Question de M. GIRAUD Francis (Bouches-du-Rhône - RPR) publiée le 21/11/1998
M. Francis Giraud appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la situation des médecins rapatriés d'Algérie au regard de l'assurance volontaire vieillesse. Il lui rappelle qu'à ce jour la prise en compte des dix années d'activité professionnelle pourtant effectuées sous conventionnement par ces praticiens avant leur réintégration en métropole, demeure en suspend. En effet, des conditions équitables de rachat de points ne leur sont pas proposées. En se référant aux propos tenus devant l'Assemblée nationale, le 9 novembre 1998, il lui demande quelles démarches ont été entreprises pour régler ce dossier. Il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui confirmer notamment que les conditions de rachats de points par les intéressés seront bien celles fixées en 1962, lors de la création de l'assurance volontaire vieillesse. Enfin, peut-il lui indiquer à quelle date les intéressés peuvent escompter bénéficier de la totalité de leurs droits à la retraite ?
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Réponse du ministère : Santé publiée le 20/01/1999
Réponse apportée en séance publique le 19/01/1999
M. Francis Giraud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais appeler votre attention sur la situation des médecins
rapatriés d'Algérie au regard de l'assurance volontaire vieillesse, créée en 1962.
A ce jour, dix années d'activité professionnelle, pourtant effectuées à la demande des pouvoirs publics sous convention,
de 1952 à 1962, par les médecins d'Algérie, avant leur réintégration en métropole, ne sont toujours pas prises en
compte dans le calcul de leur retraite.
A l'Assemblée nationale, interrogé sur ce dossier, vous avez reconnu vous-même que ce problème résultait d'un «
dysfonctionnement administratif », précisant : « La caisse autonome de retraite des médecins français, la CARMF, a
très longtemps nié, à tort, que les médecins rapatriés aient exercé sous convention médicale en Algérie, de 1952 à
1962. »
Vous avez ajouté : « Une information exacte - qu'ils n'ont pas eue ! - aurait permis à ceux-ci de cotiser volontairement à
l'avantage social vieillesse dès 1962, date de sa création, jusqu'à 1972, date où il a pris un caractère obligatoire. »
Voilà donc un double préjudice que les médecins rapatriés continuent de supporter trente-sept ans après
l'indépendance de l'Algérie : dix ans, voire vingt ans de leur vie professionnelle sont toujours exclus du calcul de leur
retraite !
Beaucoup de rapatriés se sont installés dans le sud de la France, notamment dans les Bouches-du-Rhône. Aussi, en
tant qu'élu de ce département, souhaiterais-je que ce problème soit résolu rapidement et dans de bonnes conditions.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous confirmer que les conditions de rachat de points par les intéressés
seront bien les conditions de 1962, année de la création de l'assurance volontaire vieillesse ? Pouvez-vous nous assurer
qu'elles s'appliqueront également à leurs ayants droit ? Enfin, à quelle date l'ensemble des intéressés retrouveront-ils,
en toute justice, la plénitude de leurs droits ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Depuis que j'ai qualifié cette situation de «
dysfonctionnement », les choses auraient en effet dû avancer, monsieur le sénateur. Je vais m'efforcer de faire le point
avec vous.
Vous m'avez fait part de vos inquiétudes sur la situation des médecins rapatriés d'Algérie au regard du régime des
allocations supplémentaires de vieillesse, notamment des conditions qui leur sont offertes pour racheter des points de
retraite au titre des périodes d'exercice professionnel en Algérie, voilà un certain nombre d'années.
Jusqu'en 1997, les médecins qui en avaient fait la demande auprès de la CARMF, la Caisse autonome de retraite des
médecins français, n'ont pu procéder au rachat de ces périodes.
La CARMF estimait que, en l'absence d'homologation des conventions départementales conclues en Algérie par la
commission nationale compétente, prévue par l'ordonnance du 19 octobre 1945 portant organisation de la sécurité
sociale, le caractère conventionnel de leur activité, qui est la condition posée par la loi pour bénéficier de cette opération
de rachat, ne pouvait être reconnu.
Mais la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans un arrêt du 13 janvier 1997, a rejeté cette interprétation en raison de
l'existence d'une procédure spéciale d'approbation des conventions locales, prévue dans un arrêté du 10 juin 1949 paru
au Journal officiel algérien de l'époque.
Au vu de cet arrêt, le conseil d'administration de la CARMF, guidé par un souci d'équité, a décidé, lors de sa séance du
31 mai 1997, de permettre immédiatement à tous les médecins rapatriés d'Algérie remplissant les conditions
statutaires d'ouverture du droit à rachat de racheter leurs années d'exercice sous convention, avec effet au premier jour
du trimestre civil suivant leur demande. Les requérants à un rachat d'annuités peuvent en outre prétendre à un rappel
d'arrérages, dans la limite de la prescription quinquennale prévue par l'article 2277 du code civil, si l'examen de leur
dossier met en évidence l'existence d'une première demande de rachat antérieure. Le barème de rachat retenu est celui
qui est en vigueur au moment du paiement du rachat, l'âge pris en compte pour le calcul du montant du rachat étant
l'âge à la date d'effet de la révision des droits. Ce n'est pas simple !
Cette décision, conforme aux statuts de la caisse, respecte l'arrêt de la cour d'appel et témoigne de la volonté de la
CARMF, malgré les difficultés financières auxquelles est confronté le régime de l'ASV, de régulariser la situation des
médecins rapatriés d'Algérie. Au demeurant, son caractère favorable n'a pas échappé aux dizaines de médecins et de
conjoints survivants qui ont d'ores et déjà utilisé ce dispositif.
Les demandes de certains médecins rapatriés d'Algérie, qui viennent en supplément de cette décision favorable de la
CARMF, ne sauraient être satisfaites sans une profonde modification de la réglementation des rachats, qui est
complexe, vous l'avez constaté, monsieur le sénateur. En l'état actuel des textes, les possibilités de rachat ne sont
ouvertes qu'aux médecins nés avant 1922 ou ayant adhéré à l'ASV avant 1972 lorsque ce régime était facultatif et aux
conditions de rachat en vigueur au moment où la demande est présentée, ce que je peux comprendre.
En outre, accéder au souhait d'un rappel complet d'arrérages depuis le début de la retraite nécessiterait de modifier la
loi sur la prescription quinquennale puisque de nombreux médecins rapatriés ont cessé leur activité depuis plus de cinq
ans. Les problèmes juridiques sont donc d'autant plus complexes qu'il ne saurait être question d'introduire des
dispositions qui pourraient être jugées discriminatoires par les médecins métropolitains.
Enfin, vous n'ignorez pas que le coût de l'opération pourrait se révéler très onéreux alors même que le redressement du
régime de l'ASV, confronté à la perspective d'une cessation de paiement, va exiger des efforts financiers importants de
la part de l'ensemble des actifs et des retraités.
A titre d'exemple, je rappelle que, avec le dispositif actuel, un médecin âgé de quatre-vingts ans en 1997 a pu
bénéficier, avec un rachat payé 15 180 francs, d'un rappel de plus de 132 600 francs, et qu'accéder à la demande de
rappel complet depuis le début de la retraite conduirait à lui verser un rappel supplémentaire de 200 000 francs.
Le Gouvernement souhaite donc traiter ce dossier - les choses ont avancé depuis ma précédente réponse, mais, je le
répète, la situation est complexe - en concertation avec l'ensemble des parties intéressées et saisira ainsi
prochainement le conseil d'administration de la CARMF pour qu'il examine votre proposition et donne son avis sur les
mesures supplémentaires de régularisation qu'il faut envisager.
Je regrette de ne pouvoir vous faire une réponse plus optimiste, mais elle est juridiquement complète. Voilà où nous en
sommes, monsieur le sénateur.
M. Francis Giraud. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Giraud.
M. Francis Giraud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous m'avez apportées et de la
clarté avec laquelle vous exposez ces difficultés administratives.
Nous sommes médecins tous les deux. Attendre la disparition du patient pour appliquer le traitement me paraît
inconvenant, d'autant que plus de trente-sept ans se sont déjà écoulés. Aussi, j'espère que le Gouvernement agira
auprès de la CARMF pour que justice soit rendue à ces médecins, qui n'ont pas démérité.
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