Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 20/01/1999
M. Georges Mouly attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des tribunaux de commerce, dont la suppression d'un certain nombre serait préconisée par la mission ministérielle chargée de la réforme de la carte judiciaire. Il lui demande de bien vouloir lui préciser la position du Gouvernement sur cette question qui, par certains aspects, touche à l'aménagement du territoire.
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Réponse du ministère : Petites et moyennes entreprises publiée le 17/02/1999
Réponse apportée en séance publique le 16/02/1999
M. Georges Mouly. Madame le secrétaire d'Etat, sur l'initiative du ministère de la justice, une mission chargée de la
réforme de la carte judiciaire a été constituée au mois de septembre 1998.
Si j'ai bien lu les conclusions de son rapport, cette mission estime que « la carte judiciaire doit être aujourd'hui
réformée, simplifiée et adaptée aux besoins de la population et des entreprises, pour permettre d'améliorer l'accès à la
justice ». C'est un objectif auquel on ne peut que souscrire.
En ce qui concerne plus précisément les tribunaux de commerce, les propositions de la mission ministérielle chargée
de formuler des suggestions pour optimiser le service de la justice suscitent cependant, depuis plusieurs mois, quelque
inquiétude. Cela tient au fait qu'un certain nombre de tribunaux devraient disparaître - la moitié d'entre eux, ai-je lu -
puisque ceux qui sont implantés dans des villes ne disposant pas à ce jour d'un parquet ou d'un tribunal de grande
instance seraient concernés. Il est vrai que d'autres critères sont mentionnés.
Je ne minimise pas les difficultés que soulèverait le maintien intégral des services publics d'une façon plus générale
dans les zones défavorisées les moins peuplées. Mais le sentiment de chacun n'est-il pas qu'il faut, dans ces
conditions, s'efforcer de sauvegarder au mieux les services de proximité, notion bien connue. J'en ai bien conscience,
ce n'est là qu'un aspect des choses, puisqu'une réflexion est aussi engagée sur la composition des tribunaux de
commerce. Ces deux éléments montrent bien l'importance du sujet.
Je ne sais évidemment pas, s'agissant de l'implantation des tribunaux de commerce, objet de ma question, quelles
sont les orientations vers lesquelles peut conduire actuellement la réflexion du Gouvernement. C'est pourquoi je me
permets de vous demander quel sort peut a priori être réservé à la situation des départements qui possèdent deux
tribunaux de commerce. A cette question d'ordre général, mais vous n'en serez pas étonnée, j'ajoute une mention
particulière concernant la situation de mon département qui compte un tribunal de commerce au chef-lieu, Tulle, et un
autre à Brive, ville plus importante, ces deux tribunaux ayant une activité comparable. Il convient de mentionner que le
tribunal de commerce de Tulle recouvre deux arrondissements et que son activité le place dans la moyenne des
juridictions, puisqu'il occupe la quatre-vingt-huitième place sur les deux cent vingt-sept juridictions existantes.
La présence de ces deux tribunaux de commerce permet de maintenir une proximité qui, en la matière, paraît bien
nécessaire à une approche en tout cas plus humaine des affaires et, par une parfaite connaissance du terrain, de ses
spécificités, autorise un traitement effectué le plus en amont possible. Cette considération est, me semble-t-il, loin
d'être négligeable sur un territoire où la présence de secteurs industriels, comme, à Tulle, le secteur de l'armement,
dont vous connaissez la situation, exige un effort d'implantation et de maintien d'activités artisanales ou de petites et
moyennes industries.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu interroger ma collègue ministre de la justice sur la situation des juridictions
consulaires ; elle vous en remercie. Ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous apporter les éléments de
réponse suivants.
Comme vous le savez, la justice commerciale n'est plus adaptée aux exigences contemporaines.
Des études récentes, vous l'avez dit, l'ont fortement démontré, notamment le rapport d'enquête parlementaire sur les
tribunaux de commerce publié au cours de l'été 1998 et le rapport conjoint des inspections générales des finances et
des services judiciaires, qui a été remis à la même période au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et
au ministère de la justice
Un communiqué commun des deux ministères a, le 14 octobre 1998, fait connaître les orientations du Gouvernement
en la matière.
Au nombre de ces orientations figure la réforme de la carte judiciaire des tribunaux de commerce, quasiment inchangée
depuis 1807 puisque la dernière réforme en la matière, celle qu'a conduite Michel Debré en 1958, n'a pas concerné ces
juridictions.
Il s'agit tout à la fois de garantir l'indépendance et l'impartialité des juridictions consulaires par rapport aux entreprises
justiciables et d'offrir une justice efficace à la hauteur des enjeux économiques et d'emploi.
Un haut fonctionnaire a été spécialement nommé auprès du directeur des services judiciaires pour proposer des
mesures de rationalisation permettant de revoir le nombre de tribunaux - certains d'entre eux ont désormais une activité
particulièrement réduite - tout en recherchant dans chaque département, avec les élus et les autorités directement
concernés, des solutions qui respectent les logiques territoriales. Cette étude aura lieu en Corrèze avant la fin de
l'année.
Le garde des sceaux refuse toute approche centralisée du sujet. La méthode qui est utilisée est fondée sur la
concertation locale et le pragmatisme, elle ne cherche pas à fixer des normes générales et nationales ou à
départementaliser de manière systématique les ressorts des tribunaux de commerce.
Bien au contraire, elle recherche des formules permettant de proportionner la présence de la justice commerciale à
l'importance des bassins de vie et d'activité, ainsi que vous l'avez dit tout à l'heure, à l'émergence de solidarités locales
autour d'agglomérations et de pays, aux particularismes géographiques et aux qualités des voies de communication
des territoires concernés. Cette attention est le gage du respect du territoire, dans son état actuel, et de son
aménagement concret, qui ne peut se confondre avec un renoncement à toute initiative, alors même que la notion
d'adaptation est un gage de qualité pour tout service public.
L'approche concrète adoptée par le ministère de la justice permettra de redessiner la carte des tribunaux de commerce
d'ici à la fin de 1999 en conciliant la nécessité de moderniser le fonctionnement de la justice avec le droit pour tous,
particuliers et entreprises, d'accéder à un service de qualité correspondant à ses besoins propres.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, de la teneur de votre réponse.
Nul n'ignore l'existence du rapport d'enquête parlementaire. Puisqu'il n'y a pas eu de modification depuis 1807, chacun
s'accordera, je pense, à reconnaître que l'on peut songer à une réforme de la carte des tribunaux de commerce.
Cela étant, nul ne saurait nier la volonté d'indépendance et d'impartialité, deux principes qu'il faut garantir, avez-vous dit.
Pour ce qui concerne mon département, j'ai noté que c'est à la fin de l'année que nous saurons quelque chose et, d'une
façon plus générale, que rien ne se ferait sans concertation locale, sans pragmatisme, ce que chacun peut saluer. On
peut donc caresser l'espoir d'une réforme raisonnable en la matière.
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