernées par la préretraite « amiante »
échappent, de fait, à ce dispositif. Elles sont aujourd'hui au chômage. Je pense en particulier
aux 450 salariés de l'entreprise Dubigeon, qui avaient été remerciés. Pour eux, la situation est
encore plus injuste, car ils sont privés de ce dispositif.
En outre, sont absentes de la liste de certaines entreprises de sous-traitance navale, ainsi
que des entreprises de services, notamment de nettoyage.
Il paraît donc essentiel que le temps réel d'exposition à l'amiante soit pris en compte - et ce
pour tous les salariés -, tout comme il paraît équitable de faire bénéficier de ce dispositif les
salariés atteints d'affections pleurales, considérées comme bénignes et classées en catégorie
B du tableau n° 30 des maladies professionnelles, car ils ne sont pas répertoriés parmi les
bénéficiaires de ce dispositif.
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer les critères qui ont été retenus pour
arrêter l'année 1975 comme date limite d'exposition pour ces entreprises ? Le Gouvernement
envisage-t-il de réexaminer cette décision, notamment au vu des informations fournies par les
représentants des personnels ? Peut-il, de même, envisager d'intégrer parmi les bénéficiaires
de ce dispositif les salariés atteints par des lésions pleurales dites bénignes ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés. Madame la
sénatrice, nous savons tous les souffrances qu'endurent ceux qui ont été exposés à l'amiante
et la détresse de ceux qui leur sont proches.
Comme souvent, l'injustice s'est acharnée sur les plus fragiles. Ce sont le plus souvent les
salariés astreints à des emplois pénibles qui, aujourd'hui, sont fauchés par la maladie.
C'est pourquoi, depuis que ce gouvernement est en place, il a oeuvré pour que ces drames
humains ne se doublent pas de drames sociaux. D'importantes mesures ont été prises pour
faciliter l'accès à la reconnaissance et à la réparation des maladies professionnelles pour
l'ensemble des personnes qui en sont victimes. Des mesures plus spécifiques pour les
maladies liées à l'amiante ont également été mises en oeuvre.
Le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante est, bien
évidemment, un élément fondamental de cette politique. Créé en 1999, il a été élargi par la loi
de financement de la sécurité sociale pour 2000 au secteur de la construction et de la
réparation navale.
La mise en oeuvre de ce dispositif nécessitait de recenser les entreprises concernées et, pour
chacune, les périodes pendant lesquelles l'amiante avait été utilisée. C'est l'objet de l'arrêté du
7 juillet 2000.
Je crois utile de préciser que ce travail de recensement est particulièrement lourd et
minutieux, vous le savez. Il s'agit de repérer des centaines d'entreprises, or certaines ont
disparu depuis longtemps, tandis que d'autres, touchées par les restructurations, ont changé
plusieurs fois de dénomination, de raison sociale ou de propriétaire.
Ce travail est réalisé en étroite concertation avec les services déconcentrés du ministère, avec
les caisses de sécurité sociale ou encore avec les mutuelles des secteurs concernés.
Comme nous l'avons fait pour les entreprises de fabrication d'amiante, nous prendrons autant
de textes qu'il sera nécessaire dans le domaine de la construction et de la réparation navale
pour couvrir tant les entreprises que les périodes ouvrant droit à l'allocation de cessation
anticipée d'activité.
Pour ce faire, nous nous appuyons notamment sur les informations transmises par les
organisations syndicales et par les associations d'aide aux victimes. Je tiens d'ailleurs à
souligner la qualité et le sérieux de leurs interventions. En ce domaine, leur collaboration nous
est indispensable !
Des modifications de l'arrêté du 7 juillet 2000 sont d'ores et déjà prévues et, dans le cas
particulier des Chantiers de l'Atlantique, grâce aux informations transmises par les syndicats,
après vérification auprès des caisses régionales d'assurance maladie et des directions
régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, nous allons prolonger la
période ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité dans cette entreprise dans
le sens que vous souhaitez. Les modifications nécessaires seront prochainement soumises
pour avis, comme le prévoit la procédure, à la commission des accidents du travail et feront
l'objet d'un arrêté modificatif.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de
cette réponse très ouverte, de nature à donner satisfaction aux salariés intervenant dans la
construction et la réparation navale.
Restent ceux qui sont atteints de maladies professionnelles classées dans la catégorie B du
tableau n° 30.
Je vous demande de ne pas fermer ce dossier. En effet, nous nous trouvons dans une
situation paradoxale où des salariés ayant été exposés mais ne manifestant aucun signe
pathologique peuvent envisager de partir en préretraite anticipée alors que d'autres, qui ont une
pathologie déclarée, certes considérée comme bénigne, se voient refuser le bénéfice de ce
dispositif.

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