Question de Mme DERYCKE Dinah (Nord - SOC) publiée le 26/05/1999
Mme Dinah Derycke souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur une réforme qu'elle appelle de ses voeux en matière de sécurité routière : la mise en place d'une formation pratique intégrée au permis de conduire et relative aux notions élémentaires de premiers secours dites " les 5 gestes qui sauvent ". Cette proposition fait l'objet d'une large adhésion tant auprès des Français (sondage mai 98 - 67 %) que des associations de secourisme. De nombreux pays pratiquent aussi avec succès cette méthode. Le comportement à adopter en présence d'un accident de la route est déjà intégré dans le programme national de formation à la conduite. Il reste toutefois théorique et insuffisant. Il convient maintenant d'y ajouter une formation pratique de 5 heures dont l'objet est d'apprendre 5 gestes précis, 5 réflexes : alerter, baliser, ranimer, compresser et sauvegarder. Une expérience in situ a été menée à ce sujet en 1992 en Charente-Maritime, elle souhaite savoir quels en ont été les enseignements. Un de ces gestes est sujet à controverse, il s'agit de la position latérale de sécurité. D'aucuns font valoir que mal pratiquée, elle serait à l'origine de lésions neurologiques graves. Ce n'est pas l'opinion d'éminents professeurs de médecine, de responsables de Service d'assistance médicale d'urgence (SAMU) et de Service médical d'urgence et de réanimation (SMUR) de sapeurs-pompiers. En effet, la formation intègre toutes les précautions nécessaires afin d'éviter de telles lésions et le principe de base enseigné reste de ne pas agir quand on ne se sent pas apte. De plus, cette pratique est préconisée à la fois par une circulaire de l'éducation nationale qui vise à développer cet enseignement dans les collèges et par les programmes nationaux de secourisme. Mais, surtout, cette technique simple a pour mérite d'empêcher un décès rapide de la victime par obstruction de ses voies respiratoires. L'assistance à la personne en danger ne laisse donc pas, dans ce cas, d'autre alternative. Une autre critique adressée à cette proposition repose sur l'oubli de ces 5 gestes de survie. Tout, au cours de la formation, est fait pour que ces gestes, délibérément limités au nombre de 5, deviennent des automatismes. S'il est vrai qu'un recyclage serait opportun, commençons par assurer la formation de base aux 6 à 7 000 candidats au permis de conduire ! Ni la formation nationale de base en matière de secourisme (AFPS), ni les points déjà abordés de façon théorique dans le cadre du permis de conduire ne prévoient de recyclage. Elle souhaiterait connaître son sentiment et son analyse sur cette proposition de réforme.
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Réponse du ministère : Tourisme publiée le 30/06/1999
Réponse apportée en séance publique le 29/06/1999
Mme Dinah Derycke. J'ai souhaité appeler l'attention de M. Gayssot sur une réforme que j'appelle de mes voeux en
matière de sécurité routière : la mise en place d'une formation pratique, intégrée au permis de conduire et relative aux
notions élémentaires de premiers secours dites « les cinq gestes qui sauvent ».
Le comportement à adopter en présence d'un accident de la route fait pour l'instant l'objet uniquement théorique, donc
insuffisant. Il conviendrait, maintenant, d'y ajouter une formation pratique de cinq heures visant à apprendre cinq gestes
précis, cinq réflexes : alerter, baliser, ranimer, comprimer et sauvegarder.
Cette proposition fait l'objet d'une large adhésion tant des Français - des sondages l'ont montré - que des associations
de secourisme. De nombreux pays pratiquent d'ailleurs cette méthode avec succès.
Le Secours routier français et la commission nationale de secourisme ont édité des plaquettes préconisant ces cinq
gestes. De nombreux spécialistes et urgentistes, ainsi que la Croix-Rouge, qui a formé dans le Nord - un département
que vous connaissez bien, madame la secrétaire d'Etat - 7 500 collégiens aux cinq gestes qui sauvent, s'accordent à
donner un crédit important à cette formation pratique. Notre législation du travail va dans le même sens.
Une expérience in situ a été menée à ce sujet en 1992 en Charente-Maritime. Je souhaiterais savoir quels
enseignements ont pu en être tirés.
On objecte à cette proposition l'absence de recyclage. Il est vrai qu'un recyclage serait opportun, mais commençons
par assurer la formation de base auprès des 700 000 à 800 000 candidats aux différents permis de conduire ! Ni la
formation nationale de base en matière de secourisme ni les points déjà abordés de façon théorique dans le cadre du
permis de conduire ne prévoient de recyclage.
Certes, on peut retenir d'autres options. L'école ne pourrait-elle pas former de manière systématique les élèves au
secourisme ? Ce serait évidemment là une avancée essentielle. Mais, en l'état actuel, est-ce réellement plausible ?
Dès lors, pourquoi ne pas mettre en place la formation aux « cinq gestes qui sauvent » à l'occasion du permis de
conduire et l'analyser comme une sorte de recyclage adapté aux victimes de la route, en associant, pour chaque futur
conducteur, la prise du volant à un acte hautement responsable.
Je souhaiterais donc connaître le sentiment et l'analyse de M. le ministre de l'équipement, des transports et du
logement sur cette proposition de réforme, dont le coût est estimé à 150 ou 200 francs par personne et dont des
spécialistes ont estimé en 1986 qu'elle pourrait sauver 1 500 à 2 000 personnes par an.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Madame la sénatrice, M. Jean-Claude Gayssot m'a indiqué
que, avec plusieurs parlementaires, vous étiez intervenue au cours de débats préalables à l'adoption de la loi sur la
sécurité routière pour évoquer l'idée d'imposer à l'ensemble des candidats au permis de conduire une formation
simplifiée aux premiers secours, appelés par les promoteurs de cette idée : « les cinq gestes qui sauvent ». Les
amendements déposés en ce sens n'ont cependant pas été retenus, et ce, d'abord, en raison du caractère
réglementaire évident de cette mesure.
Il convient, d'autre part, d'observer que les dispositions à prendre en matière d'alerte et de balisage des lieux d'accident
sont actuellement enseignées dans le cadre du programme de formation des candidats au permis de conduire.
Le ministre de l'équipement, qui est en charge de la sécurité routière, s'est cependant engagé à entreprendre une
réflexion et à ouvrir une concertation sur l'ensemble de ce dossier, qui est l'objet d'initiatives diverses.
En matière de secourisme, l'autorité compétente est constituée des ministères de l'intérieur et de la santé, qui
disposent d'un organisme consultatif, longtemps intitulé « Commission nationale du secourisme » et devenu
l'Observatoire national du secourisme.
Une réforme du secourisme a eu lieu en 1991. Une formation de base aux premiers secours - donnant lieu à
l'attestation de formation aux premiers secours - a été officialisée par le décret n° 91-834 du 30 août 1991, qui prévoit
que cette formation a une durée minimale de douze heures.
Elle a été complétée, en ce qui concerne le secours routier, qui pose des problèmes particuliers, par une « formation
complémentaire aux premiers secours sur la route » d'une durée de huit heures.
Cette nouvelle formation est le résultat d'un consensus entre la délégation interministérielle à la sécurité routière, la
direction générale de la santé, la direction de la défense et de la sécurité civiles et les associations de secouristes
représentatives au plan national.
Sur les recommandations des experts de la Commission nationale de secourisme, les ministres concernés ont estimé
qu'il était dangereux, pour les victimes, d'accorder un crédit à une unité de valeur de portée inférieure en durée et en
objectifs pédagogiques.
Avec le même souci et pratiquement avec les mêmes arguments, la Commission européenne a écarté la possibilité
d'un tel projet de formation obligatoire aux gestes élémentaires de survie pour les candidats au permis de conduire.
Le problème du premier secours concerne tous les accidents, que ceux-ci trouvent leur origine dans la circulation, la vie
domestique ou les activités de loisirs. On peut donc également se demander pourquoi le besoin de formation ne devrait
s'adresser qu'aux seuls futurs conducteurs, alors que l'accident de circulation implique tous les témoins potentiels, non
seulement des automobilistes mais aussi des cyclistes, des piétons.
L'Observatoire national du secourisme, successeur de la Commission nationale du secourisme, a été installé le 23
mars 1999 par le directeur de la défense et de la sécurité civiles.
Par l'intermédiaire du ministre de l'intérieur, M. Gayssot a demandé à cet observatoire d'engager une nouvelle réflexion
sur le sujet, comme il s'y était engagé devant les assemblées parlementaires lors de la discussion de la loi sur la
sécurité routière. Il convient donc maintenant d'attendre le résultat de cette concertation qui permettra d'appréhender
sereinement l'ensemble des éléments de ce dossier.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Madame la secrétaire d'Etat, depuis trente ans que ce dossier est ouvert, les arguments
avancés de part et d'autre n'évoluent guère.
S'agissant du caractère réglementaire de la mesure que nous préconisons, il peut tout à fait être contesté ; d'ailleurs, le
Sénat lui-même avait adopté en 1988 une proposition de loi tendant à instituer cette mesure, mais elle n'a pas été
reprise par l'Assemblée nationale. Quoi qu'il en soit, là n'est pas le fond du problème.
En fait, il existe une confusion courante entre les gestes de premier secours immédiat, qui sont exécutés uniquement
en cas de risque pour la vie des personnes, et le secourisme en général qui vise à dispenser de surcroît des soins
nécessitant un apprentissage beaucoup plus long, par exemple en cas de fracture.
L'Observatoire national du secourisme a été saisi d'un projet visant plutôt à une formation assurée par l'école. Une telle
formation serait évidemment hautement souhaitable, mais elle pose un problème de réalisation à brève échéance. En
attendant que l'école puisse effectivement intégrer cet apprentissage, on franchirait déjà un grand pas en le dispensant
aux candidats au permis de conduire. Après quelques années, ce serait ainsi un nombre significatif de nos concitoyens
qui seraient en mesure d'accomplir ces cinq gestes simples.
Cela constituerait en outre, pour les nouveaux conducteurs, une incitation à se montrer plus prudents sur les routes par
la prise de conscience des dangers de la conduite automobile. Cela pourrait également les encourager à entreprendre
une formation plus approfondie au secourisme.
La réponse que nous m'avez apportée au nom de M. Gayssot, madame la secrétaire d'Etat, et qui ne m'a pas
pleinement satisfaite, me donne à penser que, avec d'autres parlementaires, nous devrons revenir sur cette question.
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