Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 10/06/1999
M. Nicolas About attire l'attention de Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire sur le contrôle exercé par l'Etat sur les conditions de vie des enfants au sein des établissements scolaires privés sous contrat. Il lui rappelle que la loi Debré du 31 décembre 1959 précise, dans son article premier, que les établissements privés sous contrat sont tenus d'accueillir " tous les enfants sans distinction d'origine, d'opinions ou de croyance ". Or, le règlement intérieur de certains établissements privés, fondé sur des préceptes religieux stricts - voire fondamentalistes -, constitue parfois un obstacle à l'admission d'enfants qui appartiennent à des confessions différentes. C'est notamment le cas d'une école hébraïque dont il a récemment eu connaissance, et qui bénéficie d'un contrat d'association avec l'Etat depuis 1990. Le règlement intérieur de cette école, strictement réservée aux filles, précise que les élèves doivent se conformer aux lois du Choul'han Aroukh notamment dans leur tenue vestimentaire, en portant " des collants, des jupes sans fentes qui couvrent le genou à l'avant et à l'arrière ", des vêtements qui couvrent les coudes et les clavicules, des cheveux attachés et des habits non moulants. Une élève qui ne respecterait pas ces règles strictes s'expose à un renvoi immédiat à son domicile. Mais au-delà de la tenue vestimentaire et du niveau scolaire, c'est toute la conduite des jeunes filles qui est mise sous surveillance. Interdiction leur est faite de fréquenter des garçons. Pour être considérée comme de " bonnes élèves ", il ne leur suffit pas d'obtenir de bons résultats scolaires. L'élève doit cumuler l'acquisition de bons résultats en Kodesh et en Hol et conserver une attitude et une moralité conformes aux règles de la Torah. Dans ces conditions, on comprend que tous les enfants ne puissent intégrer un tel établissement, même s'ils souhaitent le faire pour des raisons de proximité géographique. Bien entendu, il ne s'agit pas de revenir sur les libertés de culte et d'enseignement dont bénéficie notre système scolaire. Néanmoins, en vertu de l'article 3 de la loi Debré de 1959, l'Etat exerce théoriquement un contrôle sur l'enseignement dispensé au sein de ces établissements privés sous contrat. De plus, il lui rappelle que la récente loi du 18 décembre 1998 tendant à renforcer l'obligation scolaire, et dont il est l'initiateur, a permis aux inspecteurs d'académie de veiller au droit à l'épanouissement, à la socialisation et à la citoyenneté des enfants, conformément aux principes de la Convention internationale des droits de l'enfant, signée par la France en 1989. Si ces dispositions visaient en priorité les enfants instruits dans leur famille ou dans les établissements privés hors contrat, il lui demande quel contrôle excerce réellement l'Etat sur les enfants qui sont instruits au sein des écoles privées sous contrat. Dans la mesure où l'Etat signe un contrat d'association avec un établissement, ne doit-il pas, là plus encore qu'ailleurs, veiller aux conditions de vie qui y sont réservées aux enfants et qui semblent, parfois, bien peu conformes avec la nécessaire ouverture au monde et à la société dans lesquelles ces enfants sont appelés à vivre ?
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Réponse du ministère : Enseignement scolaire publiée le 13/01/2000
Réponse. - Conformément à l'article premier de la loi Debré du 31 décembre 1959, l'Etat proclame et respecte la liberté de l'enseignement et en garantit l'exercice aux établissements privés régulièrement ouverts. Placé sous le régime du contrat, l'établissement conserve son caractère propre. En application de l'article 9 du décret nº 60-389 du 22 avril 1960, le directeur de l'école assume la responsabilité de l'établissement et de la vie scolaire. L'élaboration du règlement intérieur relève donc de sa compétence. Il revient aux services des rectorats et des inspections académiques, tout en respectant le caractère propre des établissements privés sous contrat avec l'Etat, de contrôler la conformité de l'enseignement dispensé avec les programmes et horaires officiels, la légalité des règlements intérieurs, ainsi que les conditions de vie des élèves. Il va de soi que le contrôle exercé sur le respect de ces prescriptions dans les établisements privés sous contrat prend une importance encore accrue après la réaffirmation, par la loi du 18 décembre 1998, des droits des enfants à l'éducation. Dans l'hypothèse où des inspections établiraient des manquements de certains établissements sous contrat, l'autorité administrative serait fondée à procéder au retrait du contrat. De tels manquements peuvent être constitués soit par le refus d'inscrire un élève en raison de ses origines ou de ses croyances, en violation de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1959, soit par l'obligation faite à tous les élèves de participer, sans que leur famille puisse les en dispenser, à des exercices religieux. En conséquence, l'établissement scolaire se placerait dans l'illégalité si l'appréciation portée sur la connaissance et la pratique religieuses de l'élève, au titre d'une note de conduite, était prise en compte dans l'évaluation des résultats scolaires.
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