Question de M. LEGENDRE Jacques (Nord - RPR) publiée le 27/01/2000
M. Jacques Legendre demande à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, s'il est exact qu'en cas de dégazage d'un cargo seuls les capitaines des navires sont passibles d'un jugement, alors que la responsabilité de l'armateur n'est pas recherchée. Il lui demande si elle envisage de modifier la loi pour aligner l'échelle française des peines sur celle, beaucoup plus sévère, de nos voisins anglais, et de poursuivre également les armateurs des navires.
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Réponse du ministère : Justice publiée le 27/04/2000
Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait savoir à l'honorable parlementaire qu'aux termes des articles 1er et 2 de la loi nº 83-583 du 5 juillet 1983, le capitaine d'un navire navigant dans les eaux territoriales françaises ou dans la zone économique exclusive (ZEE) qui se sera rendu coupable d'une infraction de pollution de la mer par des hydrocarbures sera puni - selon que la jauge brute du bâtiment dépasse ou non 150 tonneaux pour les pétroliers ou 500 tonneaux pour les autres navires - d'une peine d'un million de francs d'amende et d'un emprisonnement de deux ans ou de 300 000 francs d'amende et d'un emprisonnement d'un an. Entrent dans le champ d'application de ces dispositions les agissements dénommés " dégazages ", qui constituent des faits intentionnels, à la différence des pollutions accidentelles résultant d'une faute d'imprudence, réprimées par l'article 7 de la même loi. Les récents événements ayant entraîné une marée noire sur les côtes françaises relèvent de ce dernier texte et n'ont ainsi aucun lien avec les actes particulièrement inadmissibles auxquels se réfère la question. En effet, le " déballastage " - terme plus approprié pour décrire ces rejets d'hydrocarbures provenant le plus souvent des réservoirs destinés à la propulsion du navire - ne peut intervenir que sur ordre du capitaine qui en assume l'entière responsabilité pénale, conformément au principe de la personnalité des peines reproduit à l'article 121-1 du code pénal. Aux termes de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1983 susvisée et conformément à ce principe, la responsabilité du propriétaire ou de l'exploitant du navire ne se trouve engagée que s'il est démontré que celui-ci a donné l'ordre de commettre l'infraction, preuve bien évidemment difficile à rapporter. Une responsabilité pénale de plein droit du propriétaire, exploitant ou armateur du navire paraissant difficilement compatible avec les règles fondamentales de notre droit, il ne saurait être envisagé de faire supporter à ces derniers les conséquences pénales d'un fait commis par autrui, le capitaine n'ayant au surplus pas la qualité de préposé au sens du code du travail. Dans le cadre de la réflexion qui est actuellement menée sur le thème de la responsabilité pour fait de pollution, le ministère de la justice propose de renforcer, sinon de systématiser, les dispositions de l'article 10 de la loi susvisée qui prévoient que, " compte tenu des circonstances de fait et, notamment, des conditions de travail de l'intéressé, le tribunal pourra décider que le paiement des amendes prononcées à l'encontre du capitaine ou du responsable à bord (...) sera, en totalité ou en partie, à la charge de l'exploitant ou du propriétaire ". Toutefois, le tribunal ne pourra user de cette faculté que si ces derniers ont été cités à l'audience, comme c'est le cas actuellement. En toute hypothèse, la chancellerie prendra en considération les conclusions de la commission d'enquête créée sur l'initiative de l'Assemblée nationale sur la sécurité du transport maritime, des produits dangereux et polluants, afin d'apporter des réponses globales aux questions touchant à la protection du milieu maritime et du littoral, auxquelles ses services sont particulièrement sensibilisés.
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