Question de M. MAMAN André (Français établis hors de France - UC-R) publiée le 15/06/2000

M. André Maman appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur l'affaire du droit de prêt dans les bibliothèques, qui dure depuis plusieurs mois déjà. En effet, il rappelle que, reconnu par une loi de 1957 et confirmé par une directive européenne de 1992, le droit pour un auteur de refuser que l'on prête gratuitement ses livres existe effectivement, mais n'a jamais été réellement appliqué. Or, depuis plus de deux mois maintenant, le Syndicat national de l'édition a fait signer une pétition par 288 écrivains réclamant que ce droit soit enfin respecté dans les bibliothèques. Cette pétition menace les lecteurs assidus des bibliothèques de devoir payer une somme supplémentaire correspondant à un droit de prêt alors qu'ils acquittent, déjà, pour la plupart, un droit d'inscription. Prenant parti pour les lecteurs, l'association des bibliothécaires français accepte d'appliquer la loi nº 85-660 du 3 juillet 1985 sur le droit d'auteur et propose que celui-ci soit payé par le Centre national du livre (un organisme paritaire) et par l'Etat ou les collectivités locales, ce que la majorité des éditeurs refusent. Il souligne que cette affaire, complexe par bien des égards, pose de nombreuses questions. Qui doit payer ? Les auteurs, en signant leur pétition, n'ont-ils pas transgressé certains principes de notre république (égalité de l'accès à la culture, gratuité de l'accès aux livres...) ? A quel fonds pourrait être attribuée cette nouvelle cagnotte si un droit d'emprunt était acquitté ? Par conséquent, il lui demande ce qu'elle compte entreprendre pour arbitrer ce conflit et laisser le droit aux citoyens les moins fortunés de pouvoir s'instruire dans nos bibliothèques publiques.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 09/11/2000

Réponse. - La directive européenne du 19 novembre 1992 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle fait obligation aux Etats de prévoir dans leurs législations nationales la possibilité de mettre en uvre un droit de prêt, ce qu'en tout état de cause le code français de la propriété intellectuelle rend possible depuis 1957. La question du droit de prêt est donc d'abord un problème de rémunération de la propriété intellectuelle pour un certain type d'usage du livre qui s'est indéniablement développé par l'action conjointe de l'Etat et des collectivités locales. Le développement des bibliothèques, dont plus de 50 % des prêts sont effectués au bénéfice des jeunes, a certainement permis de faire venir à la lecture tout un nouveau public. Il importe de préciser que ce développement ne s'est pas appuyé sur une gratuité absolue : on estime que 80 % des établissements pratiquent une tarification sous forme de droits d'inscription, qu'acquittent environ la moitié des usagers, compte tenu des exonérations catégorielles diverses, les décisions en la matière incombant aux collectivités responsables, conformément au principe de libre administration des collectivités territoriales. Pour autant, il ne saurait être question pour le Gouvernement de freiner le développement des bibliothèques et de " taxer " la lecture. La proposition visant à faire payer par l'usager une somme fixe pour chaque emprunt n'est donc pas recevable. En revanche, il n'est pas juste de priver les auteurs de leur droit à une rémunération qui peut prendre la forme de droits d'auteur proprement dits, mais pourrait également comprendre une amélioration des régimes de retraite. Pour assurer cette rémunération, deux modes de financement sont actuellement étudiés : un droit payé à l'achat des livres et un forfait par usager inscrit dont s'acquitteraient les établissements payeurs. Il importe que le dispositif qui sera finalement retenu n'alourdisse pas excessivement la charge des collectivités locales et ne les conduise pas à réduire leurs efforts pour les bibliothèques. L'ensemble du dispositif fait l'objet de discussions avec les représentants des élus au sein du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, ainsi qu'avec les professionnels.

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