Question de M. PEYRAT Jacques (Alpes-Maritimes - RPR) publiée le 27/04/2000
M. Jacques Peyrat rappelle à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, que, lors des débats parlementaires concernant la création du pacte civil de solidarité (PACS), avait été évoqué, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, un risque de dérapage permettant aux couples homosexuels d'adopter un enfant si le législateur n'inscrivait pas spécifiquement dans la loi l'interdiction d'une telle possibilité, qui dénaturerait l'essence même de la famille. Elle s'était alors vivement opposée à cet amendement. Or un récent jugement du tribunal administratif de Besançon a donné droit à la requête formulée par un couple de femmes homosexuelles, qui s'était vu refuser par le président du conseil général du Jura sa demande d'agrément en vue de l'adoption d'un enfant. Le tribunal administratif argue du fait que le président du conseil général a fait une " inexacte application des textes ", en particulier celui de 1985 qui dispose que " tout refus d'agrément ne peut être motivé par la seule constatation de l'âge ou de la situation matrimoniale du demandeur ". Il constate que cette décision risque de faire jurisprudence et que la brèche est ouverte à ce que l'on peut appeler l'" homoparentalité ", qui bafoue tous les principes de la famille. En conséquence il lui demande de prendre des mesures visant spécifiquement à interdire l'adoption par des couples homosexuels.
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Réponse du ministère : Justice publiée le 06/07/2000
Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'adoption n'est autorisée en droit français que dans deux situations précisément définies dans le code civil : soit l'adoption est demandée par deux époux voulant adopter ensemble un enfant ; l'enfant aura alors un lien de filiation adoptive à l'égard des deux requérants ; soit l'adoption est demandée par une seule personne, qu'elle soit célibataire, veuve ou mariée (le consentement de son conjoint sera alors requis) ; le code civil ne pose aucune autre condition sur ses choix de vie ; dans ce cas, l'enfant n'aura de filiation adoptive qu'avec cette personne. Ainsi, des concubins, qu'ils soient hétéro ou homosexuels, ne peuvent adopter ensemble un enfant. La décision du tribunal administratif de Besançon à laquelle l'auteur de la question fait référence ne concerne pas les conditions énoncées ci-dessus mais seulement l'agrément administratif, phase prélable de la procédure judiciaire d'adoption. Cet agrément est destiné à s'assurer de la capacité éducative et d'accueil des candidats à l'adoption, ce qui suppose une appréciation personnalisée dans chaque dossier. Dans l'espèce évoquée, le tribunal a estimé qu'une telle appréciation n'avait pas été opérée et que le refus d'agrément n'était fondé que sur une appréciation des habitudes de vie de la personne souhaitant obtenir celui-ci. En tout état de cause, l'agrément ne préjuge pas de la décision qui sera prise ultérieurement par le tribunal de grande instance et qui a pour seul critère l'intérêt de l'enfant qu'il appartient au juge d'apprécier souverainement. Il n'est donc pas possible d'en déduire des conséquences générales sur les conditions posées pour adopter un enfant. En outre, le pacte civil de solidarité n'a aucune incidence sur la filiation et l'état des personnes et n'a donc eu, en aucun cas, pour effet de modifier le droit régissant l'adoption. Il n'a pour objet que de fournir un cadre légal permettant à un couple d'organiser sa vie commune. Le garde des sceaux a constamment réaffirmé lors des débats sur le pacte civil de solidarité que le Gouvernement ne proposera pas une modification de la législation pour permettre à deux personnes de même sexe d'adopter ensemble un enfant. Celui-ci a besoin, pour la construction de son identité psychique, sociale et relationnelle, d'avoir face à lui au cours de son enfance et de son adolescence, un père et une mère.
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