Question de M. GAUDIN Jean-Claude (Bouches-du-Rhône - RI) publiée le 07/10/1999
M. Jean-Claude Gaudin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'attitude des banques qui abusent du caractère familial de l'entreprise artisanale en multipliant les garanties lors des emprunts à caractère professionnel. Les prêts ne sont en effet accordés aujourd'hui par les banques qu'à la condition que l'épouse signe une caution solidaire, mise en oeuvre à la moindre défaillance de l'emprunteur et mettant en péril les biens propres de la femme, les régimes matrimoniaux séparés et donc la structure familiale en elle-même. Cette pratique bancaire, particulièrement injuste dans le secteur de l'artisanat dans la mesure où hommes et femmes prennent des risques, porte bien souvent sur plusieurs dizaines de milliards de francs. Aussi, il lui demande s'il compte prendre des dispositions afin d'inciter les banques à prendre leurs responsabilités afin de ne plus lier la délivrance d'un prêt au principe de la caution solidaire.
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Réponse du ministère : Économie publiée le 30/12/1999
Réponse. - La caution solidaire est traditionnellement définie comme celle qui a renoncé aux bénéfices de discussion et de division. L'article 2021 du code civil dispose que dès lors que la caution a renoncé au bénéfice de discussion ou est obligée solidairement avec le débiteur, l'effet de son engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires. Dans le cas le plus fréquent, la caution a entendu renoncer au bénéfice de discussion et se soumettre aux règles de la soliarité excluant toute division de la dette. Un prêt, quel qu'en soit le bénéficiaire, est accordé en fonction de la capacité de remboursement de l'emprunteur sur la durée du concours. La garantie exigée, qui matérialise l'engagement du débiteur, vise uniquement à assurer à la banque qu'en cas de difficulté majeure, quelle qu'en soit la cause et en l'absence de solution transactionnelle, elle a la possibilité de récupérer tout ou partie de sa créance. La situation des artisans ne présente donc, de ce point de vue, aucune spécificité et les établissements de crédit ne se fondent pas sur le caractère familial de l'entreprise artisanale pour exiger l'engagement du conjoint. Une garantie s'apprécie en fonction de sa valeur. Aussi, l'établissement de crédit sollicité en vue d'accorder un prêt à une petite entreprise sous forme artisanale ou sociale peut-être conduit à considérer comme insuffisante la valeur des garanties apportées par le seul entrepreneur (patrimoine professionnel de valeur modeste) au regard du risque potentiel de défaillance de l'entreprise. C'est la raison pour laquelle il peut être amené à demander le cautionnement de l'épouse ou du conjoint de l'entrepreneur concerné dès lors que cette garantie présente une valeur supérieure. Dans le cadre de leurs relations contractuelles avec leur clientèle, les établissements de crédit sont seuls et pleinement responsables des risques qu'ils acceptent et sont, de ce fait, seuls juges de leurs décisions en matière d'attribution de prêts. Ils peuvent demander les garanties réelles et personnelles qu'ils estiment nécessaires et notamment la caution solidaire de l'épouse de l'emprunteur. Les pouvoirs publics ne peuvent intervenir dans les relations commerciales entre des établissements de crédit et leur clientèle, celles-ci relevant strictement du droit privé. Au demeurant, si les banques se trouvaient contraintes de renoncer à recourir à la caution solidaire dans les situations où cette garantie leur paraît appropriée, il s'ensuivrait très vraisemblablement un accroissement des refus de prêts qui, en définitive, serait préjudiciable à l'ensemble des artisans. L'article 60-I de la loi bancaire du 24 janvier 1984 prévoit d'ailleurs que, lorsqu'en vue d'octroyer un concours financier à un entrepreneur individuel, un établissement de crédit a l'intention de demander une sûreté réelle sur un bien non nécessaire à l'exploitation ou une sûreté personnelle consentie par une personne physique, il doit informer par écrit l'entrepreneur de la possibilité qui lui est offerte de proposer une garantie sur les biens nécessaires à l'exploitation de l'entreprise et doit indiquer, compte tenu du montant du concours financier sollicité, le montant de la garantie qu'il souhaite obtenir. Si un établissement de crédit ne respecte pas ces formalités, il ne peut se prévaloir des garanties qu'il aurait prises. Le prêteur est cependant libre d'accepter ou de refuser la garantie proposée par l'entrepreneur. Il convient de noter par ailleurs que plusieurs dispositions législatives, récemment complétées et renforcées, visent à informer et protéger la personne physique qui se porte caution d'un entrepreneur individuel pour les dettes professionnelles de ce dernier. En particulier, l'article 47 de la loi nº 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle dispose que " les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion figurant dans un contrat de cautionnnement d'une lettre contractuelle professionelle consenti par une personne physique au bénéfice d'un entrepreneur individuel sont réputées non écrites à l'engagement de la caution n'est pas limité à un montant global, expressément et contractuellement garanti, incluant le principal, les intérêts, les frais et accessoires ". L'article 104 de la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions a ajouté à l'article 47 précité une disposition faisant obligation au créancier d'informer la caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement. A défaut, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle a été informée. Par ailleurs, l'article 48 de la loi nº 84-148 du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises fait obligation aux établissements de crédit qui ont accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, d'informer avant le 31 mars de chaque année la caution du montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédent. A défaut d'accomplissement de cette formalité, l'établissement de crédit concerné est, dans ses rapports avec la caution, déchu des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Au surplus, en vertu d'une récente modification législative intervenue avec la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière, " les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapport entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ". Au demeurant, en vue d'éviter le recours au cautionnement de l'épouse ou du conjoint, les artisans et autres entrepreneurs individuels ont la possibilité de demander l'aval d'une société de caution mutuelle.
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