Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 13/07/2000

Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la nécessité pour la France de signer et ratifier le deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort. Il est, pour tous les Etats membres des Nations unies, le point de départ d'une conception plus large et plus profonde du droit à la vie. De plus, en affirmant que " l'abolition de la peine de mort contribue à promouvoir la dignité humaine et le développement progressif des droits de l'homme ", ce protocole inscrit l'abolition dans les principes énoncés dans le préambule de la Déclaration universelle des droits de l'homme. La peine de mort ne peut plus être considérée comme une simple question qui relève de la politique des Etats en matière pénale. La France a reconnu l'importance de ce texte puisque le 15 décembre 1989, au cours de la réunion de l'assemblée générale des Nations unies, elle a, avec la majorité des Etats membres, voté en sa faveur. L'adoption de ce protocole a montré qu'il existe au sein même des Nations unies un courant relativement fort en faveur de l'abolition et il appartient à la France de le renforcer. Cette conception des droits de l'homme a incité le Parlement européen à adopter à plusieurs reprises des résolutions qui s'opposent inconditionnellement à la peine de mort et " exhortent les Etats membres de la communauté... à ratifier sans délai... le deuxième protocole facultatif annexé au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort. " Certes, la ratification du protocole nº 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a dressé un obstacle empêchant tout retour précipité de la France à la situation antérieure, et au regard de notre droit interne ce nouvel engagement est d'une portée limitée, mais il n'est cependant pas négligeable pour l'image de la France au sein des Nations unies et de l'Union européenne. Présidente de l'Union européenne pour six mois, la France se doit d'entreprendre dès à présent une démarche qui s'inscrit dans le prolongement logique du choix des pays démocratiques en matière de défense des droits de l'homme.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 24/08/2000

Réponse. - La France a aboli la peine de mort en 1981 et manifeste régulièrement son attachement à cette question. Elle a ainsi ratifié, le 17 février 1986, le protocole nº 6 additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à l'abolition de la peine de mort. Par ailleurs, la France a soutenu le projet de résolution relatif à la peine de mort présenté par l'Union européenne et adopté par la Commission des droits de l'homme des Nations unies, lors de sa 56e session, qui s'est tenue à Genève au printemps dernier. Si la France n'a pas signé et ratifié le deuxième protocole au Pacte international sur les droits civils et politiques, c'est en raison d'obstacles juridiques d'ordre constitutionnel. En effet, ce protocole, qui interdit toutes réserves et ne peut être dénoncé, fait obstacle au rétablissement de la peine capitale en cas de guerre ou de circonstances exceptionnelles. Or, si le Conseil constitutionnel a estimé que le protocole nº 6 à la Convention européenne ne portait pas atteinte au principe de la souveraineté nationale, c'est après avoir relevé que cet instrument laissait la possibilité de prévoir la peine de mort pour des actes commis en temps de guerre et qu'en outre il pouvait être dénoncé (décision nº 85-188 DC du 22 mai 1985). Il ressort a contrario de cette décision du Conseil constitutionnel que le deuxième protocole au Pacte international relatif aux droits civils et politiques pourrait être déclaré contraire à notre Constitution. En tout état de cause, comme l'honorable parlementaire le souligne elle-même, cet instrument ne présente pas un intérêt majeur pour la France, dans la mesure où elle est partie au protocole nº 6 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, instrument qui reste une référence incontestée en matière d'abolition de la peine de mort.

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