Question de Mme DIEULANGARD Marie-Madeleine (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 20/01/1999

Mme Marie-Madeleine Dieulangard souhaite interroger M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les situations inextricables que connaissent des marins étrangers, embarqués sur des navires appartenant à des armateurs en faillite, et qui sont actuellement bloqués dans des ports français. Si le mouvement associatif et les collectivités locales se mobilisent pour assurer le quotidien de ces marins, ces incidents se multiplient depuis plusieurs années sans qu'aucune solution durable ne semble envisagée, malgré la multiplication de conventions internationales et les initiatives suggérées par les syndicats internationaux de marins. Elle souhaiterait connaître les suites données au groupe de travail qui s'est réuni le 6 octobre dernier à l'initiative du ministre, ainsi que la position des autorités françaises sur la création d'une assurance mondiale obligatoire, proposition émise dans le cadre d'un groupe d'expert BIT-OMI (Bureau international du travail - Office des migrations internationales).

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 17/02/1999

Réponse apportée en séance publique le 16/02/1999

Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Monsieur le ministre, voilà près de deux ans, j'interrogeais le ministre des
transports du précédent gouvernement sur les situations dramatiques qu'engendrait le blocage de marins étrangers
dans des ports français en raison de la saisie de leur navire.
La faillite des armateurs est souvent à l'origine de procédures particulièrement longues et complexes, qui nécessitent
notamment l'identification du véritable armateur derrière des montages juridiques volontairement opaques. Il peut
d'ailleurs également s'agir de flotilles d'Etat.
Le paiement des salaires et le rapatriement des équipages deviennent alors accessoires et les marins sont dans
l'impossibilité matérielle de rentrer chez eux ou sont tenus de rester à bord pour ne pas être accusés d'avoir abandonné
leur navire.
Depuis 1997, ces situations perdurent. Aujourd'hui, quatre navires sont bloqués dans les ports du Havre, de Tréguier, de
Nantes et de Marseille. Les marins du navire angolais Kifangondo sont restés près de cinq ans en France !
La solidarité autour de ces équipages en situation particulièrement précaire s'est rapidement organisée. Elle mobilise
les associations, les syndicats, les services d'aide sociale, en particulier ceux des collectivités locales, afin d'assurer
l'approvisionnement en eau, en nourriture, en électricité ou en gazole.
Mais ces solidarités spontanées ne peuvent se concevoir comme la seule réponse des autorités à ce grave problème.
Un groupe de travail a été constitué en octobre dernier sous votre responsabilité, monsieur le ministre, afin de tenter de
trouver des solutions à l'imbroglio juridique qui prolonge considérablement le règlement de ces situations.
Ce groupe réunit les représentants de la profession et la direction des gens de mer. Il serait intéressant d'y associer la
direction des ports, puisque leurs dirigeants sont des interlocuteurs incontournables et qu'ils sont souvent eux-mêmes
partie à ces conflits en tant que créanciers.
Pouvez-nous nous fournir des indications, monsieur le ministre, sur les premières orientations retenues par ce groupe
de travail ?
Les représentants des marins - une organisation comme ITF, par exemple - ainsi que des juristes estiment urgente la
mise en place d'une assurance obligatoire. Elle permettrait de couvrir ces créances privilégiées que sont les salaires.
En effet, les créances salariales sont rarement honorées compte tenu de la faillite de l'armateur et de l'état de
délabrement dans lequel se trouvent les navires, qui ne peuvent être vendus qu'à vil prix.
La mise en place d'une telle assurance ne peut être efficace que si elle se conçoit dans un cadre international.
Une commission mixte Organisation internationale du travail - Office des migrations internationales devrait se pencher
très prochainement sur la question de la sécurité financière des équipages et de leur famille. Pouvez-vous nous
préciser, monsieur le ministre, si le Gouvernement français entend soutenir cette initiative et s'y associer, et quelles
grandes orientations il défendra ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Madame la sénatrice, vous
soulevez un problème grave, aux conséquences parfois dramatiques.
C'est bien dans un contexte international que s'appréhende la situation des marins étrangers embarqués sur des
navires étrangers qui se trouvent abandonnés par leurs employeurs. Ces marins ne sont pas totalement payés et ne
sont pas correctement traités lors d'arrêts prolongés dans nos ports pour des motifs divers, d'origine tant publique que
privée.
C'est pourquoi j'ai décidé, vous l'avez rappelé, de créer un groupe de travail animé par l'administration des affaires
maritimes et des gens de mer, avec la participation des représentants des marins et des armateurs français mais aussi
de la Fédération internationale des travailleurs des transports.
Ce groupe s'est réuni à trois reprises au cours du dernier trimestre de 1998 et il continue ses travaux, qui sont d'une
grande complexité, afin de rechercher des solutions au niveau international avec l'Organisation maritime internationale,
avec le Bureau international du travail ou avec l'Office des migrations internationales, mais aussi au niveau de l'Union
européenne, sans négliger les solutions françaises qui pourraient être proposées en attente de décisions
internationales, obligatoirement plus éloignées dans le temps.
Les associations humanitaires impliquées, souvent de façon exemplaire et indispensable, dans les incidents de ce
type, passés et actuels, sont bien entendus associées à l'ensemble des travaux, dont la conclusion est attendue au
cours du deuxième trimestre de cette année, c'est-à-dire avant l'été.
Des solutions pragmatiques sont recherchées par ailleurs pour mettre fin, au cas par cas, aux situations les plus
criantes, en veillant toujours à ce qu'elles ne soient pas susceptibles d'être considérées comme des incitations à
développer de préférence dans un port français des actions diverses, amenant l'Etat à se substituer à des armateurs
défaillants.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Voilà deux ans, j'ai eu l'occasion de m'associer, à Saint-Nazaire, à ce qu'il faut bien appeler le drame de marins qui
étaient restés bloqués dans le port durant plus de six mois pour des raisons identiques à celles que nous venons
d'évoquer.
Au-delà de la nécessaire solidarité - qui s'est également manifestée à Saint-Nazaire - une réflexion sur le fond s'est
engagée très rapidement avec un certain nombre d'acteurs directement concernés afin de rechercher les moyens de
prévenir ou de remédier à ces situations dramatiques.
Très vite aussi, nous avons convenu que seules des solutions et des règles élaborées et appliquées dans un cadre
international étaient susceptibles d'apporter des réponses valables.
Cela étant, monsieur le ministre, j'exprime le voeu que ces règles, élaborées au sein d'organismes tels que l'Office des
migrations internationales ou l'Organisation internationale du travail, soient réellement appliquées, notamment en
matière d'assurance.

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