Question de M. RINCHET Roger (Savoie - SOC) publiée le 03/06/1999
M. Roger Rinchet appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le coût humain et financier que représente aujourd'hui le développement du trafic poids lourds. Au-delà des débats qui entourent l'indispensable développement du trafic ferroviaire du fret que le Gouvernement, ainsi qu'il l'a annoncé, envisage de doubler dans les dix années à venir et de la mise en oeuvre de grands projets structurants tel que le projet d'autoroute ferroviaire Lyon-Turin dont la réalisation, si elle est décidée, ne devrait pas intervenir avant de nombreuses années, il apparaît nécessaire de réfléchir aux moyens à mettre en oeuvre pour réduire autant que faire se peut le coût que représente le transport routier aussi bien pour la sécurité de nos concitoyens sur la route qu'en ce qui concerne les crédits qu'il faut consacrer chaque année à l'entretien du réseau routier national. Parmi ces solutions, il en est une très simple qui consiste, partout où cela est possible, à transférer le trafic poids lourds des routes aux autoroutes. Le principal obstacle à ce que les transporteurs routiers utilisent aujourd'hui l'autoroute tient à la modestie ou à l'absence d'aménagements tarifaires suffisamment attractifs proposés par les sociétés concessionnaires d'autoroute. Il lui cite ainsi en exemple la demande effectuée par les transporteurs savoyards, dans le cadre d'une coopérative, afin d'obtenir de la Société française du tunnel routier du Fréjus (SRTRF) un contrat d'abonnement interautoroute Caplis, demande restée à ce jour sans réponse. Il est bien évident que le surcoût que représente l'utilisation de l'autoroute pour les entreprises de transports routiers qui, pour bon nombre d'entre elles, sont très fragiles sur le plan économique, est très dissuasif et n'incite donc pas les transporteurs à franchir le pas. Parallèlement, l'impact financier que représente pour la collectivité nationale les dépenses liées à la sécurité, à la prise en charge des accidentés de la route, à l'environnement et à l'entretien du réseau national rendu plus lourd du fait de l'accroissement exponentiel du fret routier, est chaque année plus important. Il l'interroge en conséquence sur l'intérêt qu'il y aurait, de son point de vue, à ce que l'Etat puisse aider au financement d'une baisse significative des tarifs autoroutiers en faveur des camions de manière à rendre à terme et en contrepartie de cette aide l'utilisation des autoroutes obligatoire pour le transport routier. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer la suite qu'il pourrait réserver à cette proposition dont la charge serait en quelques années absorbée par les économies simultanément réalisées sur les dépenses de sécurité et d'entretien du réseau routier national.
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Réponse du ministère : Équipement publiée le 24/05/2001
Réponse. - Depuis juin 1997, le Gouvernement met en uvre une politique du transport de marchandises fondée sur l'organisation de la complémentarité entre les différents modes passant par un rééquilibrage en faveur du rail. Ainsi, l'objectif de doublement en dix ans du transport du fret par le rail a été fixé et les investissements ferroviaires des prochains contrats de plan Etat-régions sont près de huit fois plus importants que ceux de la précédente génération de contrats de plan. Un effort particulier sera entrepris en ce sens dans les zones sensibles que sont les massifs alpin et pyrénéen. La future percée alpine qui reliera Lyon et Turin permettra de faire circuler encore plus de fret par le rail et d'alléger d'autant le trafic autoroutier. Le ministre de l'équipement, des transports et du logement comprend tout à fait les préoccupations de l'honorable parlementaire et l'attrait particulier que peut représenter pour des transporteurs l'utilisation du réseau routier classique gratuit lorsqu'il remplit des fonctions similaires à une autoroute payante située en parallèle à son tracé. Cependant, la possibilité d'un transfert des poids lourds des routes vers les autoroutes ne peut être envisagée que pour le trafic de transit, les poids lourds restant contraints de circuler notamment sur les routes nationales pour les acheminements terminaux et les besoins de la desserte locale. Il n'est pas concevable de rendre obligatoire l'utilisation des autoroutes pour les transporteurs routiers. Outre qu'une mesure générale et permanente porterait atteinte à certaines libertés ou à certains droits fondamentaux comme la liberté d'aller et de venir, la liberté du commerce et de l'industrie, elle contredirait aussi les droits des riverains, serait incompatible avec la desserte fine du territoire et pénaliserait l'économie locale. Toutefois, il est possible aux maires, en raison des dangers particuliers que peut présenter la circulation des véhicules en cause pour la sécurité et la tranquillité publiques, d'interdire par arrêté la traversée de leurs agglomérations par le trafic lourd de transit, même si ces mesures ont pour effet de conduire les poids lourds à emprunter une autoroute à péage. Cela étant, les préconisations de l'honorable parlementaire sont déjà largement réalisées puisque plus de 50 % du trafic de poids lourds s'effectue d'ores et déjà sur le réseau autoroutier, lequel ne représente pourtant que 1 % du kilométrage du réseau routier français toutes voiries confondues et environ 25 % du réseau routier national (routes nationales et autoroutes). La comparaison avec la situation où l'autoroute est gratuite montre que les comportements de refus d'emprunt des itinéraires à péage ne sont pas représentatifs. Or, dans quelques situations locales, les gains d'exploitation générés par l'itinéraire autoroutier compensent généralement le coût actuel des péages. Il convient de souligner que dans le cadre de leur politique commerciale, les sociétés concessionnaires d'autoroutes proposent un système d'abonnement à des conditions avantageuses pour les poids lourds qui empruntent régulièrement les autoroutes à péage. Il s'agit de la carte d'abonnement poids lourds inter-sociétés (CAPLIS), valable sur l'ensemble du réseau autoroutier concédé, qui permet aux sociétés de transport qui sont propriétaires ou locataires en propre de leur flotte, de bénéficier de remises progressives sur leur facturation mensuelle, pouvant aller jusqu'à 30 %, selon le kilométrage effectué. Cet abonnement constitue déjà une incitation forte à l'usage de l'autoroute par les poids lourds. Toutes ces raisons expliquent qu'une baisse du prix des péages des poids lourds n'aurait que peu d'impact sur le taux d'utilisation du réseau autoroutier par ces derniers. D'autre part, la baisse de recettes des sociétés autoroutières qu'elle provoquerait devrait être compensée par un relèvement des tarifs des véhicules légers. De plus, les réflexions en terme de politique des transports tant au niveau français que communautaire visent plutôt à faire payer à l'avenir par les transports routiers leurs coûts d'infrastructure, voire leurs coûts environnementaux, ce qui est tout à fait légitime. Enfin, un abaissement généralisé de la tarification du transport de marchandises par autoroute irait à l'encontre de la volonté du Gouvernement d'accélérer la mise en uvre d'un meilleur partage modal, notamment au profit du rail.
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