Question de M. CAZEAU Bernard (Dordogne - SOC) publiée le 22/07/1999

M. Bernard Cazeau souhaite attirer l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question de l'exploitation domestique des enfants en France et de l'immunité de juridiction pénale dont bénéficient certains employeurs. Au moment où la 87e Conférence annuelle de l'Organisation internationale du travail qui vient d'adopter une nouvelle convention et une nouvelle recommandation concernant " l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination ", il est anormal qu'en France, pays des droits de l'homme de surcroît, des enfants, le plus souvent des jeunes filles, soient acheminées depuis leur pays d'origine et entrent en France avec des papiers falsifiés ou inscrites sur le passeport de la famille ou de la personne chargée de les emmener. Ces enfants, qui n'ont pas de contact avec l'extérieur, sont tenus d'accomplir, sans rémunération, des tâches domestiques, incluant la garde des enfants de leur employeur, dans des conditions parfois très dures et les privant de tout accès à l'éducation. Même si une action a été menée depuis 1995 par le Comité contre l'esclavage moderne, permettant ainsi d'appréhender ces situations et de tenter de les régler par la prise en charge juridique, administrative et sociale des enfants, il n'en reste pas moins que des difficultés subsistent, souvent liées au statut social de l'employeur. A cet égard, il souhaiterait savoir quelles mesures elle envisage de mettre en oeuvre afin de pallier les problèmes soulevés et faire respecter ainsi les droits les plus élémentaires de la personne humaine.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 06/01/2000

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qu'une coutume internationale ancienne, soucieuse du respect des souverainetés étrangères, fait bénéficier les représentants diplomatiques étrangers (ambassadeurs, conseillers, secrétaires, attachés...) d'une immunité pénale pendant toute la durée de leur mission. Ce principe, partagé par tous les Etats, est notamment consacré par les Conventions internationales de Vienne, du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques et du 24 avril 1963 sur les relations consulaires. L'immunité de juridiction en découlant, gage d'indépendance, entraîne une incompétence d'ordre public des tribunaux français. Les représentants diplomatiques devraient en bénéficier pendant toute la durée de leurs fonctions, ainsi que les membres de leur famille. Par ailleurs, si l'inviolabilité personnelle est exclue en matière criminelle, les usages prohibent arrestations et détentions provisoires en matière correctionnelle, sauf en cas de renonciation expresse des Etats, laquelle est toujours possible. Tel a été le cas par exemple pour la condamnation d'un ex-ambassadeur, prononcé à la suite d'un accident mortel de la circulation qu'il avait occasionné en France. Les sanctions pénales relatives aux dispositions protectrices des enfants dans le droit pénal du travail français sont essentiellement de nature contraventionnelle, telle l'interdiction de l'emploi d'un mineur non libéré de l'obligation scolaire. L'immunité juridictionnelle s'applique donc, sauf cas de renonciation expresse. En tous les cas, les juridictions françaises sont compétentes pour juger les crimes, par exemple de séquestrations ou viols, accompagnant fréquemment l'exploitation domestique des enfants, car relevant d'un même processus d'avilissement. Si les autorités judiciaires connaissent des difficultés certaines pour être informés de telles situations, compte tenu de l'isolement subi par ces mineurs, il n'en demeure pas moins qu'elles démontrent, lorsqu'elles sont effectivement saisies, leur détermination pour lutter contre ce type d'infractions, comme la condamnation récente d'un employeur à une peine d'emprisonnement ferme l'a récemment illustré.

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