Question de M. JOYANDET Alain (Haute-Saône - RPR) publiée le 18/03/1999
M. Alain Joyandet appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les dégâts occasionnés par les cormorans, véritable fléau naturel et écologique et pourtant protégés par les textes en vigueur. En effet, si par le passé les risques de disparition des cormorans étaient réels et justifiaient des mesures de préservation, la situation aujourd'hui est inversée et les colonies se sont développées de manière telle que l'équilibre écologique est menacé. La prolifération de l'espèce, de manière soudaine et incontrôlée, a provoqué des migrations de cormorans, des secteurs côtiers du nord de l'Europe, vers l'intérieur des terres. Sous le coup d'une interdiction de chasse, le cormoran n'a plus de prédateur pour réguler son développement. Dès lors, il n'y a plus aucune maîtrise de l'évolution de l'espèce qui envahit tous les secteurs où elle peut trouver la nourriture nécessaire à sa subsistance. Les rivières, mais plus encore les plans d'eau, sont ravagés par ces oiseaux dont la consommation quotidienne de poissons varie entre 300 et 600 grammes. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir intervenir en demandant aux préfets d'examiner avec précision les conséquences de la présence de ces volatiles sur notre territoire et de prendre des arrêtés d'élimination de ces spécimens, peut être un peu plus sévères, de façon à réguler le développement naturel de l'espèce et à éviter ainsi l'exaspération des pêcheurs qui pourraient être tentés de vouloir limiter par eux-mêmes la prolifération des oiseaux.
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Transmise au ministère : Aménagement du territoire
Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 19/08/1999
Réponse. - La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant la protection du grand cormoran. La protection du grand cormoran a été instituée à l'échelle de l'Europe, notamment dans les pays du Nord, où l'espèce se reproduit. Cette protection a induit une expansion de l'espèce qui exerce une pression de plus en plus importante sur les eaux continentales. C'est pourquoi le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement a engagé une politique de régulation des grands cormorans, visant à concilier la pérennité de l'espèce de la protection du milieu aquatique, afin de répondre à un objectif global d'équilibre des espèces. Depuis 1994, en application de l'arrêté du 17 avril 1981 de protection des oiseaux, modifié le 2 novembre 1992 pour ce qui concerne le grand cormoran, les préfets des départements sont autorisés par la ministre à délivrer aux exploitants des étangs de pisciculture extensive ou à leurs ayants droit des autorisations de tir, sur demande motivée et dans les limites d'un quota départemental. Il appartient désormais aux préfets, en fonction de la situation locale et après avoir pris l'avis d'un comité réunissant les différents acteurs concernés, de déterminer les secteurs géographiques du département où les tirs sont autorisés. Dès 1997, sur la base de propositions techniques du Conseil supérieur de la pêche et après avis du Conseil national de la protection de la nature, des opérations expérimentales de destruction du grand cormoran jusqu'au 31 mars 1997 ont été autorisées. Ces opérations ont porté sur un nombre limité de sites en eau libre accueillant des populations de poissons particulièrement menacées. Au vu des résultats de ces opérations, de l'ensemble des prélèvements effectués durant l'hiver 1996/1997 et des résultats du dénombrement de la population hivernante en France, effectué en janvier 1997, le dispositif d'ensemble a été adapté dans un objectif de stabilisation de l'espèce en France. Il repose sur les principes suivants : fixation d'un prélèvement national de 12 % des effectifs dénombrés en janvier 1997, répartis dans les départements en fonction notamment du nombre d'oiseaux tués l'année précédente ; priorité d'intervention donnée à la protection des activités économiques liées aux pisciculture extensives en étang. Interventions simultanées sur les secteurs d'eau libre en périphérie des zones de piscicultures afin d'éviter le report des cormorans entre ces zones et les eaux libres périphériques ; reconduction d'opérations expérimentales sur les eaux libres accueillant des espèces de poissons à valeur patrimoniale ; priorité d'intervention dès l'arrivée des cormorans afin de réduire plus efficacement les dégâts et d'éviter des opérations tardives occasionnant le dérangement d'autres espèces. Pour la campagne 1998/1999 ce dispositif a été reconduit avec des adaptations des quotas. Désormais peuvent être conduites des opérations de destruction dans certains secteurs d'eau libre, en faveur de populations de poissons par ailleurs menacées. Il relève de la responsabilité des préfets, en liaison avec le comité départemental de suivi, de déterminer la liste des secteurs d'eau libre concernés. Pour la campagne 1999/2000 et au vu des résultats du dénombrement des cormorans hivernants réalisé en janvier 1999, une légère augmentation du quota de prélèvement à la fois sur des zones de piscicultures extensives en étang et sur des secteurs d'eau libre où la prédation des cormorans menace directement la survie de certaines espèces de poissons par ailleurs menacées est envisagée en vue de parvenir à l'objectif qui était fixé, à savoir la stabilisation des effectifs. Toutefois, l'essentiel des populations européennes de grands cormorans se reproduisent aux Pays-Bas ou au Danemark, c'est également dans ces pays et au niveau de l'Union européenne que des mesures de régulation efficaces peuvent et doivent être prises. A la demande du ministère chargé de l'environnement, le comité d'adaptation de la directive communautaire sur les oiseaux a accepté que l'espèce soit retirée de l'annexe I de cette directive (espèces menacées nécessitant des mesures de protection particulière de leur habitat). Une décision en ce sens est intervenue le 29 juillet 1997. Un groupe de travail au niveau européen a été constitué à l'initiative du Danemark et des Pays-Bas en vue de l'élaboration d'un plan de gestion de l'espèce dans le cadre de la convention internationale sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage. Il convient d'ajouter que les représentants des pêcheurs, des pisciculteurs et des associations de protection de la nature sont largement associés, tant au niveau national que départemental, aux instances consultatives chargées de se prononcer sur la gestion de l'espèce.
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